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TALKING HEADS - Stop Making Sense (jonathan Demme) (1984)
Par WALTERSMOKE le 11 Juillet 2018          Consultée 2921 fois

En 1983, après avoir fait une pause bien méritée de plus d'un an, les TALKING HEADS repartent au front musical et sortent leur 5e album studio, Speaking in Tongues. Un album bourré de qualités, bien que moins riche et exubérant que Remain in Light (1980), mais doté de pas mal de longueurs plombant le tout – surtout en version CD. L'album connait de toutes façons un joli succès, et la tournée qui s'en suit connaîtra pareil sort. Mais histoire de marquer le coup, il est décidé de filmer les concerts et d'en faire un film destiné au marché vidéo. Jusque là, rien de franchement ébouriffant. Là où ça change, c'est que pour la réalisation d'un tel projet, c'est vers le réalisateur Jonathan Demme que David Byrne se tourne. Et Demme n'est pas un simple réal' de télévision (sans offense pour ces derniers), c'est un ancien de l'écurie Roger Corman, qui commence à se faire un nom.

Pourquoi une telle précision d'emblée ? Car Stop Making Sense n'est pas un film de concert comme les autres. Écrit par Demme et les TALKING HEADS, il vise clairement à être une véritable expérience cinématographique, là où trop d'autres films musicaux, aussi bien ceux de l'époque que ceux sortis depuis, se contentent de filmer des musiciens jouer. Qu'on se rassure, on est également loin des ratés de Led Zeppelin ou Kiss, la scène de concert restant le seul décor. Et cela se sent dès le générique, à la police rendant hommage à celle de Docteur Folamour.

Stop Making Sense est un film unique rien que par son enchaînement de plans sinon iconiques, au moins remarquables. On pense en premier lieu (chronologiquement parlant) au défilé de techniciens en arrière-plan durant le premier tiers, installant les instruments au fur et à mesure de l'arrivée progressive des différents musiciens. Mais celui qui permet l'accumulation de scènes remarquable, ce n'est ni plus ni moins que David Byrne. Il n'est pas seulement le leader du groupe, il en représente l'essence, du moins en termes de prestation scénique. Tantôt il explicite la boite à rythmes de "Psycho Killer" qui imite le bruit d'une mitrailleuse en bougeant dessus comme s'il se faisait canarder, tantôt il se dandine avec grâce (si si) et court tout autour de la scène sur "Life during Wartime", tantôt il marque les esprits avec son fameux Big Suit, costume grotesque apparemment inspiré du théâtre no, sur "Girlfriend is Better". Un véritable showman décomplexé, capable de porter à lui tout seul les 90 minutes que dure le film. Mais l'énergie déployée est collective, chacun des autres musiciens apporte de manière décisive sa pierre à l'édifice – en même temps, quand parmi les musiciens additionnels on retrouve deux Parliament-Funkadelic (Bernie Worrell et Lynn Mabry), rien d'étonnant.

En termes de mise en scène, Stop Making Sense fait fort, très fort même. Grâce à un tournage étalé sur 3 concerts en décembre 1983, l'intrusion des caméras est réellement minimale, et le montage achève d'en faire un long-métrage homogène et pertinent dans sa lecture (bon, il y a encore quelques faux raccords comme un ballon qui bondit sur la scène avant de totalement disparaître au plan suivant). Le côté fou et hanté de "What a Day That was" est ainsi appuyé par l'usage de projecteurs en contre-plongée des musiciens, apportant un effet surnaturel sur scène [1]. Plus loin, les TALKING HEADS frappent fort avec un côté fortement explicite, comme la mise en scène naïve de "This must be the Place", ou encore la solitude de Byrne sur "Once in a Lifetime" (ou quasi-solitude si l'on oublie pas Chris Frantz en arrière-plan). Oh, et attention à "Genius of Love". Non pas que la chanson du Tom Tom Club soit mauvaise (oh que non) ou que son interprétation soit mauvaise (au contraire, c'est la meilleure !), mais les flashs lumineux à même de provoquer l'épilepsie, c'est non.

En dehors de quelques erreurs vraiment minimes et de l'appréciation totalement subjective de certains morceaux, Stop Making Sense ne souffre d'aucun défaut. Un vrai exemple de ce qu'on doit faire quand il faut filmer un groupe sur scène, surtout quand ce dernier est atypique et explosivement créatif. À la rigueur, il manque certains morceaux pourtant filmés, comme "Cities" et l'enchaînement "Big Business"/"I Zimbra" [2], mais c'est comme réclamer une seconde cerise sur un gâteau. Oh, et pour finir sur une note vraiment négative, Stop Making Sense sera le dernier grand acte des TALKING HEADS avant une sale période pour sa musique – mais pas pour son compte en banque.

[1] : pas étonnant quand on sait que le directeur de la photo du film n'est autre que Jordan Cronenweth, qui avait précédemment travaillé sur Blade Runner !
[2] : quoique, ils sont bien publiés sur la réédition DVD. Cependant, il paraît qu'il existe des VHS où ils sont pleinement intégrés au montage

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- David Byrne (guitares, chant)
- Jerry Harrison (guitare, claviers)
- Tina Weymouth (basse, claviers, percussions)
- Chris Frantz (batterie)
- Bernie Worrell (claviers)
- Steven Scales (percussions)
- Alex Weir (guitare)
- Edna Holt (choeurs)
- Lynn Mabry (choeurs)


1. Psycho Killer
2. Heaven
3. Thank You For Sending Me An Angel
4. Found A Job
5. Slippery People
6. Burning Down The House
7. Life During Wartime
8. Making Flippy Floppy
9. Swamp
10. What A Day That Was
11. Naïve Melody
12. Once Ina Lifetime
13. Genius Of Love
14. Girlfriend Is Better
15. Take Me To The River
16. Cross-eyed And Painless



             



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