Sur the Bends, Radiohead nous joue un rock fin, qui exploite une palette très large d'effets et qui du coup, témoigne, dans sa fougue juvénile, de son ambition. Guitares acoustiques, guitares électriques avec différentes saturations, orchestrations parcimonieuses, bidouillages électro qui brouillent les timbres : tout est là pour donner une impression de richesse.

Si le son est ancré directement dans les 90's, le groupe semble se caler dans le sillage des Beatles de la grande période, qui, tout en étant résolument pop, essayait d'en faire exploser les carcans. Et si les expérimentations futures confirmeront cette façon de penser, on reste pour l'instant dans des contrées familières. Il y a du "Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band" dans un titre comme "The Bends".

Le ton est, comme toujours chez Radiohead, un peu tristoune, mais les harmonies vocales de Yorke, soutenues par les bonnes vieilles guitares, exhalent une certaine chaleur humaine. De là, on appréciera un album dans l'ensemble solide, avec des morceaux tels que "High and Dry", "Fake Plastic Trees" jusqu'au triplé de fin, merveilleux de sensibilité, "Black Star", "Sulk" et "Street Spirit (Fade Out)".

Du coup, on comprend sans peine pourquoi les personnes qui ont découvert le groupe à l'époque adorent The Bends. Malheureusement, il sera difficile pour un auditeur novice de 2008 de se prendre la même claque : il y a tant de groupes qui ont voulu faire comme Radiohead ensuite qu'on a presque l'impression de connaître l'album avant de l'avoir écouté. Mais peu importe, ça reste du bel ouvrage qu'il serait dommage de méconnaître.