Depuis quelques années, Vanessa PARADIS, la chanteuse, s'était fait bien discrète. Entre sa carrière d'actrice et sa rencontre avec Johnny Depp, qui débouche sur la naissance du couple le plus apprécié des médias (pas que français) et de la presse-people ainsi que la naissance d'une fille, Lily-Rose, les activités discographiques ne pouvaient qu'être retardées. Finalement, c'est à vingt-huit ans (quand elle semblait en avoir dix-huit hier) que la demoiselle revient avec Bliss, son quatrième album, troisième en langue de Molière.

En 2000, on voit le clip avant-coureur de "Commando" apparaître sur les écrans et on se dit super, génial ! La période Lenny KRAVITZ est refermée pour de bon, miss PARADIS préfère de nouveau chanter du blues et du rock plutôt que du r'n'b. Elle nous fait un genre de "Tandem" en moins bon mais sympa. Les saxos et cuivres sont de sortie autant que les guitares, ça convient si bien à elle et à sa voix acidulée ! Le titre porte la marque de Franck Langolff, façonneur musical des deux premiers disques de Vanessa, ce n'est pas un hasard.

C'est l'un des deux seuls concernés toutefois, avec "Dans Mon Café", qui incarne davantage l'esprit de la fin des années 90 en France et dans le milieu variété-pop. Question bidouillages, ça bave, ça crache fort du côté des guitares, mais ce son rock alternatif convient-il à Vanessa PARADIS quand il manque d'énergie ? Non, et c'est une constante sur Bliss, album marqué par une monotonie et une maladresse qui lui fait plutôt défaut, en plus d'avoir été amené par un single trompeur, car isolé du reste, plus encore que "La La La Song" qui retrouve l'univers de l'album avec Kravitz.

En outre, Didier Golemanas a sans doute réalisé de meilleurs travaux par le passé, chez BASHUNG et d'autres. Ici, au niveau des paroles, le verbe est simple mais l'habileté de GAINSBOURG n'y est pas. Beaucoup d'idées sonnent creuses, dès le départ pour "L'eau et le Vin", même si musicalement ça tient plus que la route, grâce à la participation de... BASHUNG ! La raison de cette déception incombe également à Vanessa PARADIS, son chant parfois approximatif ("Que Fait la Vie ?") et des mélodies peu reluisantes, des arrangements qui jouent sur la corde sensible de l'amateur de pop années 60. Tant de choses qui n'aident pas Bliss à se sortir de son identité proprette et BCBG, en tout cas pas de manière assez bonne pour durer.

L'ambiance jazzy et ou cinématographique de "Pourtant" et "Que Fait la Vie ?", même si ce sont les deux autres singles choisis, n'est clairement pas ce qu'on trouve de meilleur ici, par rapport aux deux premiers titres. C'est bien fait, mais ça ne déclenche aucune passion, en plus de sonner un brin maladroit. Vanessa PARADIS joue beaucoup sur la sensualité et la féminité qui ont conquis les foules, mais on préfère vraiment l'entendre dans un autre registre. Cela dit, tout n'est pas noir non plus, par exemple "St Germain", bossa-nova pleine de références à la Capitale, est mignonne et il n'y a rien à redire sur la voix ici. Mme Depp la compose et l'interprète avec son mari qui joue de la guitare, n'y a-t-il pas là de quoi rendre jalouses toutes les soupirantes du beau Johnny au monde ?

Elle s'implique d'ailleurs nettement plus ici qu'auparavant dans l'écriture des paroles et la confection des mélodies, mais la preuve par deux fonctionne bien aussi, comme avec Mathieu Chédid alias -M- qui apparaît pour la première fois. En ce qui concerne ce dernier, c'est l'année où ses premiers albums se font réellement connaître et où il devient vraiment énorme. Ses musiques pour Vanessa PARADIS n'ont rien de folichon, mais il n'est pas plus à blâmer qu'un autre ici. "When I Say" est agréable quelques instants mais trop marquée par la torpeur d'ensemble. Quant aux trois dernières chansons, elles bénéficient de la participation indirecte de Lily-Rose et de ses gazouillis, ce qui rend le tout adorable et légèrement meilleur.

L'album du retour de la demoiselle a de quoi laisser circonspect, à trois ou quatre morceaux près. Il ouvre néanmoins la voie à une collaboration de taille et sur le long, très long terme !