La comparaison foireuse, en voilà un sport apprécié des chroniqueurs en mal d'inspiration. Surtout lorsqu'il s'agit de descendre un skeud sans trop se fatiguer. Aujourd'hui ça tombe bien, car le quatrième album de CAMERA se prête particulièrement bien à l'exercice.

Emotional Detox, c'est comme un bon vieux potage d'hiver. Avec de beaux légumes dedans. La recette est fameuse, qui plus est exécutée de main de maître et généralement les premiers bols sont un ravissement pour les papilles. Mais le potage, c'est comme tout le reste. Parfois, on sature.

Ce nouvel effort du quintet berlinois fait exactement le même effet. Emotional Detox est un album assommant au point de devenir presque indigeste. Long, trop long. Avec des pistes qui durent souvent des plombes, des plombes ! D'autant plus que CAMERA ne semble n'avoir strictement rien à dire et nous fait quasiment le même coup à chaque fois. L'amorçage fonctionne bien, comme d'habitude, et puis plop ! Plus rien. Le trip est loupé, la magie n'opère pas. L'infatigable motorik parvient certes à nous mener jusqu'à la fin du morceau, dont les trois-quarts ne s'écoute cependant que d'une oreille distraite, voire absente. Ce disque est monotone. Pas ennuyeux, juste terriblement monotone.

Pris un par un, aucun titre n'est foncièrement raté, bien que certains auraient encore une fois grandement gagné à faire plus court (« Patrouille », « Himmelhilf », « Nicenstein »). Le problème, c'est bien l'album en lui-même. Celui-ci peine à se renouveler et de fait tourne carrément en rond. Dès le départ aussi, le groupe partait à reculons. Emotional Detox ignore la richesse de Phantom of Liberty. Au contraire, on s'en retourne ici aux excursions stellaires de Remember I Was Carbon Dioxide. Non seulement la prise de risque est nulle, mais la technique est de plus mal assurée. Pour faire simple, CAMERA réchauffe la soupe et la rate.

En outre, les rares élans d'audace semblent bien impersonnels. « Cosm » évoque The SOFT MOON, avec son jeu de basse et son ambiance nocturne si caractéristiques de la formation américaine ; « Pacific One » se noie dans l'océan de la synthwave actuelle. Dommage.

Après un flamboyant Phantom of Liberty, CAMERA revient donc en 2018 avec un album insignifiant. On trouve bien quelques passages sympas (« Gizmo », « Pacific One », « Feuewerk »), mais de manière générale rien ne surnage vraiment à la surface de ce potage d'hiver certes bien présenté, mais somme toute sans grande saveur.