Une bien belle association, en cette année 1998, que celle de Bernard BENOIT et de Yann BENOIST. Ce dernier est bien connu pour avoir accompagné RENAUD dans les années 80 durant trois de ses tournées, puis d'autres chanteurs réputés comme Gilbert BECAUD, Serge LAMA, Francis CABREL, Patricia KAAS, MAURANE...

Le premier titre, choisi pour donner son nom à l'album, "Avel Dro an Distro", annonce une collaboration superbe et d'abord grâce au feeling guitaristique ! Pendant que jouent des percussions latino programmées aux claviers, un esprit doux s'installe alors que Bernard BENOIT déroule de superbes arpèges à la guitare nylon/classique, et avant que Yann BENOIST n'intervienne à l'électrique. Par un toucher agréable, celle-ci plane, se dédouble en mode "twin guitars", ou "guitares jumelles"... Un an dro vraiment splendide, composé par les deux musiciens.

Chose amusante, cet effet n'est pas répété, mis à part sur le dernier morceau, nouvelle version de "L'héritière de Keroulaz", thème chéri de Bernard BENOIT, ici entre jazz et reggae, mais tout aussi réussie et entremêlant les différents sons de guitare.

Le reste de ce disque est entièrement composé (ou presque, à un ou deux traditionnels près) par Bernard BENOIT qui figure en tant que seul guitariste, la plupart des claviers étant joués par Yann BENOIST. On relève d'ailleurs une qualité constante, belle unité présente dans les ambiances et sons employés, ce qui n'est pas toujours le cas dans les petites productions à l'époque.

Percussions programmées ("Loratour", "Ar Bleiz Gwen", "Au Jerzual"), voix oniriques de synthèse ("Divouzell"), batterie factice ("Gigolo") n'enlèvent rien à une belle gamme de sons choisis par BENOIST. Surtout que l'apport acoustique, à côté, est on-ne-peut meilleur dans son effectif le plus réduit, à savoir guitare classique et – rarement - 12 cordes, tympanon et cette merveilleuse harpe celtique dont Bernard BENOIT nous régale dès l'intro rêveuse de "Au Jerzual". Ce nom est intimement lié à la ville de Dinan, dans les Côtes-d'Armor, où a lieu chaque année une course qui le porte également ainsi qu'un festival international de harpe celtique !

Seules touches d'originalité, pour deux morceaux chacun : un saxophone soprano qui renforce la couleur jazz de "Divouzell" et s'invite avec sens de la distinction sur le bal plinn fort prenant de "Me Oa Dime'et" (où l'on entend quelques voix d'hommes traditionnelles), ainsi qu'une cornemuse écossaise notamment sur le merveilleux "Vague de granit". L'arpège de ce dernier, nocturne et feutré, avec nappe en fond, rappelle les premiers disques de Bernard BENOIT, Lutunn Noz surtout, de même que la ballade "Luskid", caressée par une pluie d'arpèges de 12 cordes.

Parmi les autres trésors cachés de cet album se démarquent "Loratour", "Gigolo" et son esprit jig au duo guitare/tympanon extrêmement bien fait (idem pour "Ar Manej"), et pour finir, "Naissance du celtisme", dont le rythme tribal et les aspirations pentatoniques de la harpe (gammes à cinq notes) appellent à une créativité qui, tout comme le thème proposé, n'est pas sans nous évoquer Alan STIVELL au moment de son album Légende, en 1983. Vraiment, un très beau travail que ce Avec Dro an Distro !