Ce disque porte bien son nom, car d'une certaine façon, il est "amazing", extraordinaire sans être forcément grandiose et au moins par rapport au reste de la discographie du CONDOR. Après un remaniement d'équipe important, car les frères Tutillo et le batteur Jean-Claude Dumas sont désormais absents, on tient là un beau pendant à La Provence au Coeur du Monde (2014).

Pendant instrumental car il n'y a que très peu de chansons, la plupart des parties vocales sont narrées ("Legend", unique reprise contrairement à l'album précédent, "New gigue", "Provence merveilleuse"). Certains peuvent regretter le manque de chansons, et on ne doit pas les contredire entièrement tant celles de 2014 étaient bonnes.

Toutefois, ce disque de 40 minutes est rempli comme il se doit. Une seule reprise, des arrangements d'airs traditionnels et de la composition, chose qui a de quoi séduire sur le papier, ou plutôt le verso d'une pochette cartonnée digipack qui ressemble diablement à celle de l'album précédent (Racines, 2017) alors que les deux n'ont rien à voir.

De plus, LE CONDOR revient à une formule rock et ce n'est pas pour nous déplaire ! La guitare électrique intervient dès les premières mesures de "Gothia", dans un ton blues-rock qui rappelle une fois encore le jeu de David Gilmour (PINK FLOYD). Un morceau qui alterne avec brio intro sombre aux claviers, marche folk tribale, reprise du thème principal avec breaks rythmiques rock "lourd" et conclusion électro/funk/dance bienvenue. Trompette et cornemuse se succèdent gaiement.

Si cela donne l'impression d'un cocktail hétérogène, Jean-François Gérold, Jean-Marc Bisson, Ludovic Dunan etc, ont de la suite dans les idées et proposent un disque fort abouti, d'une belle densité avec le ton original espéré.

"Scarborough Fair" par exemple, une chanson mille fois entendue, en comptant même LE CONDOR en 2010 et sur scène depuis, est ici brillante de maîtrise grâce à l'envie de sonner "proche mais différemment". Merci pour l'arpège de guitare, la batterie subtile de Clément Pernet ainsi que l'intervention superbe de Gabriel Desbiolles aux uilleann pipes/cornemuse irlandaise.

Le medley de thèmes festifs connus ("French Cancan", "Toréador prends garde"...) sur "Classic's" peut sembler facile, mais c'est fait avec un tel naturel et une légèreté si communicative qu'on ne trouve rien à redire. Pas plus que pour "Carnaval", reprise de la célébrissime berceuse galloise "Dunmow Flitch" (Bonne nuit les petits...) au galoubet et clavier cristallin, développée en version country avec guitare western, avant de partir en délire latino. LE CONDOR n'a pas perdu de telles influences malgré l'absence des Tutillo.

Un excellent disque vraiment, qui s'offre le luxe d'un titre pop-rock sudiste ("Akaïsa") d'excellente facture, d'une nouvelle version du morceau "L'envol" (album du même nom de 2013). Ce décollage aux deux tiers, avec la batterie qui devient folle, mmh... La production réverbérée des uilleann pipes suivant la flûte sur "Provence merveilleuse", tandis que la voix de Gérold nous parle des paysages allant d'Avignon à la montagne Sainte-Victoire, près d'Aix, apporte quelque chose d'aérien en plus à ce morceau. Et ces choeurs "grégoriens"...

Et cet emprunt, lui aussi très provençal, au Suisse metalleux gothique Adrian Von Ziegler ("Legend") à grand renfort de nappes sombres, de narration envoûtante et poétique... Cette "New gigue" où le piano ressort, ces "Tambourins" (vraie chanson, isolée dans l'ensemble) où les voix masculines se répondent et portent une mélodie séduisante... De la belle ouvrage, au soupçon de créativité saupoudré avec goût, de quoi donner envie d'y revenir souvent !