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BRAINTICKET - Psychonaut (1971)
Par AIGLE BLANC le 12 Avril 2020          Consultée 777 fois

Selon Joël Vandroogenbroeck, BRAINTICKET tire sa force et son originalité du renouvellement constant de ses membres qui préside à chaque nouvel opus. La production d'un album résulte toujours de rencontres humaines initiales débouchant collectivement sur l'élaboration d'un projet musical mû par l'inspiration respective des personnalités rassemblées.
Si l'équipe du second album de BRAINTICKET change, c'est à cause principalement de la polémique engendrée par la sortie du 1er opus, attisée en particulier par les notes inscrites dans le livret en guise d'avertissements et que voici reproduites ici à titre indicatif : "A n'écouter qu'une fois par jour sous peine de voir votre cerveau imploser." et "Après avoir écouté ce disque, vos amis ne vous connaîtront plus.". Le groupe n'a même pas été consulté avant que Halleluia records prenne l'initiative d'apposer ces deux annotations provocatrices sur le livret, de sorte que Joël Vandroogenbroeck n'en a pris connaissance qu'après s'être procuré un exemplaire de son œuvre et avoir lu le dos de la pochette. Si on ajoute à cela la boutade d'un D.J à la radio en guise d'accroche publicitaire (On dit de ce disque que c'est un trip, mais à l'écoute on ressent plutôt un mauvais trip, phrase ayant été ajoutée ultérieurement au livret), le groupe en a été directement impacté, taxé de prôner en toute impunité les vertus hallucinogènes du L.S.D, devenant dès lors persona non grata dans plusieurs pays, dont les prudes USA, où son disque fut interdit de vente. La première mouture de BRAINTICKET n'en a pas survécu.

Après avoir tenté de lancer un autre groupe, sans résultat, Joël de retour en Suisse rencontre Barney Palm au sein d'une communauté de hippies. Batteur et percussionniste, Barney touche également à la guitare et s'adonne au chant à l'occasion. Les deux hommes s'associent pour jouer ensemble et ainsi revient le désir de défendre un nouveau projet musical, donc de fonder une nouvelle mouture du groupe. C'est en Italie que Joël décide de poursuivre l'aventure, pays latin où émerge une des plus grandes scènes prog rock d'Europe... après l'Angleterre évidemment. Là-bas, il rencontre la chanteuse Jane Free, guitariste de folk et musicienne de rue, une Américaine Carol Muriel sans réel pédigré musical, le peintre Umberto Santucci (qui réalise la pochette psychédélique du nouvel album). Il déniche aussi deux musiciens suisses, le guitariste Rolf Hug et le bassiste Martin Sacher. Ensemble, s'élabore le nouvel album, dans un style davantage orienté vers le chant (Rolf et Jane), plus serein que son prédécesseur, mais non dénué de couleurs psychédéliques au sein de structures proches du prog.

Si la musique déployée dans Psychonaut relève bien et toujours de la sphère Folk-Rock-Psyché, elle se présente néanmoins aux antipodes de son illustre aînée. Là où Cottonwoodhill filait sur les chapeaux de roues tel un ouragan emportant tout sur son passage, dans un délire bruitiste des plus acides, Psychonaut ralentit considérablement le propos et prend le temps de développer des ambiances hallucinogènes aux couleurs champêtres des plus sages. Quand Cottonwoodhill épousait les contours d'un mauvais trip, Psychonaut éveille les sens aux délices langoureux d'un folk 'lysergique' pastoral. Le sitar de Joël, plus présent, le colore d'une humeur plus méditative, comme le montre la dernière partie de "Watching You". On entend même l'orage qui s'approche à la fin de "One Morning", préfigurant ce qui deviendra le topos le plus représentatif de la musique new-age presque dix ans plus tard. Rien d'étonnant à ce revirement d'humeur, me direz-vous, les membres du groupe étant totalement renouvelés, à l'exception notable de Joël Vandroogenbroeck, tête pensante de BRAINTICKET à l'égal d'Edgar Froese de TANGERINE DREAM, et servant de fil conducteur à ses diverses incarnations. Mais compte tenu de la polémique ayant mise à mal la carrière commerciale de Cottonwoodhill, ne pourrait-on pas interpréter la sérénité retrouvée de ce second album comme l'ultime tentative de son leader pour redorer le blason de son entité en lui conférant des atours autrement plus consensuels ?

Peu importe après tout ces questionnements d'historien, Psychonaut se défend assez bien tout seul, trouvant un équilibre, un compromis diront certaines mauvaises langues, entre les diverses humeurs le traversant.
D'un côté, les plages méditatives représentées par l'instrumental "From Another Planet" où s'illustrent l'orgue et le sitar psychédéliques de Joël, soutenus par le rythme des percussions ethniques de Barney Palm. Ce morceau sert d'introduction subtile à "Radagacuca", chanson langoureuse dans le pur style folk-rock-psyché, où brille le chant diaphane de Jane Free et les circonvolutions de la flûte de Joël. Ce titre, qui aurait mérité peut-être un développement plus conséquent pour mieux déployer son climat particulier, compense ce défaut en s'offrant une deuxième partie rageusement rock avec l'intervention brutale autant que concise de Rolf Hug à la guitare électrique, tandis que les cris de Jane Free et l'accélération exponentielle du rythme évoquent les meilleurs moments de Cottonwoodhill.
La rêverie se poursuit avec la jolie chanson "One Morning" axée sur un chant pastoral et un leitmotiv au piano que soutiennent des percussions programmées dans un effet réussi d'écho décalé. Quant à "Feel the Wind Blow", elle offre un autre moment d'humeur folk jusque dans le chant apaisé de Jane Free.

D'un autre côté, se rangent des titres rock dont "Watching You", le meilleur moment de Psychonaut, chanson rock entraînée par un accord trafiqué du piano, le chant rageur de Jane Free et un solo très inspiré, et encore une fois très ramassé, de Rolf Hug à la guitare acide. La dernière partie casse encore le rythme en revenant brutalement à une ambiance raga due au tabla du batteur. Avec "Like a Place In the Sun", BRAINTICKET assume son tribut au AMON DÜÜL II de Carnival of Babylon, pas le meilleur opus du groupe soit dit en passant, parenté renforcée par les déclamations vocales de Carole Muriel, rappelant les prestations de Renate Knaup, et l'orgue de Joël Vandroogenbroeck, ce que confirme aussi la structure basique du titre en couplets / refrain.

Sans être transcendant, Psychonaut présente un bon équilibre entre les ambiances méditatives et les passages plus rock, qualité favorisée par le très juste agencement des titres. "Cock-O-Mary" s'avère ainsi une conclusion idéale, un instrumental à mi-chemin d'AMON DÜÜL II et de JETHRO TULL en raison de la batterie endiablée de Barney Palm et du jeu à la flûte de Joël, similaire à celui de Ian Anderson.

Un bon album de BRAINTICKET, quoiqu'un tantinet anecdotique.

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   AIGLE BLANC

 
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- Joël Vandroogenbroeck (orgue, piano, flûte, sitar)
- Jane Free (chant, tambourin, flûte slide, sons)
- Rolf Hug (guitares électrique et acoustique, tabla, vocaux)
- Martin Sacher (basse électrique, flûte)
- Barney Palm (batterie et percussions)
- Carole Muriel (déclamations vocales)


1. From Another Planet
2. Radagacuca
3. One Morning
4. Watching You
5. Like A Place In The Sun
6. Feel The Wind Blow
7. Cock-o-mary



             



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