Cette fois, on est bon, à force de s'éparpiller, notre bon Angry a perdu tout son groupe et c'est un assemblage hétéroclite qui crée le cinquième album des ROSE TATOO. Voyez cette pochette. Non mais, on se fout de nous ! Où sont passés les gros bras tatoués ? Les gars sourient en plus ! Bref, on veut bien faire confiance en Andy une fois de plus, même si la dernière livraison en date n'était pas mémorable. On constate d'ailleurs que le couple Vanda/Young n'est plus à la production. Aïe ! A quoi devons-nous nous attendre ? Je crains que nous en soyons pour nos frais, mais lançons plutôt le saphir sur le microsillon – oui j'ai bêtement acheté cet album les yeux fermés en 86 ! Pas vous ? - et voyons de quoi il retourne.

Le début... des sons de dauphin embrayent sur "Calling", la vidéo se déroule sur un joli bateau à voiles. Les bases d'une nouvelle approche musicale sont ici posées : exit le boogie blues crasseux, et bienvenue les sons en carton des eighties. La vidéo est sympathique, mais le titre n'est pas le meilleur qui soit. Sur "Get It Right", on a l'impression que le complexe ZZ TOP est passé par là et qu'Angry a souhaité dynamiter le son en l'enrobant d'une production quasi cyber. Le seul problème : la compo ne tient guère la route. Angry a vraiment fait le choix d'une zique plus abordable, j'en veux pour preuve son chant très clair sur "Clear And Simple", un hard carré et efficace, mais guère mémorable. "Runaway" n'est ni la reprise de Del SHANNON, ni celle de BON JOVI, c'est un petit hard-rock au riff tranchant certes, mais dont l'obédience nous rapproche vraiment de l'AOR. ROSE TATOO est-il taillé pour ce genre de musique ? La voix d'Angry passe, mais n'est-ce pas mieux avec sang sueur et dope finalement ?

Diantre, mais qu'est-ce donc ? Des synthés sirupeux, une ambiance à la mord-moi l'noeud : "Falling", c'est pas possible ! Pourtant si, c'est bien le petit chauve tatoué qui chante là. Je sais pas quoi dire, c'est tout bonnement invraisemblable ! Consternant, voilà le bon mot. Nous sommes en présence d'un titre taillé indéniablement pour Michael BOLTON ou à la rigueur MEAT LOAF, mais quelle mouche l'a piqué ? Bon, le solo de gratte est chouette et cela passerait mieux chez disons... BON JOVI ? Non je suis méchant, même Jon ne pond pas de bouses pareilles ! Tentez l'écoute, moi j'ai du mal ! On continue avec le piano tout bêta de "Suddenly". Même ambiance pseudo romantique, il y a un côté insupportable à entendre Angry ainsi se ridiculiser. Sur le moment, ce single n'attire guère l'attention, puis passe sur un show tv avec la jeunette Kylie MINOGUE et cela lui donne une seconde vie au point qu'il monte au sommet des charts australiens. Quelle cata !

On a un peu mieux ? Ouais, un hommage à miss Mandela. Sobrement appelé "Winnie Mandela", et cette fois, on croirait nos amis de MOLLY HATCHETT dans leur époque la plus AOR. La musique est mignonette, ok, même si le refrain tape un brin dans les pâquerettes. Mais cette basse qui fait doum ba doum tout du long, c'est tout de même bien agréable, de même que la voix d'Andy, fort bien placée. J'ajoute que le personnage de Winnie est à mon sens très discutable, à chacun sa vérité. "Say Goodbye" au rythme très chouette est un brin plus énervé. On aurait bien vu ce titre dans un album des SURVIVOR ou... allez... de REO SPEEDWAGON. C'est juste étrange de l'entendre depuis down under. Le gros son de gratte de "Frightened Kid" ne fait pas oublier les premiers élans du groupe. Enfin, "Michael Oreilly" propose une vibe plus rebelle, vu le sujet, avec un résultat acceptable pour un bon gros hard-rock des familles.

On imagine toutefois mal les fans des TATS se prendre soudainement de passion pour ce big rock aux antipodes de leurs habitudes. M'est avis que Wells et Cocks ont dû halluciner grave en entendant ces compos. Le gros son "eighties" ne fait pas tout, même si Tim Gaze balance des solos forts propres. En fait, il reste la couleur rose mais comme sur la pochette, les tatouages ont disparu et, avec eux, l'attitude qui fait de ROSE TATTOO un des groupes les plus emblématiques qui soient. Le gang n'en est plus un, ne fait plus peur à quiconque, comme si Angry recherchait une forme de respectabilité après avoir été adoubé par le monde du cinéma. Finalement, seul compte le jugement de l'histoire et de ce point de vue, il est clair : cette période est vue comme la pire du groupe. D'ailleurs, le disque est ressorti peu après comme un album solo d'Angry Anderson. Il faudra attendre 16 ans pour retrouver le groupe au complet avec un album sous le bras ! Un 2 généreux.