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- Style : Marianne Faithfull , Bob Dylan

Lucinda WILLIAMS - Bob's Back Pages: A Night Of Bob Dylan Songs (2021)
Par LE KINGBEE le 19 Novembre 2021          Consultée 1806 fois

Si, en Europe, The BEATLES demeure le groupe le plus repris, de l’autre côté de l’Atlantique, Bob DYLAN figure dans le peloton de tête des inspirateurs. Certes, aucune chanson du barde n’a été autant reprise que le "White Christmas" d’Irving Berlin mondialisée par Bing Crosby, il n’empêche que le père Bob est un sacré catalyseur.

Reprendre DYLAN n’est pas nouveau. Si on ne compte plus les artistes de tout bord ayant un jour repris une chanson du barde, d’autres lui ont consacré des albums entiers. En 1965, Odetta activiste au sein du Civil Right enregistrait Odetta Sings Dylan publié par la RCA. En 68, Joan BAEZ proposait Any Day Now. L’année suivante se montrait encore plus riche : sous la houlette de Lou Adler, The Brothers & Sisters Of L.A., une troupe de Gospel comprenant Edna Wright, Merry CLAYTON et Gloria JONES, reprenait dix titres Gospel de DYLAN. Suite au départ de Graham NASH, les HOLLIES mettaient en boîte Hollies Sings Dylan.
Le domaine du Jazz s’est lui aussi intéressé au phénomène DYLAN. En 1965, Glenn Campbell, chanteur guitariste Country, gravait Dylan Jazz. En 2009, Ben Sidran publiait Dylan Different. Le nouveau millénaire n’échappait pas à la mode dylanesque. Si DYLAN s’est souvent intéressé au Blues, il en est aussi vrai de l’inverse. En 1999, le label House Of Blues publiait Tangled Up In Blues, une compilation de 12 pistes sur laquelle on retrouvait R.L Burnside, The Holmes Brothers ou Taj MAHAL. En 2001, le label Red House Records, spécialisé dans le Folk Underground, éditait Nod To Bob, un album de 15 titres dans lequel figuraient Guy Davis et Ramblin’ Jack Elliot. En 2002, l’anglais Robyn Hitchcock sortait Robyn Sings, un double-album dédié à son idole déclarée. A l’instigation de T. Bone Burnett, New Basement Tapes, un collectif comprenant Rhiannon Giddens et Elvis COSTELLO, reprenait des chansons composées après l’accident de moto dont fut victime DYLAN en 66.
Un an plus tard, la thématique DYLAN faisait encore recette ; la compilation Gotta Serve Somebody interprétée par diverses personnalités du Gospel et de la Soul (Mavis Staples, Shirley Caesar, Aaron NEVILLE ou les Mighty Clouds Of Joy) apparaissait dans les bacs. En 2007, Bryan FERRY proposait Dylanesque, alors que MOUNTAIN enregistrait "Masters Of War" dans lequel Ozzy Osborne venait prêter main forte. Le guitariste brésilien Ze Ramalho enregistrait Tá Tudo Mudando, un album de 12 titres chantés en brésilien ayant reçu l’aval de DYLAN en personne. En 2012, la trame DYLAN rapportait encore gros avec la sortie d’un album caritatif Chimes Of Freedom. Comble de l’ironie, en 2014, Charlie Daniels, pourtant réputé pour des prises de position proches des conservateurs, publiait Off The Grid : Don’t It Dylan, un album de 10 titres.
Afin de fêter son 50ème anniversaire, Old Crow Medecine Show reprenait l’intégralité de Blonde On Blonde. L’excellente Joan OSBORNE mettait elle aussi le troubadour à son répertoire. En 2018, Bettye LaVette enregistrait pour Verve Things Have Changed. L’australienne Emma Swift proposait en 2020 Blonde On The Tracks, un album de 8 chansons du natif du Minnesota, gravées entre 2017 et 2020.

Ces quelques exemples témoignent de l’importance de Robert Allen Zimmerman dans le monde de la musique américaine et, plus généralement, de l’Art. N’oublions pas que le bonhomme a aussi récolté en 2016 le Prix Nobel de Littérature.

Cette liste d’exemples n’est pas exhaustive, d’autres artistes lui ont dédié des albums complets : l’anglaise Barb Jungr ou le producteur Tim Nelson a édité en 2000 Duluth Does Dylan, une compilation de 15 chansons interprétées par des groupes originaires de Duluth, lieu de naissance du chanteur. Jerry Garcia et le GRATEFUL DEAD ont eux aussi rendu hommage à la star, idem pour les BYRDS par deux fois, le guitariste de New Grass Tim O’ Brien, Steve Howe (YES) sur Portraits of Bob Dylan ont eux aussi repris le répertoire de l’artiste.

Alors qu’il a fêté en mai ses 80 balais, Bob DYLAN fait encore recette. Cet été, Chrissie Hynde, chanteuse des PRETENDERS, enregistre Standing In The Doorway, disque constitué de 9 chansons du Sieur DYLAN.

Quelques mois plus tard, Lucinda WILLIAMS reprend la recette à son compte avec des ingrédients totalement différents, hormis la reprise de "Blind Willie McTell" également présente sur le disque de Chrissie. Si, par son parcours, sa vie et son répertoire, la chanteuse des PRETENDERS laissait présager de captivantes relectures, Lucinda WILLIAMS personnifie grandement le pendant féminin du barde nobelisé.

Quand on se penche sur la biographie et l’histoire de la fille de Miller Williams, on peut penser qu’aucune chanteuse ne peut mieux qu'elle reprendre les titres de DYLAN. D’ailleurs, pour l’anecdote, si Lucinda s’est lancée dans l’apprentissage de la guitare dès six ans et si elle a fait ses gammes dans le Folk, certaines chansons de DYLAN lui ont permis de progresser à la guitare, la chanteuse ne cessant de répéter certains titres de son idole à ses débuts.

Suite à la pandémie Covid-19, bien implantée dans notre quotidien depuis de longs mois, placée devant l’impossibilité de jouer en Live, Lucinda a initié une série intitulée Lus Jukebox- In Studio Concert series qui devrait compter six volets. Après avoir rendu hommage à Tom PETTY avec "Runnin’ Down A Dream", la Louisianaise proposait une alléchante excursion entre Memphis et Muscle Shoals avec une plongée dans la Southern Soul. Cette fois-ci, c’est l’icone DYLAN qui devient la trame centrale de ce disque délivré en vinyle, en CD sous la forme d’un élégant digipack et en digital.

Enregistré au Room & Board Studio à Nashville, dans le studio de Ray Kennedy, également coproducteur de la session avec Tom Overby, ce disque enregistré dans les conditions d’un Live étonne d’abord par une sonorité vintage de haute qualité. Ce n’est pas nouveau : au risque de me répéter, rien ne vaut l’analogique. Pour rappel, c’est là que de nombreux musiciens firent des pieds et des mains pour enregistrer (Mary Gauthier, Shania TWAIN, John MELLENCAMP, Lonnie BROOKS ou Steve Earle).

La chanteuse évolue au centre d’un petit comité dans lequel figurent le guitariste Stuart Mathis (ex-Wallflowers, Sara BAREILLES, Chris ISAAK) fidèle complice depuis sept ans, le bassiste anglais installé à Nashville depuis des lustres Steve Mackey (ex-PULP, Marianne FAITHFULL, Dolly PARTON), le batteur Fred Eltringham (ex-Wallflowers, Jake Bugg, Sheryl CROW), le claviériste Tim Lauer (ex-Sheryl CROW, Alice COOPER, CHEAP TRICK) et enfin le guitariste organiste Joshua Grange (ex-Sheryl CROW, Dwight YOAKAM, Lionel RICHIE). Cette line-up n’est pas anodine, tous ces sidemen se sont croisés à de multiples reprises, ils croisent le fer dans la tentaculaire Music City d’où une cohésion instantanée.

Lucinda propose un bel échantillonnage du troubadour du Minnesota. Les 11 titres proviennent de cinq albums édités entre 1965 et 1997. L’excellent Time Out of Mind se taille la plus grosse part du gâteau avec pas moins de trois chansons : "Not Dark Yet", une petite pépite d’Americana complètement désenchantée, crépite de mille feux. Si l’orchestration épurée se démarque de l’original, la voix rauque colle parfaitement au morceau. Cette version terriblement efficace dépasse en intensité le récent essai de la doublette Shelby Lynne/ Alisson Moorer.
"Tryin’ To Get To Heaven" figurait dans une compilation célébrant les 50 ans d’Amnesty International avec une orchestration différente. Cette fois, le chant se fait plus crépusculaire sous l’assemblage de deux guitares bien complémentaires, version bien plus intense que celle de David BOWIE parue à l'époque du single "Mother".
En fermeture, "Make You Feel My Love" constitue une légère démarque, les ivoires de Tim Lauer apportant une teinte plus nuancée. Une version qui fait oublier les petits massacres de Bob Margolin, Garth Brooks ou Trisha Yearwood. Chez nous, Dick RIVERS adapta la chanson avec "L’amour m’attendait là", tout un programme !
WILLIAMS pioche deux chansons dans Bloods on The Tracks, avec "Meet Me In The Morning", une pièce aussi collante que groovy avec, en arrière fond, un orgue churchy. Une version qui enterre définitivement celle de Merl Saunders à la sauce Disco Funk. Rarement repris, "Idiot Wind" vaut essentiellement par la voix bien barrée.
Oh Mercy apporte lui aussi deux chansons : "Everything Is Broken" comblera les fans de Patti SMITH, une version bien plus captivante que celles de Duke Robillard, MOUTAIN ou des multiples duos insipides de Sheryl CROW. On se retrouve comme happé à l’écoute de "Political World", titre dans lequel les guitares tissent un patchwork obsédant.
Issu de Infidels, "Man Of Peace" avait fait l’objet d’une resplendissante cover via les Holmes Brothers. Là, la chanteuse prend un ton hautement déclamatoire. "Blind Willie McTell" aurait dû figurer dans ce disque. DYLAN ne l’ayant jamais trouvé complètement abouti, le titre passa à la trappe pour n’apparaître que bien plus tard dans le premier volume de la série Bootleg. Repris par The BAND et adapté par CABREL, le morceau de Lucinda WILLIAMS nous semble supérieur à celui de Chrissie Hynde au chant trop emphatique.
Terminons par les deux pépites empruntées à Highway 61 Revisited avec "Queen Jane Approximately" renversant de simplicité et "It Takes A Lot To Laugh, It Takes A Train To Cry", titre au groove imparable qui témoigne d’entrée de jeu de la puissance ensorceleuse de la Louisianaise. Une version qui envoie paître au fond des champs celles de Martha VELEZ, Tracy NELSON ou Marianne FAITHFULL pourtant toutes excellentes interprètes. Peut-être la meilleure reprise avec celle de Bun E. CARLOS.

Les détracteurs et les grincheux peuvent s’époumoner et déclarer qu’il s’agit encore d’un album Tribute, d’un projet facile impulsant de surcroit une sonorité parfois monotone ou répétitive, on leur répond que des albums de ce calibre, on en redemande tous les jours. Lucinda WILLIAMS superbement épaulée par un petit orchestre d’orfèvres nous délivre un vrai bijou et atteste encore une fois qu’elle sort vraiment du moule en s’extrayant de la production américaine classique. Le chant rauque parfois strident et bien barré de Lucinda est une parade remarquable au chant nasal du barde. Un excellent mélange entre Americana, Folk Psyché et Rock Bluesy. Après plusieurs essais de Bettye LaVette et Joan Osborne, on peut se demander si la gente féminine n’est pas la plus apte à reprendre l’octogénaire au chapeau.

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- Lucinda Williams (chant)
- Stuart Mathis (guitare)
- Joshua Grange (guitare, claviers)
- Steve Mackey (basse)
- Fred Eltringham (batterie)
- Tim Lauer (claviers)


1. It Takes A Lot To Laugh, It Takes A Train To Cry
2. Everything Is Broken
3. Political World
4. Man Of Peace
5. Not Dark Yet
6. Meet Me In The Morning
7. Blind Willie Mctell
8. Tryin' To Get To Heaven
9. Queen Jane Approximately
10. Idiot Wind
11. Make You Feel My Love



             



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