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- Style : Marianne Faithfull , Bob Dylan

Lucinda WILLIAMS - Funny How Time Slips Away (2021)
Par LE KINGBEE le 10 Avril 2022          Consultée 1380 fois

Après avoir été victime d’un accident vasculaire cérébral fin 2020, Lucinda WILLIAMS n’est pas restée les bras croisés pendant la pandémie liée au Covid 19. Elle a profité de cette longue période d’abstinence musicale pour enregistrer "Lus Jukebox", une série composée de six volumes enregistrés dans les conditions d’un Live au Room & Board Studio, à Nashville.

Voici le quatrième volet de la série. Après avoir repris Tom PETTY, rendu hommage à la Southern Soul de Memphis et à Bob DYLAN, Lucinda revient en quelque sortes à ses racines en nous offrant 12 covers issues de divers mouvements liés à la Country.

S’il est complexe d’étiqueter cette formidable conteuse d’histoires œuvrant entre Blues, Southern Rock et Country, il semble que l’étagère de l’Americana lui convienne comme un gant. En guise de mise en bouche, Williams reprend "Apartment #9", plus gros succès de Bobby Austin coécrit avec Johnny Paycheck. Tammy WYNETTE reprendra la chanson, celle-ci demeure typique des productions sixties de Music City avec la présence d’une pedal steel geignarde. Si Melissa Etheridge en fit une interprétation plus Pop que Country, on lui préfèrera la présente version avec son chant éraillé et un accompagnement brut de décoffrage. Grand succès de Buck Owens, précurseur du Bakersfield Sound, "Together Again" est une douce balade cuisinée à toutes les sauces. Si Emmylou HARRIS lui donna une seconde vie au milieu des seventies, Ray CHARLES, Dean MARTIN et les FLYING BURITO BROTHERS s’attaquèrent eux aussi au morceau. A contrario de certaines interprétations nashvilliennes ou de duos sentant la guimauve à plein nez, Lucinda délivre ici une version désenchantée sortant assurément des sentiers battus. Autre petit moment de douceur avec "Make The World Go Away" d’Hank Cochran (aucun lien de parenté avec Eddie avec lequel il joua). Si Ray Price fit grimper le titre sur la seconde marche des charts Country, le morceau fit la joie de nombreux chanteurs issus de divers univers. Si la version de Timi Yuro se détache du lot, l’interprétation de Lucinda, pleine de tristesse vaut le détour. Second emprunt à Hank Cochran avec "I Want To Go With You", une chanson sentimentale qui délivrait une coloration "nunuche". Interprétée par une femme, les paroles prennent indiciblement une autre orientation, d’autant que le timbre de Williams confère au morceau une ambiance cafardeuse.

Coécrit par l’excellent mandoliniste Paul Buskirk et Willie Nelson "Night Life" a été mitonné à toutes les sauces, souvent sans saveur. Si Marvin GAYE, Doris Day, BB KING ou Aretha FRANKLIN en proposèrent des interprétations bien différentes, nous retiendrons en priorité celle de Cyndi LAUPER et de Raul Malo, chanteur des MAVERICKS. Mais Lucinda parvient à retenir l’attention avec une sorte de désillusion dans les intonations. A souligner la qualité de l’accompagnement. De la tristesse, on en retrouve un bon paquet dans "Long Black Limousine", une compo de Vern Stovall et Bobby George. Si le titre reste connu pour avoir été repris par PRESLEY, Lucinda avec son timbre apporte un petit plus pour une chanson qui lui va comme un gant. Grand succès de John Hartford, "Gentle On My Mind" pourrait presque faire figure d’intru tant le morceau et son créateur sont reliés au Folk. Pourtant tout ce qui porte un stetson, un colt ou des bottes de cowgirl semble l'avoir repris, un carton que reprendront SINATRA, Aretha FRAKLIN ou REM. Chez nous, l’un des rois de l’adaptation Claude François dénaturera complètement la chanson avec "Si douce à mon souvenir". Inutile de dire que la Nation n’en sortie pas grandie ! Lucky BLONDO (auteur du slogan publicitaire pour Castorama) fera à peine mieux avec "Va savoir pourquoi". Ne tirons pas sur l’ambulance plus que nécessaire, le beau Claude ne chante plus et Lucky semble être en retraite en Bretagne. On conseillera d’écouter la version originale de John Hartford, bien plus succulente selon nous que celle de Glenn Campbell qui popularisa la chanson, ou bien tout simplement celle de Lucinda qui nous surprend encore une fois.
Bien avant de se faire connaitre avec son bandana et son allure sympathique de vieil hippie, Willie NELSON fut un auteur compositeur reconnu, sauf qu’en général ce sont d’autres musiciens qui recueillaient les lauriers de ses créations. "Funny How Time Slips Away" enregistré pour la première fois par Bill Walker connaitra au fil du temps de nombreuses reprises. Quelques soient vos gouts, chacun devrait trouver chaussure à son pied tant la chanson a été passée à la moulinette par l’entremise de multiples tendances. Si les amateurs de Soul risquent d’opter pour les versions de Joe Tex et Joe Simon ou celle d’Al GREEN avec Lyle Lovett, c’est encore la tonalité gorgée de spleen qui frappe les esprits ici, agrémentée d’une grosse ligne de basse.

Lucinda n’occulte pas les countrywomen. Elle reprend "Fist City" de Loretta Lynn, si l’original flirtait avec le Hillbilly Rock, Lucinda se montre tout aussi véhémente, sa gouaille fait ici merveille, le thème de la jalousie et de la chasse-gardée sont abordée avec une bonne dose d’humour. Les anglophones pourront se délecter et devraient être surpris par certains passages : "But the man I love -When he picks up trash - He puts it in a garbage can -And that's what you look like to me … ". Stuart Mathis booste le tempo juste ce qu’il faut. Certains devront admettre qu’on s’écarte là bien loin des mièvreries et des fadeurs des nouvelles jeunes chanteuses Pop. Probablement la meilleure interprétation avec celle d’Eilen Jewell.
De l’amour contrarié, il en est encore question avec "Don’t Let Me Cross Over", une compo de Penny Jay (aka Little Miss Helen) qui monta sur la seconde marche des charts Country en 63 via le duo Carl & Pearl Butler. Là encore si la pedal steel nous réexpédie au cœur des sixties en plein décor péquenaud, c’est encore le chant qui fait toute la différence. Skeeter Davis, Dolly PARTON ou Melba Montgomery font figure de petites filles à coté de Lucinda. Autre titre davantage lié à la Pop qu’à la Country, "The End Of The World" popularisé par Skeeter Davis a été repris par moult mouvances. Encore une fois les intonations et le timbre rauque de Lucinda permettent d’éviter de tomber dans une soupe pour midinette, alors que la rythmique tisse un groove mélancolique. Peut être l’une des meilleures versions avec celles de Cyndi LAUPER, Rickie Lee JONES ou Rosie Flores. C’est autre chose que l’adaptation bien ratée de Frank Alamo avec "Fais pour durer".
Si la chanteuse n’a jamais renié certaines influences Country, elle est comme un poisson dans l’eau dans le domaine du Rock, en atteste la reprise de "I’m Movin’On" grand succès d’Hank SNOW. Au fil des années, le titre sera mitonné avec des ingrédients souvent discutables. Les baguettes de Fred Eltringham impriment un rythme dantesque tandis que Stuart Mathis nous incorpore quelques glissandos de bonne facture. Enfin Lucinda nous offre ici toute sa verve : "That big eight wheeler a rollin' down the track - Means your true lovin' daddy ain't comin' back - Cause I'm movin' on, I'll soon be gone". Un véritable Hillbilly Rock d’excellente facture.
Lucinda Williams triche un peu en nous glissant une compo en guise de fermeture d’album. "Take Time For The Tears" associe Honky Tonk et balade sentimentale cafardeuse dans laquelle la pedal steel de Joshua Grange serait capable de faire pleurer le premier sociopathe venu.

Arrive le moment de faire les comptes. Certains râleurs pourront encore sourire et rétorquer qu’il s’agit là d’un album de reprises issues de la Country sixties, domaine qui échappe à notre entendement de gaulois, il n’empêche que par le truchement d’une voix souvent étonnante et d’un accompagnement aux petits oignons sans la moindre esbroufe, Lucinda Williams nous livre de somptueuses relectures parvenant le plus souvent à gommer tous les effets artificiels et les textes godiches de certaines chansons. Reste à savoir où ranger cet album au titre aussi prémonitoire qu’inquiétant ? Pour une meilleure cohérence il sera classé dans la rubrique Country. Souhaitons que Lucinda puisse un jour rejouer de la guitare.

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- Lucinda Williams (chant)
- Stuart Mathis (guitare)
- Joshua Grange (pedal steel, banjo)
- Steve Mackey (basse)
- Fred Eltringham (batterie)


1. Apartment #9
2. Together Again
3. Make The World Go Away
4. Night Life
5. Long Black Limousine
6. Fist City
7. I Want To Go With You
8. Don't Let Me Cross Over
9. Gentle On My Mind
10. The End Of The World
11. I'm Movin' On
12. Funny How Time Slips Away
13. Take Time For The Tears



             



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