Dans le caillou, deuxième album de KARPATT, présente des rythmes plus alertes et entraînants que ceux du premier disque. Cela est particulièrement sensible sur des titres de la trempe de "Quand j’baisse les bras" ou de "Soulève ta jupe". On sent que la sensibilité musicale du groupe a également évolué, celui-ci s’aventurant à incorporer des ambiances Jazz manouche aux sonorités sud-américaine qui constituaient jusqu’alors le gros de leurs influences et de leur identité musicale. C’est notamment le cas avec "Quand j’baisse les bras", ou bien avec "La mouche" qui, à la faveur de son ambiance Jazz manouche et la grâce de ses parties de guitares, est devenu un classique qui produit toujours son effet en concert.
Le groupe s’est fait accompagner par MANO SOLO, qui pousse la chansonnette sur "Jeux olympiques" et "Léon", ainsi que par le pianiste Richard LORNAC (Joe DASSIN, Sacha DISTEL, CARLOS, RENAUD, Charles DUMONT, Michèle TORR) qui illumine "Jeux olympiques" de son touché alerte. Les deux artistes étaient des habitués du studio Le Pressoir situé à Bourré (Montrichard) dans lequel l’album a été enregistré.
Malgré la présence de ces deux excellents musiciens et l’évolution artistique amorcée, le résultat est un peu décevant. On ne retrouve en effet pas la fougue que démontre le groupe sur scène. Certains titres manquent de ce côté direct et incisif dans lequel KARPATT excelle habituellement. C’est ainsi le cas avec "Le magicien", "Le déménagement", ou bien "Tapis roulant", autant de titres qui, s’ils possèdent de belles parties, manquent de relief et de personnalité.
Un sentiment de manque de finition plane également sur certains morceaux, comme si le groupe n’avait pas suffisamment laissé murir ceux-ci sur scène. A l’image de "Vas-y la mère" doté d’une seconde partie bien séduisante mais qui pâtit d’une entame bien trop poussive.
Au-delà de ce sentiment d’inachevé, et comme cela était déjà le cas avec leur premier album, le défaut principal de Dans le caillou est à trouver du côté de son aspect très massif, trop touffu. Délesté de ses morceaux les plus courts et les plus anecdotiques ("Les verres à pied", "La machine à laver" et le titre à tiroirs "Achille"), nul doute que le disque aurait grandement gagné en efficacité.
On peut également remarquer que la diction est moins précise (ou bien moins restituée) que dans les autres albums du groupe et que cela nuit un peu à la bonne compréhension des textes ("Les petits cailloux", "Les jeux olympiques"). Il est dès lors bien souvent nécessaire d’être attentif et concentré pour saisir la qualité des paroles, ce qui est bien dommage.
Avec Dans le caillou, KARPATT ne confirme pas totalement les espoirs que son premier album avait fait naitre. Et si le groupe commence alors à devenir redoutable sur scène, il peine maladroitement ici à retranscrire son enthousiasme et sa passion sur disque.
Et rien ne laisse alors présager la fantastique mutation qui transcendera le groupe quelques années plus tard.