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The STAPLE SINGERS - This Land (1963)
Par LE KINGBEE le 22 Février 2023          Consultée 523 fois

Nous sommes en 1963, The STAPLE SINGERS enregistrent leur troisième album pour l’écurie Riverside, label indépendant qui rivalise pleinement avec Prestige et Blue Note dans le domaine du Jazz. Orrin Keepnews, fondateur du label en compagnie de Bill Grauer, s’attache personnellement à la production. Pour se tenir derrière les consoles, Keepnews fait appel à Bob Averill déjà présent sur les deux opus précédents. Ingé-son débutant, Bob Kidder vient faire ses gammes. On le retrouvera plus tard chez Chess et auprès de Ramsey Lewis et des SHADOWS OF KNIGHT.
Dans l’esprit de Keepnews, grand spécialiste de Jazz, il s’agit d’élargir le spectre du Folk Gospel de Roebuck Staple jugé trop rural vers des louanges moins rudes. Le producteur est bien conscient que le Folk Revival est en plein boum. Si la fratrie Staple est bien présente et compte même dans ses rangs Yvonne, c’est une nouvelle équipe rythmique qui vient leur prêter main forte. C’est ainsi qu’on retrouve trois pointures avec le batteur Al Duncan (Jimmy REED, Billy "The Kid" Emerson) tandis que Johnny Pate (ex-Earl Bostic, Duke Ellington, James Moody) et le contrebassiste Phil Upchurch (ex-Jimmy REED, Oscar Brown) se succèdent au gré des plages.

Si la pochette de Ken Deardoff, graphiste designer attitré du label, ne renseigne guère sur le contenu, le dorsal révèle deux prises de vue faites par deux photographes qui connaîtront une riche carrière dans le domaine du Jazz et du Rock : Ted Williams et Jim Marshall.

Cette pochette prend tout son sens dès le titre d’ouverture : "This Land", une variante du standard Folk de Woody GUTHRIE "This Land Is Your Land". A l’origine, GUTHRIE avait composé la chanson en réplique à "God Bless America", un titre hautement patriotique d’Irving Berlin chanté jusqu’à plus soif durant la Seconde Guerre par Kate Smith. Quelques années plus tard, les MOTHERS OF INVENTIONS règleront le cas du Sieur Irving avec une reprise déjantée figurant sur "Uncle Meat". On note que certains artistes bien sous tout rapport, ou du moins propres sur eux, n’hésiteront pas à reprendre cette purge bien plus tard (Connie Francis, Pat BOONE, LeAnn Rimes jusqu’à la brave Celine DION). Si la mélodie s’inspire fortement de "When the World's On Fire", compo des années trente de la Carter Family, "This Land" et ses variantes connaissent un riche succès durant les sixties par le biais de nombreux groupes Folk (The KINGSTON TRIO, PETER PAUL & MARY, Trini LOPEZ). Chez nous, une certaine Dalida chante l’adaptation "Ce coin de terre", une version affligeante qui donnerait presque envie d’être sourd.
Œuvre probable des Fisk Jubilee Singers, "Old Time Religion" se voit victime d’une petite dérivation, Charles Davis Tillman s’octroyant les droits d’auteur de la chanson, une habitude chez cet escroc qui pompait, tel un shadock, d’anciens chants de travail et spirituals à destination d’un public aussi blanc que puritain du Grand Sud. Toujours est-il que le titre longtemps timide monte crescendo, favorisant ainsi les louanges du Seigneur.

La frontière entre Folk, Folklore et Spiritual est parfois plus mince qu’il n’y paraît et surtout bon prétexte à engendrer de nouvelles chansons sans trop se casser la tête. C’est ainsi que la troupe familiale reprend "Blowin’ In The Wind", grand classique de DYLAN, prenant sa source d’un vieux spiritual "No More Auction Block". Inspirée par un passage d’un chapitre de l’Apocalypse, "Twelve Gates To The City" est une proche variante de "Oh What A Beautiful City", un hymne baptiste du Révérend James M. Gates. Repris préalablement par le Révérend Gary Davis, le duo Sonny Terry/Brownie McGhee, Joan BAEZ et Pete Seeger, ce titre témoigne de l’accointement entre chanteurs évangélistes, folkmen et bluesmen.

Déjà présente sur de précédents disques, "Swing Down, Chariot !", variante du "Swing Low Sweet Chariot" de Wallis Willis, vaut surtout par la qualité de ses harmonies vocales. On vous l’a sûrement répété quand vous étiez gosse, ce n’est pas beau de mentir ! "Let That Liar Alone" nous met en garde contre le mensonge, œuvre de Satan, et aussi contre les menteurs et pécheurs de tout poil. Ne finissez pas comme Pinocchio !
"Cottonfields" vise le dur quotidien des cueilleurs de coton. Curieusement, cette variante d’un titre du bluesman louisianais Lead Belly, tombe dans l’escarcelle de la Country Music, la version la plus célèbre restant celle de CREEDENCE CLEARWATER. Œuvre de Blind Willie Johnson, un prédicateur itinérant et non voyant, "Motherless Children" évoque la malchance des orphelins mais, heureusement, le Seigneur veille ! Le disque s’achève sur "A Better Home", une demande plaintive réclamant un meilleur foyer, condition rendue possible si notre foi envers Dieu est assez grande.

Roebuck Staple nous délivre d’excellentes compositions de son cru. "Wish I Had Answered" vous apprend sous un tempo minimaliste qu’il vaut mieux ne pas attendre inutilement pour faire appel à Dieu, le seul Sauveur. Mavis Staple reprend le titre cinquante ans plus tard. "Gamblin' Man" * avec sa rythmique squelettique s’écoute comme un psaume, le refrain étant répété par le chœur jusqu’à ce qu’il ne sorte plus de notre tête. Pas de bon disque de Gospel sans que le Déluge et Noé nous tombent sur le paletot, c’est chose faite avec "Didn’t It Rain", compo d’Henry Thacker Burleigh, un titre plaintif enregistré par le Biddleville Quintette, un ensemble de Caroline du Nord. Ce standard entraînant repris entre autres par Sister Rosetta THARPE, Johnny CASH et The BAND vous donne inexorablement envie d’aller vous taper un verre de vin de messe.

Le caractère minimaliste de l’accompagnement et une certaine similarité de la moitié des pistes constituent aujourd’hui un frein trop puissant. On aurait aimé que la rythmique diversifie les orchestrations. L’entame s’annonçait pourtant excellente avec cette intrusion dans le monde du Folk et de la Protest Song, mais les accords de guitare souvent très voisins empêchent la troupe de prendre le bon sillage. On peut aussi regretter que la voix de Mavis Staple ne prenne pas plus souvent les rênes de la diligence.
Mais la patience a du bon et le meilleur est à venir !

Note réelle 2,5.


*Titre homonyme à celui de Marvin Rainwater.

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- Roebuck 'pops' Staple (chant, guitare)
- Mavis Staple (chant)
- Cleotha Staple (chant, chœurs)
- Yvonne Staple (chant, chœurs)
- Pervis Staple (chant, chœurs)
- Johnny Pate (basse)
- Phil Upchurch (contrebasse)
- Al Duncan (batterie)


1. This Land
2. Old Time Religion
3. Blowin' In The Wind
4. Wish I Had Answered
5. Twelve Gates To The City
6. Gamblin' Man
7. Didn't It Rain
8. Swing Down, Chariot!
9. Let That Liar Alone
10. Cottonfields
11. Motherless Children
12. A Better Home



             



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