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The STAPLE SINGERS - City In The Sky (1974)
Par LE KINGBEE le 18 Mars 2023          Consultée 428 fois

Nous sommes en 1974, les Etats-Unis sont frappés en avril par une série de tornades occasionnant plus de 350 morts, le Président Nixon s’offre une petite escapade à Moscou mais est contraint de démissionner en août suite au scandale du Watergate, remplacé par Gerald Ford. En fin d’année, le meurtre d’une famille dans une maison d’Amityville tout près de Long Island fait la une de la presse.

Musicalement, George McCRAE impose le son de Miami avec "Rock Your Baby" ; les hit-parades américains glorifient Terry Jacks avec "Seasons In The Sun", les WINGS avec Band On The Run ; BACHMAN TURNER OVERDRIVE triomphe avec "You Ain’t Seen Nothing Yet" tandis que CLAPTON marche sur les traces de Bob MARLEY avec "I Shot The Sheriff" alors que Carl Douglas gesticule sans aucune honte sur "Kung Fu Fighting". Au même moment, une ancienne petite amie d’Al GREEN se colle une balle dans la tête après avoir brûlé le chanteur. Ce dernier y voyant un signe du destin rentrera dans les ordres, achetant une église à Memphis. Mais l’évènement majeur demeure la faillite involontaire du label STAX, liquidation officielle début 75. Le catalogue Stax sera racheté par Fantasy avant d’être cédé au groupe Concord. En musique comme dans la mer, les gros poissons dévorent souvent les plus petits.

La faillite du label de Jim Stewart (décédé en décembre 2022) entraîne la fin du parcours des STAPLE SINGERS chez Stax Records. La troupe familiale vient pourtant d’enfiler les succès avec "I’ll Take You There", "This World" et "Respect Yourself", bientôt suivis par l’album Be What You Are[fi) dont deux titres se classent à la fois dans le Top 10 de la Pop et dans la Soul.
Mais la réalité est tout autre, si les deux recueils précédents ont été enregistrés à Sheffield dans les studios Muscle Shoals Sounds, City In The Sky provient d’une session gravée en octobre 1972 au Muscle Shoals Sound Studios et d’une séance d’octobre 1973 captée à l’Ardent Recording Studios à Memphis. Dans l’esprit du producteur Al Bell, il s’agissait de sortir un double-album, projet abandonné.

Dès "Back Road Into Town", titre d’ouverture, on se rend compte que la frontière entre la musique séculière et le Gospel a été franchie mais a été rarement aussi mince. Le section cuivre et les trois guitares impulsent un décor plus proche de la Soul que du Gospel rural dont s’inspirait "Pops" Staple à ses débuts. Composé par Obie McClinton, le titre avait préalablement fait l’objet d’une première version par le biais de Willie Hightower, mais l’orchestration et la présence de Mavis STAPLE lui permettent de gagner en scintillance. L’impression se confirme avec "City In The Sky", compo du trident Charlie Chalmers/ Sandra et Donna Rhodes qui sort pour l’occasion de son job de choriste. Les arrangements et l’orchestration servent ici de pont entre le label Hi et la Stax, les deux grands labels de Memphis. Une interprétation bien moins sophistiquée que la reprise d’Otis Clay. A noter que ce titre rarement repris a fait l’objet d’une cover plus récente de la new-yorkaise Bette SMITH.
Changement de cap avec deux compos d’un autre trident célèbre Homer Bank/George Jackson/Carl Hampton. "Washington We’re Watching You" avec son intro pleine d’ardeur nous renvoie à un décor funky propre à certains films issus de la Blaxploitation et plus particulièrement à Shaft, le message politique envers la classe dirigeante se révèle de plus en plus sévère et critique. Si une basse bien ronde apporte du groove, la gratte de Roebuck Staple pleine de reverb vient distiller un surcroit de tension sur "Blood Pressure" *, autre critique du climat social et racial. Excellente auteure, Bettye Crutcher leur fait une belle offrande avec "There Is A God", une pièce hautement dynamique. Pas étonnant avec une telle ferveur que Jésus ait changé l’eau en vin.

Mack Rice, resté célèbre pour le hit "Mustang Sally", a déjà fait de la route avec la famille Staple qui lui doit "Respect Yourself". L’ancien membre des Falcons leur apporte six chansons dont deux co-écrites avec Bettye Crutcher. "Something Ain’t Right" ** pourrait sortir du "Cloud Nine" des TEMPTATIONS. A contrario, s’apparentant à une oraison, "Today Was Tomorrow Yesterday" avec ses percussions exotiques, une profusion de corde, le vibraphone et la voix de Mavis en tête de gondole évoque un univers entre Roberta FLACK et Esther Phillips. Le titre avait fait l’objet d’une première version sans succès d’Eric Mercury. On retrouve encore quelques fragrances latines sur "My Main Man", titre à la mélodie accrocheuse dans lequel Mavis se montre encore une fois en patronne. "If It Ain’t One Thing It’s Another" avec la contribution d’une flûte se révèle plus proche d’une pop patinée de Soul à l’image de The Fifth Dimension et des productions de Norman Whitfield. Avec ses passages de chanson parlée, procédé fréquent dans les louanges religieuses, "Who Made The Man" se déguste comme un message, un rappel de la Genèse dans lequel on croit entendre une cithare. En guise de clôture, The Staple Singers nous adressent un rappel à l’humilité avec "Getting Too Big For Your Britches", titre antérieurement enregistré dans une sonorité Country Soul par Roy Head, une version bien plus moelleuse que sa devancière, même si on regrette les guitares de Tony Joe WHITE et de Steve Cropper.

Enregistré presque dix ans avant que les Staple Singers n’atterrissent chez Curtom, label de Curtis Mayfield, cette ville dans le ciel procure une envie irréversible de se diriger vers un dancefloor. La tentation d’aller se mettre une hostie sous le palais semble désormais moins grande, notre oreille préférant la futilité au spirituel. Un album plus dans l’air de son temps mais le message semble parfois comme dissous ou lessivé par le rythme et une orchestration trop lourde.


*Titre homonyme à celui de Mutemath.
**Titre homonyme à ceux de David Byrne et Nathaniel Rateliff.

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- Roebuck 'pops' Staples (chant, guitare)
- Cleotha Staples (chant, chœurs)
- Mavis Staples (chant, chœurs)
- Yvonne Staples (chant, chœurs)
- Jimmy Johnson (guitare)
- Eddie Hinton (guitare)
- Raymond Jackson (guitare 4-6-9-11)
- David Hood (basse)
- Roger Hawkins (batterie)
- Barry Beckett (claviers)
- Clayton Ivey (orgue)
- Andrew Love (saxophone)
- Lewis Collins (saxophone, flûte)
- Wayne Jackson (trompette)
- Jack Hale (trombone)


1. Back Road Into Town
2. City In The Sky
3. Washington We're Watching You
4. Something Ain't Right
5. Today Was Tomorrow Yesterday
6. My Main Man
7. There Is A God
8. Blood Pressure
9. If It Ain't One Thing It's Another
10. Who Made The Man
11. Getting Too Big For Your Britches



             



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