Une guitare de gaucher entourée de masques tribaux… Voilà qui a du surprendre la jeunesse de 1993 à une époque ou les mouvements alternatifs sont au pouvoir dans l’histoire de la musique populaire, ce même si Kurt Cobain est un des rares gauchers de la six cordes. Rares sont ceux qui ont du reconnaître le nom de l’artiste car cela faisait 28 longues années que Dick DALE n’avaient pas investi les bacs a disquaire avec ses instrumentaux rageurs. Alors bien sur, le pari est de taille et risque de flopper avec retentissement car la musique à bien changé depuis les sixties. Mais Richard Mansour n’en à cure et se lance tel un jeune premier à l’assaut des charts alors qu’il a désormais 55 ans !

Dick a choisit de reprendre quelques uns de ses principaux faits d’armes : "Nitro" ouvre le bal et les sourires naissent aussitôt car la modernité sied drôlement bien aux compositions et arrangements de notre guitar hero. On passe le standard "The New Victor" à la moulinette du temps et le résultat est flamboyant. Ce titre majeur de Dick reste un classique quelque soit l’époque, c’est l’éclate ! "The Eliminator" est donc la resucée de "Mr Eliminator", bien entendu impossible d’aligner la version classique sur celle ci bien plus moderne et abouti, le travail de la production y est essentiel, la guitare sonne mieux la batterie est omniprésente. Les atours qui accompagnent "Misirlou" sont cette fois proches du traditionnel original, elle est toujours aussi attachante, mais nous sommes très loin du titre qui fit la renommée de Dick DALE.

Quelques reprises ? Le "Caterpillar Crawl" des STRANGERS – 1959 - est un titre assez pèpère à la base, avec cependant un esprit bien rétro mais un son agressif mais Dick le transforme à sa sauce de manière radicale, on ne l’imagine pas faire autrement ! Quand au « Rumble » de son collègue Link WRAY, il a été bâti pour la strat du californien qui en rajoute des tonnes ! Le plus étonnant est que Dick devra son retour en grace suite a l’utilisation de son "Misirlou" l’année suivant dans le Pulp Fiction de Quentin Tarantino et qu’on y trouvera aussi le "Rumble" de Link ! Le temps a bien passé depuis que Duke ELLINGTON a crée son fameux "Caravan" et nombreux sont les groupes instrumentaux a avoir tenté leur propre version, Dick ne démérite pas une seule seconde.

Et puis du matos original, voila qui va nous donner une idée de la grinta du bonhomme. Allez savoir ! Peut-être que notre guitar hero libanais s’est découvert des ancêtres amérindiens quelque part ? Peut-être s’est-il juste entiché de leur culture ? Toujours est-il que nous voici avec un "Speardance" qui sonne fort juste, on imagine très bien une danse de la lance sur ce bel instrumental. Les glissandos et les bend sont toujours aussi puissants chez Dick, et il rajoute même quelques petites portions en solo, ce qui n’était pas si fréquent. L’agressivité avant tout. "Tribal Thunder" trimballe certes une identité plus ricaines qu’orientale, Dick a donc évolué depuis toutes ces années, il transpose désormais la culture amérindienne comme il le faisait de la libanaise par le biais de sa guitare sur de la musique bien agressive. Nous avons aussi la surprise de l’entendre chanter tel un shaman qui a abusé de l’eau de feu !

Et toujours cet esprit "grands espaces" qui traînent ça et là, comme sur "Trail Of Tears", logique vu le titre, avec des borborigmes dignes de la danse du feu ! C’est sur des percussions bombastiques et donc tribales que "The Long Ride" se développe, personne ne joue comme Dick, mais tout le monde ne joue pas sur une guitare de gaucher en droitier non plus, ceci explique probablement cela ! Puis on s’installe en terre ibérique avec "Esperanza", qui donne le loisir à Dick de décliner son talent sous d’autres cieux, rassurez-vous l’avalanche de décibels est bien là et la guitare sonne avec toujours la même stridence. Enfin, "Shredded Heat" n’est pas le plus original des instrumentaux du style si original du Terminator de la guitare, mais ça s’écoute sans déplaisir.

Nous voici au départ d’une seconde carrière qui s’amorce. Dick n’a pas souhaité prendre trop de risques et a réintégré la plupart de ses standards les plus connus, c’est simple il ne manque que "Hava Naguila" pour tous les avoir. Les nouvelles versions sont superbes, les autres reprises agréables et les morceaux originaux assurent un minimum. Le manque de prise de risque m’oblige cependant à une certaine sévérité et je baisse à 3 cet album qui vaut un 3.5. Il n’empêche, voir Dick DALE de retour après toutes ces années ne manque pas de piment !