Voyez donc notre Dick DALE, alias Mr Terminator alias le roi de la guitare surf, toujours en train de faire cramer ses Stratocasters, et nous le surprenons ici avec une strat de gaucher – dont il a inversé les cordes » -, il fallait se « simplifier » la vie pour ses désormais 64 printemps ! Le temps passe aussi pour les surhommes, même si notre homme n’est guère au courant et continue de faire le jeune premier alors qu’il a l’âge de sucrer les fraises ! Ceci est donc son neuvième opus à la gloire de la musique populaire, son dernier ! Alors un instant de recueillement pour ce grand monsieur de la guitare !

Et dans le trip descentes de manche supersoniques et agression tous azimuts nous avons l’introductive "HMFIC", qui se pose là pour rappeler a tous les aficionados que Dick est le king de la surf guitare. Le bridge est d’une clarté et d’une modernité notable. On va apprécier cette forme d’exercice de style qu’est "3013DD", dans lequel Dick refourgue tous ses plans les plus connus avec une candeur et une insouciance digne d’un gamin de 17 ans, les digressions sont très élégantes et louchent vers le métal dans l’idée.

Nous sommes habitués aux diverses réinterprétations de notre guitariste sur ses grands classiques. Cette fois-ci, il s’agit de "The Eliminator", déjà présent sur son 3eme opus . Cette version ne manque pas de piment et les diverses adjonctions lui donnent une nouvelle identité pas piquée des hannetons. Le son de la Strat reste cependant exactement le même, et la voix féminine sonne presque alternative, logique vue l’époque . On ne pourra jamais reprocher à Dick son manque de pureté ! Le Gene VINCENT de la guitare rock’n’roll !

Nous voici confrontés a du blues comme Dick le dit clairement en introduction, il s’agit de "Front Porch Blues", on y reconnaît pas totalement son style si agressif et pour une fois, la tonalité semble privilégiée à la rapidité d’exécution, et il assure comme un beau diable. Ce titre fera mémoire d’ailleurs, le seul du style dans la discographie du bonhomme. On reste bluesy à mort sur "Baby Left Me", et Dick reste sur les acquis précédemment décrit. C’est carrément cool, et on en vient à se demander pourquoi il n’a jamais montré ce savoir-faire avant cet album... son dernier ! Damned !

Notre Libanais d’origine n’a jamais perdu le contact avec ses racines, alors pour cette fois, il nous propose "Haji", et nous voila repartis au Proche Orient, là ou se trouvent parmi les plus jolies femmes du monde ! On imagine aisément une petite danse du ventre lascive sur ce titre bien pêchu, d’autant que si la seconde version est acoustique on reste à la gratte, pas de oud, mais le résultat reste très typé !

Et du surprenant ! Y a-t-il guitariste plus éloigné de Dick DALE que Richie BLACKMORE ? Je ne le pense pas, et pourtant nous voici avec entre les mains une version de "Smoke On The Water"... Voui voui voui… comme prévu, le son , la technique du roi de la surf guitare n’ont rien a voir avec le toucher velouté du man in black. Et notre guitar-hero de se lancer dans l’expérimental avec "Spacial Disorientation", on croirait Lou REED dans le décrié Metal Machine Music. Puis Dick chante "Walkin" avec un certain détachement, avec l’aide de plusieurs choristes féminines qui singent pas mal les BANGLES, c’est donc un petit ovni que ce titre. Il lance un flow agressif par instant et le titre est très original.

Alors, le titre "Belo Horizonte" sonne carrément mariachis avec ses trompettes ensoleillées… Mais il est possible que le titre soit plus mexicain qu’une ode à la grande métropole brésilienne ce que je croyais au départ… C’est mignonnet. Une seconde version existe où Dick pousse la chansonnette en mode acoustique, on croirait ELVIS ans ses pites turpitudes des sixties sans la voix du king ! Il dédicace à papa et maman son "Yours", à l’identité toujours aussi exotique, à nouveau sud américaine. Un titre élégant et qui se pose bien au milieu de toute cette débauche énergétique.

Une guitare acoustique ? Damned… Mais oui c’est bien le style de notre pourfendeur de surfeuse , et il s’agit de "Oasis Of Mara". Bien sur avec des titres pareils, vous imaginez bien que nous restons en terra Mexicana ! Et toujours de la guitare acoustique : "Mexico/Esperanza" a belle allure, et Dick semble à nouveau très à l’aise sur ce répertoire bien spécifique. Et comme Dick est un vrai empêcheur de tourner en rond - sauf sur l’anneau d’Indianapolis lors de ses épisodes Terminator bien sur, le voila qui nous pond un "Silent Night" des familles. Ouais ! Je vous le fais pas dire, on n’attendait pas le créateur de "Misirlou" sur ce genre de comptines de Noël. Il s’en sort plutôt bien et sonne même velouté par moment.

Et bien voila, il s’agit à mon sens du meilleur opus de Dick DALE. ON y retrouve certes les descentes supersoniques du guitar-hero – qui n’a jamais prétendu être un grand guitariste ! Mais il rajoute aussi ici plusieurs cordes à son arc – hé ! - en proposant des titres de blues, des titres mariachis et d’autres acoustiques, avec en prime une song de Nowel ! Moi je dis que l’homme est surprenant ! Je pose donc un 4 pour le dernier album du king de la surf guitar, toujours plus bronzé ! Dick nous a quitté en 2019 à l’âge de 81 ans !