Trembling Earth est la première exposition que consacre le Musée Munch d'Oslo à la nature dans l'œuvre d'Edvard Munch. Outre ses nus et ses portraits, dont le plus connu reste évidemment le célèbre Skrik, en français Le Cri, le peintre norvégien a fréquemment représenté son environnement immédiat, forêts et campagnes norvégiennes, plages et roches, rivages de la Baltique ou de la Mer du Nord où il passait parfois ses vacances. Outre les vingt-trois tableaux exposés, nous sont également dévoilées en fin de parcours les esquisses des peintures murales monumentales commandées en 1909 par l'Aula, l'université d'Oslo, autre grand chef-d'œuvre de Munch. Commissionné par le musée, DEATHPROD signe l'installation sonore de cette dernière salle.

Pour ce faire, Helge Sten affirme s'être tout d'abord inspiré des peintures terminées, exposées à l'université d'Oslo : L’Aula ressemble à une église – une architecture classique mariée à quelque chose de plus moderniste. Je voulais revenir en arrière et composer des morceaux qui me permettraient de voir ces images d’un œil neuf. Comme à l'habitude, notre Norvégien travaille à partir de sons produits par son légendaire Audio Virus, composé de plusieurs synthétiseurs analogiques et des modulateurs, toujours à la recherche de textures très organiques, évitant ainsi le rendu trop lisse et artificiel des logiciels de traitement numérique. Mais le musée osloïte a posé quelques contraintes. La fragilité des œuvres nécessitant de limiter au maximum le risque de vibration, distorsions et drones restent très modérés, tandis que les basses se font de fait moins élevées qu'à l'accoutumée.

Compilés sur Let Me Be Forever Animal, sorti dans la foulée chez Smalltown Supersound, ces quatre nouveaux morceaux restent assez proches de ce que Compositions nous avait donné à entendre en 2023. C'est particulièrement vrai de "Tired Light II" et "Fugue II", deux longues pistes d'un ambient sombre et vertigineux. Sur la première, DEATHPROD s'enfonce dans la forêt, dont le bruissement permanent semblerait ne former qu'un seul et unique son, étouffé par la brume hivernale. La seconde se montre plus menaçante. Les ombres se déforment, donnant naissance à des figures inquiétantes au cœur d'une clairière qui se peuple bientôt d'yeux et de grognements inconnus. Le rythme en moins, le malaise en plus, on croyait presque avoir basculé sur un album de GAS dont les nappes venteuses saturent tout l'espace. En introduction, toujours dans le même genre, les courtes "Tired Light I" et "Fugue I" rappellent aussi les intrigantes pièces d'archives d'Imaginary Songs From Tristan Da Cunha, comme de lointaines petites capsules sonores oubliées dans les fourrés, mais n'apportent malheureusement pas grand-chose au disque en lui-même.

S'il reste un bon album, Let Me Be Forever Animal est toutefois l'une des sorties les moins marquantes de DEATHPROD à ce jour. Doit-on réellement l'écouter en se posant devant un tableau de Munch pour savoir pleinement l'apprécier ? Si Helge Sten a jugé bon de sortir cette installation sonore en version physique, la réponse doit certainement être négative. Pourtant, on ne peut s'empêcher de penser que ces quatre morceaux n'ont pas été composés pour fonctionner tous seuls au départ. Quelque chose manque ici, difficile de savoir quoi, mais on éprouve ainsi comme un sentiment de distance par rapport à cette musique, fascinante jusqu'à un certain point, lassante sur la longue durée.