Quoi de neuf pour Kendrick LAMAR en 2024 ? Un album annoncé et sorti en moins d’une heure, voilà un joli cadeau de fin d’année de la part du rappeur de Comtpon. Je vous rassure, Kendrick ne nous sort pas un rap de Noël, que Dieu nous garde… Non, ce sixième album, GNX de son petit nom, fait dans le LAMAR pur jus, exactement ce qu’on aime.

Sa renaissance il l’a eue sur Mr. Morale & The Big Steppers et depuis, Kendrick vit sa vie comme il l’entend : il taille sa route sur son propre label PGLang, se la joue justicier de la cour de récré du rap en démontant DRAKE tout au long de ce conflit fait de diss tracks comme la géniale "Not Like Us" (5 nominations aux Grammy Awards, pas moins), en tête d’affiche du prochain Super Bowl et recrute Jack ANTONOFF pour produire la quasi-totalité de l’album. Un quadruple check olympique pour le champion actuel du rap West Coast.

On commence en beauté sur "Wacced Out Murals", un morceau qui s’ouvre sur la voix de la chanteuse mexicaine de mariachi Deyra BARRERA avant de virer hip-hop hardcore pour tracer la ligne entre ceux qui le soutiennent comme NAS par exemple, et ceux qui choisissent le camp de DRAKE, tout en canalisant la sagesse apprise ces dernières années (Snoop posted « Taylor Made », I prayed it was the edibles/I couldn’t believe it, it was only right for me to let it go). Forcément, Snoop DOGG confirmera sans tarder qu’il avait effectivement un peu trop bouffé de space brownies. Un beat lourd qui se pare d’alarmes pendant les couplets, attention les amis, le messie du hip-hop est dans la place.

S’en suit l’énergie 80’s de "Squabble Up", une track où le flow de Kendrick agit comme un élixir. Ici, le beat puise davantage dans les éléments électroniques, ambiance West Coast et on sent que K.Dot s’éclate. Le lyriciste réussit sans effort à nous montrer la quintessence de son génie. C’est fun, G-funk à fond, olala qu’est-ce que c’est bon !

Le rappeur de 37 ans retrouve sa pote SZA sur deux pistes, après des années de collaboration et d’amitié. Ambiance plus douce, normal, les sonorités sont R&B que ce soit sur "Luther" ou sur "Gloria". La guitare est présente, les arrangements sont riches et luxuriants, les deux amis prennent du bon temps en harmonisant de jolies mélodies, très joli et finalement très prévisible.

L’instru simple et prenante de "Man At The Garden" rappelle les instants d’introspection profonde du disque précédent. Kendrick connaît sa propre valeur (More money, more power, more freedom/Everything heaven allowed us, bitch/I deserve it all) et prouve qu’un bon rappeur n’est pas obligé de dégobiller trois cent mots à la minute pour mettre des claques à ses auditeurs. As cool as a cucumber disent les anglophones, alors LAMAR prend son temps et pose tranquille sur les couplets avant de passer à la vitesse supérieure sur la fin de la chanson.

Le rythme brut de "Hey Now" crée une atmosphère lourde qui laisse place à des ambiances plus chill, avec des beats très West Coast assez old school, que ce soit sur "Dodger Blue" ou "Heart Pt. 6", deux tracks aussi vibrantes l’une que l’autre. La chanson titre "GNX" me plaît moins niveau mélodie alors que Kendrick pose OKLM sur l’instru bouncy de "Peekaboo" et assoit son statut de G.O.A.T. (greatest of all time) sur "TV Off" (Ain’t no other king in this rap thing), un morceau en deux parties bien percutantes qui mêle saxo, violons et cuivres pour en assurer l’impact.

Si "TV Off" sonne déjà comme un morceau-signature, arrêtons-nous un moment sur "Reincarnated". Le beat est samplé chez TUPAC, son idole, alors les ondulations du piano et de la batterie sont smooth, parfaitement arrangées pour mettre en valeur la technique colossale de ce virtuose du rap. On retrouve tout ce qui fait Kendrick dans ce titre : l’introspection consciente, les rimes rapides, la polyvalence du flow le faisant passer d’un moment poétique à des instants d’agressivité sauvage mais toujours concis (I vow my life just to live one in harmony now/You crushed a lot of people keeping their thoughts in captivity/And I’m ashamed that I ever created that enemy/Then let’s rejoice where we at/I rewrote the devil’s story just to take our power back, reincarnated).

Comme sur toute sa discographie, Kendrick nous balance sur GNX des cadences fluides et presque toujours mélodiques. On l’entend moins cette lutte intérieure qu’il a laissée dans le chapitre précédent de sa carrière, ici, le rappeur érige sa propre statue en toute humilité et sans jamais paraître condescendant, un fait rare dans le monde du rap. Je rappelle que Kendrick a reçu en 2018 le prix Pulitzer de musique pour Damn, a-t-il encore quelque chose à prouver ? Sur l’échiquier du rap game, Kendrick LAMAR domine.

Note réelle : 4,5