En novembre 2024 le trio de Sheffield a sorti un des plus enchanteurs albums d’ambient de ces dernières années : Sleep Deprivation. Un mois plus tard, cet EP de 4 titres du nom de Dreamless Sleep venait en compléter les travaux en attendant la sortie courant juin 2025 d’un autre EP au tirage mondial extrêmement limité de 93 exemplaires et uniquement en vinyle (ni CD ni dématérialisation) que le groupe s’engage d’ailleurs à ne jamais represser.

Il s’agit ici pour le groupe anglais d’explorer un état d’esprit d’où les expériences conscientes sont absentes. Cet état mental, qu’il appelle "Neither Neither" (ou "ni l’un ni l’autre"), a été un thème dans ses travaux précédents (aucun rapport avec l’album du même nom de 2015).

Le sommeil sans rêves est une phase profonde du sommeil non "REM" (Rapid Eye Movement) que l’on appelle sommeil paradoxal, où la conscience disparaît et le cerveau entre dans un état réparateur ; "Il joue un rôle clé dans la récupération physique, la libération des hormones de croissance et la réparation des tissus, tout en aidant à la consolidation de la mémoire. Avec une activité cérébrale et une fréquence cardiaque réduites, cette étape permet un repos complet, libre des expériences vives des rêves."

Ceci dit on ne s’étonnera donc pas de la direction prise par les 20 minutes de cet EP avec un ambient particulièrement minimal et downtempo. Aux premiers abords cette musique semble un peu plate et, on ne va pas se mentir, ce n’est pas ce que The BLACK DOG a produit de plus enthousiasmant. Mais qu’on se comprenne bien, il n’y a rien de foncièrement mauvais dans ces quatre titres ; c’est simplement qu’il s’agit là d’une musique ambient très minimaliste un peu déroutante dans un premier temps car on ne s’attendait pas vraiment à une exploration aussi radicale du style.

On trouve sur cet EP un subtil travail de métamorphose sur le drone de "Well, Do They?", sorte de ligne de vie au milieu de reposantes vagues synthétiques. "Feeling Yung Again" est probablement le titre le plus porteur d’immersion de cet EP ; il n’est pas sans diluer quelques atmosphères reposant sur des travellings lents qui pourraient s’insérer dans le film comme Blade Runner (le premier s’entend). C’est probablement la composition qui se rapproche le plus du travail sur certains titres de l’album Sleep Deprivation comme "Sleep Deprivation 07" et "Sleep Deprivation 20", qu’il pourrait compléter.

Les nappes de "Meta Thinking" défient la pesanteur en arrière-plan en laissant le devant de la scène à une sorte de souffle et drone discrets, comme un bruit diffus d’appareils alimentés par l’électricité. Là aussi une track très reposante, tout comme la dernière "Triggers in the Grey Room" qui privilégie également une mise en avant du drone et d’un souffle sans occulter de contemplatives et jolies vagues qui nous apparaissent comme des souvenirs lointains ; il s’agit d’une composition somme toute joliment immersive qui démontre là encore que le minimalisme bien concocté peut s’avérer digne d'intérêt.

Sinon, affaire de goûts toujours, la pochette est jolie.

Titres préférés : "Feeling Yung Again", "Triggers in the Grey Room"