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I MUVRINI - Gioià (2010)
Par MARCO STIVELL le 10 Mai 2010          Consultée 8055 fois

Il y a encore deux mois, bien que suivant l'actualité du groupe de manière régulière, je n'étais absolument pas au courant qu'un album d'I MUVRINI allait paraître, même si j'y croyais très fort (après tout, cela faisait déjà un certain temps que le précédent était sorti). Lorsque je l'ai appris, ça a été une explosion de joie, avec en plus l'assurance qu'il n'y avait plus que quelques jours à attendre avant le jour fatidique. Pour aider à patienter, le groupe avait mis sur son site un lien pour écouter un des titres de l'album pour quiconque s'inscrirait à la newsletter. Simple et toujours généreux, ils n'ont vraiment pas changé... Cela fait maintenant un mois que Gioià est sorti, et si j'ai mis un peu de temps à l'écouter sérieusement, ou même à m'y faire, force est de constater qu'une fois encore ils ont fait fort, très fort...

En fait, il faut dire que Gioià est différent de ce qu'I MUVRINI faisait jusqu'à présent, mais aussi quelque part toujours pareil. Et une fois de plus, je suis tombé sous le charme, même si j'y ai mis un (tout petit) peu de temps. Ca avait déjà commencé avec "Una Terranova", l'extrait proposé en avant-première sur le site du groupe. Ce titre a pour particularité d'être un duo avec Grand Corps Malade, dont je ne crois pas me souvenir d'avoir déjà entendu un seul morceau en dehors de sa présente participation. Toujours est-il que sa voix m'a parue ici très agréable, et ce titre m'a frappé d'emblée par sa chaleur et sa beauté, qui ne sont pas sans rappeler le merveilleux Umani (2002). D'ailleurs il en reprend le vers d'une des chansons, "elle dit : mon pays a besoin du tien". Il fait dans "Una Terranova", tout comme pour la chanson de Umani, partie intégrante d'un message de paix et d'amour, thème récurrent chez I MUVRINI, à mon goût toujours utilisé de manière aussi sincère qu'essentielle. On ne vit peut-être pas dans un monde de bisounours, mais arrêter de croire que cela peut arriver un jour, ça jamais. Ca peut paraître naïf, mais je crois en ce type de message, qui si on le respectait un peu plus, nous rendrait la vie plus belle. C'est donc tout naturellement que j'apprécie pleinement "Una Terranova", de même que tout le reste de Gioià.

Car Gioià est ainsi fait, nouvelle véritable déclaration d'amour joyeuse (d'où le titre) à la vie, à l'humain... On commence très fort avec "Inseme si Pò", qui a toutes les qualités pour devenir avec un hit. Il est rare que le groupe commence un disque avec une chanson au tempo rapide, c'est même la toute première fois. On reconnait dans les arrangements (le claviériste Achim Meier qui prend la place du bassiste César Anot) notamment, le son du groupe employé depuis au moins Alma, avec chaque instrument bien distinguable de l'autre. De plus, "Inseme si Pò" marque le retour de l'accordéon (même si ce n'est plus Régis Gizavo) alors qu'au contraire comme on le verra, la cornemuse sera cette fois absente. "Elli a Sanu" est le titre qui rappelle le plus Alma de par son côté africain (les choeurs zoulous, que je trouve néanmoins beaucoup mieux utilisés que sur l'album de 2005), à la fois ensoleillé et planant, une vraie merveille. "Ora Sarà", plus festif, vient rompre un peu avec le ton des titres précédents, de par son rythme très marqué et des choeurs graves sur le final. C'est la première chanson qui m'a demandé un certain temps d'accoutumance et plusieurs écoutes avant d'être acceptée comme il se doit. On enchaîne avec une autre très grande chanson, "A to Stella", plutôt rêveuse comme le suggère le titre ("ton étoile"). La voix de Jean-François est décidément toujours aussi belle, et même s'il ne nous offre plus trop de réelles prestations "ébouriffantes" en termes de capacités, on se rend compte que ce n'est pas si indispensable. Vient ensuite la chanson-titre, qui n'a justement vraiment pas volé sa place pour devenir titre de l'album (si ce n'est pas la meilleure, c'est vraiment une des meilleures), surtout grâce à ses refrains touchants de beauté et que, malgré la fausse cornemuse, j'écoute à chaque fois avec la plus grande béatitude.

On arrive au milieu de l'album, qui représente aussi la partie qui m'a demandé le plus de temps à être appréciée, mais que malgré tout j'aime le moins. "Ti Dicu di tu", conserve le même propos que les précédentes, en incluant tout de même un texte récité par Vincent Franchini, un centenaire dont la diction reste difficile à suivre. Là aussi c'est touchant d'une autre manière, et la chanson donne l'impression de ne plus finir, ce qui lui apporte une certaine densité. "Bonafurtuna" est beaucoup plus légère. Il s'agit d'un duo avec Thomas Dutronc, dont là par contre je connais un (seul) titre, celui qui l'a fait connaître, et cela m'amuse d'ailleurs de le voir fréquenter d'aussi près des "corses sans pétards". Toujours est-il que j'ai du mal avec sa chanson, tout comme tout ce que j'ai pu entendre dans l'esprit manouche. "Bonafurtuna" (qui n'est pas si éloignée de cet esprit en fin de compte) m'a surtout permis de l'apprécier en tant que chanteur, et puis le titre reste sympa. "Canzone pè Sarah", encore une qui se bonifie au fil des écoutes. La voix de la jeune fille est jolie, dommage qu'elle ne chante pas. "O Corsica tu", chanson au ton plus solennel regorge de très bonnes idées d'arrangements, comme les parties de violoncelle parfois traitées en un son de vieux vinyle. Puis il reste les quatre dernières, qui ne sont vraiment pas les moindres. "Pudè" marque un retour à l'up-tempo et à la fête dans le style "Gioià", en aussi bien. "Teni Bonu", message de soutien, demande elle aussi un peu plus de temps. Les meilleures restent "Ti Riconnoscu" (avec des guitares bien marquées) et "Tu mi Manchi" qui, en matière de ballade acoustique, n'est pas sans rappeler "Rifà i Passi" sur l'album Curagiu (1995), en au moins aussi bien. Le disque ne s'arrête pas là cependant et nous propose en morceau caché (presque sans laisser de blanc) le titre traditionnel "Nannà" (berceuse) chantée par Mme Bernardini, la maman de nos chers deux frères. Peut-être pas essentiel mais toujours sympathique.

Epaulés, comme d'habitude par des musiciens solides (à part les habituels, on remarque la présence de Peter Weihe que l'on retrouve surtout aux côtés de Sarah Brightman et qui avait joué sur l'album précédent), I MUVRINI nous offrent là un grand cru, peut-être pas immédiatement séduisant cependant, et ce même s'ils réemploient des recettes déjà faites et refaites. C'est d'ailleurs là le pourquoi du "toujours pareil" du début de cette chronique : on rencontre des thèmes similaires entre "A to Stella" et "Da le Vostre Mane" (de Umani), entre "Inseme si Pò" et "Omi e donne"... Mais on se rend quand même compte qu'ils savent toujours bien le faire, que la musique qu'ils ont toujours aimé faire, ils nous la font aimer aussi.

Note réelle : 4,5

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   MARCO STIVELL

 
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- Jean-françois Bernardini (chant)
- Alain Bernardini (chant)
- Stéphane Mangiantini (chant)
- Thomas Simmerl (batterie, percussions)
- Mickey Meinert (guitares)
- Peter Weihe (guitares)
- César Anot (basse, choeurs)
- Henner Malecha (basse)
- Laurence Dupuis (violon)
- Jean-françois Ott (violoncelle)
- Achim Meier (piano, claviers, accordéon)
- Abaji (kementché)
- Grand Corps Malade (chant)
- Thomas Dutronc (chant)
- Philippe Rutili (chant)
- Charles Rutili (chant)
- Vincent Franchini (diction)
- Les élèves Du Collège De Purtichju (chant)
- Colomba Maurel Santini (diction)


1. Inseme Si Pò
2. Una Terranova
3. Elli A Sanu
4. Ora Sarà
5. A To Stella
6. Gioià
7. Ti Dicu Di Tu
8. Bonafurtuna
9. Canzone Pè Sarah
10. O Corsica Tu
11. Pudè
12. Teni Bonu
13. Ti Ricunnoscu
14. Tu Mi Manchi



             



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