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ROCK PROGRESSIF  |  STUDIO

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EMERSON, LAKE & PALMER - Works Volume 1 (1977)
Par MARCO STIVELL le 21 Avril 2012          Consultée 4324 fois

Après un hiatus de trois ans, nécessaire pour de nouvelles créations, ELP est tout fringant, prêt à revenir en force... ou pas. En fait, parallèlement à bons nombres d'autres ténors du rock progressif, 1977 est le tournant où cette musique se voit grandement dépréciée et constamment dévaluée, les musiciens comme les fans concernés le savent bien. Et du coup, c'est la précédente période de pause qui sonne le glas de l'âge d'or d'ELP, ce retour allant être beaucoup moins marquant, tant sur le plan commercial qu'artistique (ça, c'est ce que même les fans s'accordent à dire). Deux volumes de Works verront pourtant le jour en cette année 77, dont le présent qui est double, signe d'une inspiration décidément débordante. En passant, notons le choix d'une pochette aussi sobre après le concept Brain Salad Surgery...

Et pour mieux faire ressortir le côté mégalomane de l'entreprise, chaque membre se réserve pour ce premier volume une face à composer, le but étant selon nous d'emblée de bien sûr le mettre en valeur le plus possible. On verra bien... Les trois faces sont dans le même ordre que le nom, et pour la quatrième, le groupe se retrouve entier et propose un dernier gros coup ensemble. Seule réelle nouveauté dans l'instrumentation : un orchestre omniprésent !

Le concerto d'Emerson (19 minutes) est introduit de manière guillerette par l'orchestre, puis le piano rentre après une montée solennelle de cuivres. Sur cet "Allegro Giocoso" comme sur l'époustouflante "Toccata", le musicien ne fait pas tant que cela étalage de sa virtuosité, et il laisse même encore une grande place à l'orchestre. Quant à l' "Andante", c'est le genre de perle de rêverie à laquelle ce brave Keith ne nous aura que trop peu habitués. Tout le long, la manière dont les deux entités (piano et orchestre) s'entremêlent est probante, et l'orchestre, dans une grandiloquence chère au musicien, ravit presque la vedette à ce dernier tant les envolées sont splendides. On sentira aussi, plus que jamais, combien Emerson ne détient pas le seul bagage classique, mais aussi celui du jazz, son passage au rock... Un très beau moment que ce concerto, destiné évidemment avant tout à tous les sensibles à la "grande musique".

Lake a pour sa propre face tenu à "meubler" avec ses petites chansons dont il a le secret, et qui sont d'inspiration, il faut le dire, assez diverse. Autant "C'est la Vie", "Closer to Believing" et "Lend Your Love to Me Tonight" sont trois réussites éblouissantes dans un style ballade (en nettement plus léché toutefois du fait de la présence de l'orchestre), autant le reste demeure assez maladroit. "Hallowed Be Thy Name" est une bizarrerie bluesy avec séquences d'orchestre très heu, industrielles. Intéressant mais malaroit, tout comme "Nobody Loves You Like I Do", nouvelle sucrerie au gentil harmonica. A noter que Peter Sinfield, ex-King Crimson et déjà collaborateur d'ELP pour Brain Salad Surgery, s'est encore chargé des paroles, ainsi que pour le "Pirates" de la quatrième face. Il est aussi amusant de découvrir un Greg Lake plus crooner que jamais, et Sinfield métamorphosé en auteur de chansons quasi-variété, quand elles ne le sont pas complètement.

C'est sûrement la "Palmer side" qui souffrira le plus du haussement de sourcils, difficile à contenir. Les trois premiers morceaux mélangent rock et le fameux apport instrumental supplémentaire, surtout "The Enemy God Dances With the Black Spirits" qui d'ailleurs puise son inspiration chez Prokofiev. Sur "New Orleans", "Food for Your Soul" et "L.A. Nights", la touche est plus jazz, et en dehors des guitares il n'y a quasiment que des saxophones, dont les hurlements sur près de six minutes sont assez éprouvants par ailleurs. Ce rock instrumental peut paraître sympathique au premier abord, il devient vite rébarbatif, et l'apport de Joe Walsh des Eagles au "scat vocal" sur "New Orleans" n'y change rien. La relecture de Bach à grand renfort de vibraphone est mignonne, idéale pour endormir son bébé. Quant à "Tank", passé à la sauce susdite et bien qu'il n'ait jamais été un chef-d'oeuvre, il devient un morceau très commun dans ce marasme, et par rapport à sa version originale, perd son solo de batterie pour en gagner un au sax soprano... Cette face, c'est vraiment du lourd, mais pas dans le bon sens.

Reste la dernière, deux morceaux de dix minutes voire plus. C'est un peu le prolongement de la Palmer side en groupe, et en beaucoup plus classe (façon ELP). "Pirates" commence (et se termine) comme un "Apocalypse in 9/8" symphonique, mais se prolonge comme ELP l'a toujours fait, entre délire infantile et épopée plus ou moins sérieuse. A l'intro de "Fanfare for the Common Man", j'ai l'impression que les trompettes vont lancer l'arrivée d'un roi carolingien et la première séance à la Cour d'Honneur au Festival d'Avignon, c'est drôle... Les claviers d'Emerson sonnent magnifiquement bien sur cette rythmique blues-rock. Et tout comme "Pirates", il s'en dégage une impression de grandiose, on pourrait presque dire d'une teneur similaire à celle d'un "Karn Evil 9".

On peut le dire, c'est cette quatrième face ainsi que les trois ballades de Lake et le concerto d'Emerson qui contribuent le plus au plaisir que peut offrir ce double disque, copieux mais recommandable, sans bien sûr égaler les chefs-d'oeuvre d'avant.

Note réelle : 3,5/5

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   MARCO STIVELL

 
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- Keith Emerson (piano, claviers, synthétiseurs)
- Greg Lake (chant, basse, guitares)
- Carl Palmer (batterie, percussions)
- + Orchestre
- Joe Walsh (guitare, chant scat)


- disc 1
1. Piano Concerto No 1
2. Lend Your Love To Me Tonight
3. C'est La Vie
4. Hallowed Be Thy Name
5. Nobody Loves You Like I Do
6. Closer To Believing

- disc 2
1. The Enemy God Dances With Black Spirits
2. L.a. Nights
3. New Orleans
4. Two Part Invention In D Minor
5. Food For Your Soul
6. Tank
7. Fanfare For The Common Man
8. Pirates



             



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