EURYTHMICS est un groupe désormais au firmament de sa célébrité. Adulé par des millions de fans et vendant des semi-remorques de 33-tours –eh oui, nous ne sommes qu’en 1987 !- Revenge avait fait le tour du monde avec ses vidéos MTViennes et ses compositions calibrées 'mainstream' mais résolument qualitatives. Le duo est donc au tournant de sa carrière : la New Wave connaît ses derniers soubresauts et il devient urgent de se renouveler. Gageons qu’avec de tels talents de songwriters et la voix divine de la Diva péroxydée, le succès sera à nouveau au rendez-vous. Annie est d’ailleurs au centre de l'opus puisque chaque morceau est accompagné d’une vidéo la présentant en femme-objet ou toute autre incarnation, comme celle de Mamie Van Doren -ersatz de Marylin MONROE-.

Savage est leur 7ème album. Déjà ! Il faut dire que nos artistes grands-bretons ne sont en rien des fainéants et que leurs réalisations pointent systématiquement le bout de leur nez chaque année. Il faut savoir battre le fer pendant qu’il est chaud. Nous allons donc suivre la voie classique des groupes mainstream pour juger sur pièces. Débutons sans plus attendre les singles de l’album.

"Beethoven (I Love To Listen To)" est le premier single. Annie y campe visiblement une pré 'Desperate housewife' où elle nettoie, range et cuisine avec un talent indéniable. Autant cette vision amusante interpelle l’auditeur sur le statut des femmes des années 80, autant le titre est loin de se démarquer par sa qualité. Notez la transformation étonnante de notre androgyne Annie en la créature fabuleuse de la pochette. Quelle jolie femme !
"Shame" poursuit le bal des singles sans réelle passion. Le morceau est assez quelconque, mais on en retient le mignon refrain, très addictif.
"I Need a Man" a un côté assez rock qui me rappelle les compositions de PRINCE alors très en vogue à l’époque. C’est sympa et ferme la marche des singles de l’opus. Le moins qu’on puisse dire est que voilà la cuvée la plus médiocre des EURYTHMICS en matière de hits, ce dernier single n’étant pas meilleur que les autres. Connaissant le manque d’entrain des deux compères à composer autre chose que des fillers pour remplir leurs albums, voilà qui soulève une vive inquiétude.

Et pourtant, le titre que je retiens de cet album, le superbe "Savage", dont le chant lancinant d’Annie se marie remarquablement à une rythmique martelée comme rarement chez les britanniques, n’est pas un single. Nous continuons d’y suivre Annie en sex-symbol, étonnant concept en cette année déjà lointaine, une revendication qui trouvera un peu plus tard écho au travers des nombreuses démarches de l’artiste pour l’égalité des droits.
"Brand new day" est une super performance de la chanteuse qui nous assène a capella un titre aux fortes réminiscences gospel, c’est magnifique. Je me prends à rêver d’un futur album de Blues. Cela aurait une sacrée gueule. Dans la bouche de l’Ecossaise, la folky "I Need You " prend une consistance originale. Un titre frustre aux antipodes des sophistications premières du duo. Le petit côté funky assorti d’une guitare à la SHADOWS de "Put the Blame On Me" permet au duo de présenter une nouvelle facette. Un peu plus loin, "Heaven" est un pas vers la world music, et vous trouverez enfin l’autobiographique "Wide-Eyed Girl" pour clôturer la cuvée 87.

Le concept sympa ne saurait masquer la réalité en aucune manière : voilà un des albums les plus faibles des EURYTHMICS.