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 Guide Jazz (760)

Keith JARRETT - The Carnegie Hall Concert (2005)
Par MR. AMEFORGÉE le 25 Octobre 2006          Consultée 5630 fois

Le concert du Carnegie Hall, sous la forme d’un double album, a été enregistré en Septembre 2005 dans la fameuse salle new-yorkaise, où l’artiste ne s’était pas produit depuis une dizaine d’années. L’occasion pour le sexagénaire de livrer une performance qui prend des allures, à certains égards, de rétrospective de son œuvre. Nous avons déjà annoncé la couleur en d’autres lieux, nous nous situons dans la continuité de Radiance : Jarrett morcelle sa prestation en pièces assez courtes, par opposition aux longues suites qu’il jouait jadis. A l’en croire, on gagnerait donc en concision : lorsque le pianiste estime qu’il n’a plus rien à dire sur un thème, il s’arrête et passe à la suite sans perdre une dizaine de minutes, sans répéter inlassablement les mêmes accords, en quête d’inspiration (ce qui arrivait parfois avant). Un point original, si le terme est approprié du moins : on aura droit à une copieuse rasade de rappels, cinq en tout, qui sont des reprises d’anciennes compositions et d’un standard, « Time on my Hands ».

Les concerts de Jarrett du XXIe siècle s’organisent suivant un schéma assez convenu, et la disposition en morceaux brefs a tendance à atténuer l’impression de renouvellement perpétuel : ouverture dans un chaos de notes, abstraites ou free-jazz, puis second morceau qui se structure, troisième morceau souvent lyrique venant caresser l’auditeur dans le sens de l’oreille ; dans le corps du concert, on croisera des fantômes de blues, des ballades jazzy, d’autres maelströms dissonants, des passages classiques façon « Paris-Vienna-Scala » Concert, avec les techniques éprouvées d’usage, ostinatos hypnotiques et rideau d’arpège magique, et des reprises comme des friandises un peu complaisantes.

Le pianiste nous peint un portrait de l’artiste en vieil homme, un petit peu au bout du rouleau. Chaque concert, ou presque, nous gardait son lot de surprises, de passages croustillants, enthousiasmants, créatifs. Ici, on a le sentiment désagréable d’être placé dans la peau du râleur nostalgique et son fameux « c’était mieux avant ».
Les peintures abstraites n’exercent pas le même degré de fascination que celles de Radiance, les parties qui swinguent paraissent étonnamment molles, le son du piano semble ouaté comme au sortir d’un placard bourré de naphtaline.

Petit carnet de voyage : à tel moment s’orchestre comme un combat de gladiateurs entre les deux mains du pianiste, chacune effectuant une petite cuisine insoucieuse de l’autre, ou bien cherchant à faire trébucher sa soeur ennemie, ou bien, pour finir se réconciliant et oeuvrant de concert. Le tempo s’avère donc à géométrie variable, et les semblants de mélodie prennent parfois des tournants heurtés qui évoqueraient un Stravinsky saoul. Ailleurs, on oscille entre free et impressionnisme à la Debussy avec des cascades de notes lumineuses. Ailleurs encore, on retrouve notre vieil ami, l’ostinato de la main gauche, tandis que la main droite se laisse à dessiner quelques phrasés jazzy. Par moments, on sirote des accents gospels, des tournures gospels, sympathiques certes, mais inoffensives.

Quant aux rappels, ils ne réinventent pas la roue. « My Song » paraît moins sirupeux que la version en quartet, ce qui n’est pas difficile, mais n’en demeure pas moins melliflu, adjectif qui rime avec superflu. « Paint My Heart Red » pouvait déjà être entendu en trio, ainsi que sur l’album Concerts. Ce n’est pas déplaisant, il faut bien l’admettre, mais n’est-ce pas tout de même un peu laborieux ? Pas déplaisant, d’ailleurs, est-ce que c’est vraiment le résultat qu’on est censé attendre d’un Jarrett ?

Il est assez révélateur que le morceau qui emballe le plus mes oreilles soit le troisième. Classicisme ultra méditatif, style la Scala, en plus efficace toutefois et donc en plus passionnant : des notes lentement et sobrement égrenées, une main gauche qui vient souffler comme une pesanteur presque funèbre, et puis la main droite qui ajoute au thème initial quelques ornements en cours de chemin, dotant ainsi la pièce d’accents espagnols. C’est beau, délicat et subtil.

Aucun concert de Jarrett n’est totalement mauvais. Le pianiste est aguerri et sait ménager son auditoire. On trouvera toujours des séquences inédites, des progressions d’idées intéressantes, et la preuve d’un indéniable savoir-faire. Mais il n’empêche que ce Carnegie Hall Concert laisse un étonnant goût d’insipidité dans la bouche. J’ai rarement l’impulsion de le sortir de ma discothèque pour l’écouter, sinon pour l’épousseter. Les chairs se racornissent, les os se rétractent, le cœur se refroidit, pourquoi faut-il que le temps fasse son œuvre ?

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- Keith Jarrett (piano)


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1. Part 6
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3. Part 8
4. Part 9
5. Part 10
6. The Good America
7. Paint My Heart Red
8. My Song
9. True Blues
10. Time On My Hand



             



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