La collaboration infernale gros singles + posters à poil a propulsé Samantha FOX au top, au firmament du hit parade anglais. Elle est devenue la coqueluche du pays : les hommes aiment ses pages 3, les femmes chantent à tue-tête qu'elles "veulent être touchées", qu'elles "en veulent tout de suite" et j'en passe. Jusqu'au roi Arthur qui s'est plaint de l'émancipation de Guenièvre. Bref, inutile donc de laisser refroidir le lait au risque qu'il caille : hop ! second album, avec peu ou prou la même équipe (les musiciens ne sont toujours pas crédités cependant) et le même style, à savoir de la synthpop agressive, funky, bien dans l'air du temps mais avec un soupçon de qualité en plus. Léger, le soupçon, hein.

On retrouvera le même petit souci stylistique qui consiste à mélanger singles, généralement excellents, et chansons moins connues et, pour être franc, souvent moins intéressantes. Car oui, "Naughty Girls" est très mélodique (le riff vous hantera longtemps) mais sa production cheap pique fort, "If Music be the Food" est une galère funko-théâtrale entre Shakespeare et les NKOTB, "That Sensation", méconnue, mérite de le rester tant elle n'apporte rien.

Mais ce sont bien les deux gros singles qui vont attirer l'attention : quels éléments permettaient aux tubes de 1986 de se démarquer ? Un son plus gros, une production plus rentre-dedans et plus de guitares. 1987, c'est pareil en pire. Chanson indispensable de la belle Samantha, "I Surrender" est un hit dès les premières secondes, guitares tranchantes comme des rasoirs et refrain exalté. Tandis que "Nothing's Gonna Stop me", qui ressemble à une volonté de copier "You Keep me Hanging on" repris par Kim WILDE, base tout sur des synthés énormes et passés à la postérité. Bien plus problématique, "Satisfaction" est globalement ratée mais elle a une fonction particulière : faire rentrer cette légende dans un autre univers, et surtout dans une autre génération. En cela, avec Sam qui la chante pas si mal, ce n'est pas à jeter au feu. Ah, et puis ça pourrait servir à achever Philippe Manoeuvre s'il gobe de travers un os de poulet : double fonction.

On aurait pu en rester là : de bons titres, des mauvais, et une velléité commerciale affichée et du reste pas honteuse. Mais cet album offre également de l'inédit en la personne de titres à ambiance. Oh, ne prenez pas cet air perplexe, ce ne sera ni Klaus SCHULZE ni Alan STIVELL. Mais Sam s'aventure dans des choses plus adultes : "True Devotion" très mignonne, "Dream City" assez originale et au texte percutant, et la chanson de fin "The Best is Yet to Come", porteuse de promesses et franchement jolie, en plus de faire vraie fin.

La version remaster récente, outre des tas de remix pourris et des instrumentaux (et oui, chanter "I Surrender" en karaoke peut provoquer une légère érection aux chanteurs atteints de LSD), propose les faces B, allant de pas mal à excellente : très sombre, minimaliste, "Even in the Darkest Hours" est un petit bijou d'ambiance synthétique qui aurait largement mérité l'album. On se retrouve en quelques notes en haut d'un gratte-ciel luxueux de Manhattan, le frigo et le salon pleins, et le coeur vidé. Ce sont ces essais vers des contrées plus dark qui font de cet album de Sam le meilleur, tout simplement.