1993 : Dans une Suède qui ne jure que par ABBA et le death metal, un groupe tient vaillamment tête. Son nom ? UNION CARBIDE PRODUCTIONS, groupe de punk/garage rock/free jazz qui connaît son petit succès dans le milieu underground, gagnant les louanges de noms plus connus comme R.E.M., SONIC YOUTH ou Kurt COBAIN.

Pourtant tout ne va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Miné de l'intérieur le groupe se fissure et finit inévitablement par craquer. Des noms émergeant de cette séparation nous retiendrons d'abord Ebbot LUNDBERG, chanteur charismatique aux allures de gourou. C'est à son initiative et après quelques tentatives ratées que va se former le noyau dur d'un nouveau. Exit le punk, ils décident d'invoquer les spectres des grands noms du rock 60's/70's -LED ZEPPELIN, les BEATLES, The DOORS, JEFFERSON AIRPLANE, GRATEFUL DEAD, etc...- au sein d'une nouvelle entité qui ne gardera d'Union Carbide Productions que l'esprit libre et effronté et un nom à dormir debout : THE SOUNDTRACK OF OUR LIVES, que nous abrégerons par T.S.O.O.L.

Le décor est planté, les personnages annoncés, la pièce peut commencer. Le groupe parvient à sécuriser un contrat chez la Warner et terrorise immédiatement leur producteur en lui proposant de sortir en guise de premier album un coffret contenant 50 morceaux ! Le refus est immédiat, des négociations s'amorcent et se concluent sur un compromis : un seul disques, vingt chansons, 70 minutes d'écoute, le ton est donné, T.S.O.O.L. sera grandiose ou ne sera pas. D'emblée ils annoncent que chez eux le remplissage à ras-bord de leurs disques ne sera pas une mode comme c'est le cas en cette fin de siècle mais un choix assumé, quitte à lasser l'auditeur ou à délivrer quelques morceaux en trop. Mais cela ne les empêchera pas de devenir les chouchous de la scène indépendante, et ce dès ce fameux premier album sorti en 1996 sous le doux nom de Welcome to the Infant Freebase, doté d'une pochette...particulière.

Alors, pour où commencer ? Par le début, me dites-vous ? Très bien. Nous sommes accueillis par « Mantra Slider », morceau pachyderme qui fait les présentations et annonce la suite. Le son est chaleureux, la production bien chargée. Les instruments sont nombreux et se mélangent, s'entrechoquent dans un joyeux foutraque. Au milieu de tout cela nous pouvons reprendre notre liste d'influence et cocher les cases : Alors, oui pour l'atmosphère psychédélique invoquant le meilleur des Doors, du Jeff' et des Morts Bienheureux...Oui pour les rythmiques sauvages à la IGGY AND THE STOOGES, oui pour la liberté du free jazz façon Ornette COLEMAN...A chaque morceau nous pouvons identifier une nouvelle influence.

Mais là où le groupe fait fort c'est que plutôt que de singer leurs idoles ils en tirent le meilleur et en font une synthèse musicale, certes bordélique, mais fortement jouissive. Malgré un petit faible en milieu de disque ils parviennent à rester pertinent et à se renouveler sur chaque morceau. Ne cherchez pas à comprendre les paroles et ne voyez aucune malice dans « Magic Muslims ». Chez T.S.O.O.L. on s'installe confortablement, de préférence on s'affale plutôt sur des coussins moelleux et on profite de la musique. Il y a de quoi faire, ce ne sont pas les bons morceaux qui manquent : « Chromosome Layer », « Legend In His Own Mind » (ma petite favorite), « Embryonic Rendezvous »...Avec ce premier effort le groupe frappe fort et impose un style atypique et coloré mais ô combien nécessaire dans une scène rock qui ne cesse de se faire de plus en plus morne.