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Nolwenn KORBELL - Skeud Ho Roudoù (2015)
Par MARCO STIVELL le 18 Juin 2019          Consultée 1130 fois

Heureusement que Nolwenn KORBELL n'a pas déchiré sa belle robe mais l'a seulement posée (cf. chronique de l'album Noazh), car elle l'enfile de nouveau en 2015. C'est fou comme les années semblent défiler au cours d'une production discographique qui prend son temps, nettement plus durant cette décennie 2010. Ce n'est pas plus mal car dès que la Quimpéroise talentueuse nous revient, c'est une belle offrande. Pour nous et bien sûr pour sa chère Bretagne.

Skeud ho Roudoù, "l'ombre de tes traces", est un disque magique, presque autant que Noazh, tout en étant différent. On note, outre la voix, une volonté de conserver un noyau dur batterie-guitare, mais le son n'est pas le même, clairement moins rock ici. C'est parce qu'en plus du trio de tête, trois autres musiciens font la couleur de l'opus, élégante et plus tendre, avec des chansons aussi adorables que la pochette (oeuvre d'un certain Riwal Corbel !).

Floriane Le Pottier, Alexis Bocher et Jonathan Dour munis de leurs cordes de chambre forment un complément à la voix de KORBELL plutôt somptueux. Finesse est le maître mot, avec un zeste de direction contemporaine dans le jeu employé, sans en faire étalage non plus. C'est justement un beau pari de l'album : rassembler des gourmets autant que des amateurs de chansons simples et belles. Dame Nolwenn renouvelle son chant avec moins de talk-over/parlé-chanté (sauf pour la partie poésie, de l' "Amour Kerne" à "Piv" inclus). Au contraire, les mélodies sont plus "droites", mais toujours avec beaucoup d'intention et de sensibilité non feinte.

À côté de cela, Antonin Volson, également responsable d'une bonne partie des arrangements, n'est pas en reste. La batterie est toujours aussi présente, les percussions reviennent en avant comme dix années plus tôt, sur les deux premiers albums de KORBELL. C'est son seul accompagnement, mis à part les cordes, sur "Me no Like" ("moi pas aimer"), vision d'un habitant d'Afrique ou d'Amérique voyant l'Européen mettre le pied sur ses terres il y a quelques siècle. Esprit tribal de mise, même si le chant reste doux, la fin du texte optimiste.

Ce titre est un mélange d'anglais et breton, chose que l'artiste s'amuse à faire sur "Darling ar poull", caresse sensationnelle et détendue dans une ambiance soul à la "My Girl" des TEMPTATIONS. Si la rythmique et le riff de guitare y font penser furieusement, l'effort ne s'éloigne pas pour autant de la douceur feutrée qui anime l'ensemble de Skeud ho Roudoù. Même Didier Dreo, lien restant avec l'album Noazh pour le timbre saturé, les grands accords plaqués, résonances de sa guitare, se distingue par sa subtilité.

Une fois de plus, Nolwenn KORBELL nous gâte. "An den" ("l'homme"), "Sparlet" ("enfermé"), "Avel viz" ("nordet", vent de nord-est), "Simple" en anglais (dédié à la poétesse américaine du XIXème siècle, Emily Dickinson) sont une nouvelle occasion pour elle de livrer des mots enflammés aux éléments alentour, faute d'amoureux, aux abonnés absents. Les cordes s'immiscent dans un décor musical jazz latino, joliment balancé et qui pourrait être utilisé dans une musique de film dramatique, avec un pathos bien dosé.

Cette galanterie rejoint l' "Amour kerne", texte emprunté à Xavier Grall pour une version différente de celle de Dan AR BRAZ, mais toujours en acoustique, KORBELL étant presque seule. Dans le genre troubadour/sérénade, c'est d'une grande beauté. Tout comme "If", non pas de Rudyard Kipling pour une fois mais de Dmitri Broe, ici en développement théâtral, et un dernier poème adapté, "Piv?" ("qui ?") écrit par Anjela Duval. Le talk-over fait bon ménage avec des vocalises magnifiques, surprises que KORBELL nous réserve çà et là.

Elle et les musiciens parviennent à apporter un rythme différent pour chaque couplet du passionnant "Laret vez" ("on dit"), à enrichir ce qui ne pourrait être qu'une chanson enfantine ("Traoù gwir/"choses vraies") et, petite cerise sur le gâteau, à tourner l'ambiance de "N'on ket" ("je ne suis pas") en un trip-hop fort bien taillé pour la Dame. Il n'y a pas à dire, elle sait y faire et s'entourer. Ce solo de violoncelle... Un ou deux titres allongent peut-être la durée vers la fin, mais tout reste beau ici.

Un disque qui aide à planer, s'écoute avec attention (et ne manquez pas d'en donner à la guitare, ça vaut le coup !). Il est récompensé l'année suivante comme meilleur disque chanté en breton.

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   MARCO STIVELL

 
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- Nolwenn Korbell (chant, guitare)
- Didier Dreo (guitares)
- Antonin Volson (batterie, contrebasse, percussions, programma)
- Floriane Le Pottier, Jonathan Dour (violons)
- Alexis Bocher (violoncelle, programmations)


1. Avel Viz
2. Awen
3. N'on Ket
4. Darling Ar Poull
5. Me No Like
6. Sparlet
7. Amour Kerne
8. If
9. Piv?
10. Laret Vez
11. Simple
12. An Den
13. Traoù Gwir



             



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