Les BODH’AKTAN ont traversé la décennie avec grand fracas. A l’heure du bilan, le groupe québécois peut s’enorgueillir d’avoir été le fer de lance d’un mouvement punk-rock celtique qui a grandement été reboosté par la formule irrésistible de ces marins qui n’ont pas hésité à souquer ferme de part et d’autre de l’Atlantique pour se faire entendre. Si le groupe a atteint très tôt son climax artistique (l’album Tant Qu’il Restera Du Rhum publié en 2013 est sans doute l’album qui se révèle le plus réussi encore aujourd’hui), l’équipage n’a eu de cesse de composer et d’enregistrer une musique particulièrement attachante, qu’elle narre les belles histoires des musiciens en tournée sur le vieux continent (l’album éponyme de 2016) ou qu’elle cherche à flatter le marché anglophone (le très réussi Ride Out The Storm de 2018).

Un peu plus d’un an après la sortie de son dernier opus, BODH’AKTAN nous revient avec un album qui voit le groupe remiser ses expérimentations pour proposer une septième offrande au titre et à la pochette poétiques, qui s’inscrit dans une tradition celtique renforcée. En ce sens, et s’il n’y a pas l’euphorie de la découverte, De Temps et de Vents peut évoquer les premiers albums du groupe, qui retourne à ses premières amours punk celtique. Les morceaux, tous chantés en Français, ne prennent pas de détours et se font efficaces. Le mélange entre rock, folk, punk et instruments celtiques se fait particulièrement réussi sur "L’Amer", porté par une rythmique et des mélodies irrésistibles, ainsi que par un refrain dont l’impact se voit renforcé par des chœurs fédérateurs, un des points forts du groupe depuis ses débuts.
Un retour au rock celtique "pur", donc, comme si cela voulait dire quelque chose. Mais que ce soit avec la ballade "Le Jardinier du couvent" (qui n’est pas sans évoquer l’univers de TRI YANN) ou l’instrumental "Set Béquate", BODH’AKTAN se fait plus que jamais inspiré et a, une nouvelle fois, trouvé le juste compromis entre distorsion et mélodies, les violons se faisant plus que jamais dansants et inspirés.

C’est vrai, il n’y a pas sur ce nouvel album un "tube" de la trempe de "Le 31 du Mois d’Août", mais le groupe compense l’absence de coups d’éclats par une solidité sans faille qui prouve que les Québécois, porteurs d’une formule infaillible, sont là pour durer au moins une autre décennie. Des pièces telles que "Capitaine deux-cennes", qui narre les aventures d’un optimiste qui n’a décidément pas le pied marin, le mid-tempo puissant "L’Orage", porté par des paroles et des ambiances épiques, le nostalgique "La Tournée", qui n’aurait pas fait tâche sur l’album de 2016, ou encore la ballade country-folk "Dans le Bois", porteuse d’ambiances positives et faisant l’apologie des bonheurs simples, viennent enrichir avec brio un répertoire bien fourni en titre de grandes qualité.

Une nouvelle adaptation de "Tant Qu’il Restera du Rhum" vient clôturer cet album qui laisse la belle impression que les BODH’AKTAN ne savent pas décevoir, et c’est tant mieux. Il y a sur De Temps et De Vents tous les ingrédients qui rendent la musique des Québécois si savoureuse, et quelques écoutes suffisent à adopter sans réserve ce septième opus qui, en se rapprochant des racines celtiques de la musique du groupe, voit l’impact de son rock musclé renforcé. Un bien bel album pour conclure la décennie.