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VARIÉTÉ FRANÇAISE  |  STUDIO

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- Style : Serge Gainsbourg , Hubert Felix Thiefaine , Gérard Manset

Alain BASHUNG - Bleu Petrole (2008)
Par ERWIN le 16 Avril 2021          Consultée 2351 fois

Malgré des années exemptes de nouveau matériel, Alain BASHUNG n'a plus rien à prouver en cette année 2008. Le phénoménal Imprudence, qui date de six ans déjà, l'a définitivement imposé en icône du rock français, une position enviable de parrain, égal de GAINSBOURG, à la personnalité certes étrange, probablement incompris à jamais, mais on sait déjà à l'époque que le chanteur est condamné pour consommation excessive de clopes.
Alors, il se lance dans un dernier challenge créatif et, pour cela, fait appel à son pair Gérard MANSET ainsi qu'à l'un de ses très nombreux rejetons artistiques en la personne de Gaëtan ROUSSEL, le chanteur de LOUISE ATTAQUE. A l'attaque de ce qu'il sait être son dernier baroud d'honneur, on imagine aisément que BASHUNG va délivrer la totalité de son être dans les chansons qu'il compose ou interprète sur son album testament.

Les trois singles qu'il choisit sortent de la guitare de Gaëtan. Le premier est le cynique "Résidents de la république", à l'énigmatique vidéo bipolaire désertico-aérienne. Alain y chante de manière détachée, comme si seul importait le message, sur cette mélodie entêtante de Gaëtan. Efficace et doté d'une belle orchestration, ce titre est aujourd'hui l'un des classiques de l'artiste. "Je t'ai manqué" est toute d'intimité vêtue, une simple guitare acoustique et Alain qui déclame un texte plus abscons que jamais. C'est évidemment plus modeste, mais le résultat reste sympa. Le dernier single paru de son vivant est "Sur un trapèze" où on le voit en famille dans un train cette fois, avec ce look Mitterrandien en diable, une ambiance crépusculaire baigne les images et la musique vers l'inéluctable destin.

L'art de ROUSSEL fonctionne à merveille sur la voix de BASHUNG. En témoigne "Tant de nuits", qui opère une filiation évidente avec Fantaisie militaire et L'imprudence. Certes, ce n'est pas la meilleure chanson, mais elle reste tout à fait dans l'imaginaire collectif de son œuvre pour tout un chacun. "Hier à Sousse" nous ramène d'ailleurs dans le giron de LOUISE ATTAQUE, avec cette débauche acoustique que seul sait délivrer le groupe parisien. Un classique de plus pour l'artiste français dont le ton désabusé colle parfaitement au thème choisi du temps qui passe. "Le secret des banquises" frappe par le contraste entre la dynamique du morceau et le chant presque paresseux de BASHUNG. Le résultat, original, n'appartient au final qu'à Alain, comme il se doit.

Gérard MANSET, l'artiste maudit de la chanson française, est présent sur quatre morceaux. "Comme un légo" ouvre la dernière tournée d'Alain, comme un symbole. Titre monolithique, scandé par un piano raide et une guitare atone, ce qui donne à la voix du chanteur et aux paroles une évidente prééminence. Ici, s'entrechoquent les éléments chers à BASHUNG : l'absurdité, la poésie, mais aussi un certain fatalisme, un morceau magnifique. Au delà, c'est le vide, assis devant le restant d'une portion de frites, noir sidéral et quelques plats d'amibes. A part THIEFAINE, qui écrit encore aujourd'hui comme ceci en France ? Neuf minutes d'intense introspection pour le titre de l'album, bravo Gérard !

Une gratte bien graisseuse embraye ensuite la lancinante "Je tuerai la pianiste", comme pour une vengeance par-delà les dimensions, profession de foi désabusée sur le statut d'artiste, très impressionnante. J'étais à l'époque passé au travers, et oui... Alain était probablement un apache. "Venus" pourrait servir d'épitaphe à l'art de BASHUNG, personne n'aurait su le faire aussi bien avec ses mots - maux ? - que MANSET, avec toujours cette forme de rythmique 'marchée' en forme d'écrin pour des paroles d'exception.

Il reprend finalement un des classiques de MANSET avec "Il voyage en solitaire" qui clôt l'album comme il se doit dans la plus grande simplicité, une belle version qui fait honneur aux deux artistes. L'opus s'achève avec une chanson de Leonard COHEN, popularisée dans l'hexagone par le néo-zélandais Graeme ALLRIGHT, autour de la contrescarpe dans les sixties. Un hommage étonnant tant le répertoire de BASHUNG est éloigné de ceux de ses collègues folkeux. "Suzanne" reste pour moi dans l'escarcelle de Graeme, mais qu'importe, la démarche est cool.

Après L'imprudence, Alain BASHUNG aurait pu choisir 'l'inéluctable' comme titre de son dernier album, posant la base essentielle de l'absurdité existentielle qui nous amène tous au même endroit. On pourrait gloser des heures sur cet art si spécifique, mais si personnel – à opposer en cela à GAINSBOURG qui a beaucoup plagié – de l'artiste français, discret mais d'une rare puissance évocatrice, sobre mais plein d'une créativité foisonnante. Et cet album testament se révèle à la hauteur d'une carrière tout en devers, presque inclassable, à cheval entre la force des compositions oniriques et la beauté des paroles, entre rock et chanson française. A la croisée de son destin, BASHUNG a su transcender la douleur pour imposer une dernière fois sa griffe, avec un talent qui restera dans les annales de l'art musical.

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1. Je T'ai Manqué
2. Résidents De La République
3. Tant De Nuits
4. Hier à Sousse
5. Vénus
6. Comme Un Légo
7. Sur Un Trapéze
8. Je Tuerai La Pianiste
9. Suzanne
10. Le Secret Des Banquises
11. Il Voyage En Solitaire



             



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