Un nouveau THROBBING GRISTLE, à l’époque où ce disque est sorti, me paraissait tellement invraisemblable que je n’ai même pas pris la peine de m’y intéresser. Il faut dire que j’étais débordé sur d’autres fronts – excuse qui en vaut une autre. Une question me taraudait cependant : au-delà de la qualité réelle ou supposée de cet opus inattendu, cette reformation (qui concrètement date de 2004) était-elle nécessaire ?

30 ans se sont écoulés entre le premier album, légendaire s’il en est, et ce Endless Not. Beaucoup d’eau sous les ponts : Chris Carter et Cosey Fanni Tutti se sont, en musique comme dans la vie, parfaitement unis ; Peter Christopherson domine, depuis 1984, le monde de la musique électronique expérimentale sous le nom de COIL ; Genesis P-Orridge, devenu femme entre-temps, est le leader incontesté de la famille PSYCHIC TV. Le but de cette reformation paraît donc pour le moins obscur. Aucun des membres originels n’en avait objectivement besoin (et par 'besoin', j’entends autant l’aspect matériel que spirituel). Mais ils l’ont fait quand même.

"Wow Of Silence" est étonnant non pas forcément en lui-même mais parce que l’auditeur un tant soit peu connaisseur (et âgé, il faut bien le dire) reconnaît, au début du 21ème siècle, un groupe/projet sans le reconnaître tout à fait. Cela dit, et au-delà du clin d’œil à D.O.A, cette ouverture est suffisamment barjo mais contrôlée pour nous garantir un voyage des plus convenables.
"Rabbit Snare" impose immédiatement le respect. Traînante orchestration jazzy sur laquelle Genesis pose un chant mesuré et intelligent. Indéniablement, la réussite de cette galette.
"Separated" commence en beauté, mais finit en queue de poisson, comme un sketch pas tout à fait assumé.
"Almost a Kiss" est un brin embarrassante : la composition est intéressante, mais les vocaux de Genesis sonnent non pas faux, ce qui ne m’aurait pas nécessairement dérangé, mais quelque peu maniérés.
"Greasy Spoon", avec son côte electro granuleux et sous-terrain, relève le niveau façon COIL ou PSYCHIC TV. Pareil pour la suivante qui semble presque un pastiche digital de ce que le groupe avait coutume d’enregistrer dans les années 70.

En fin de compte, on se dit que la meilleure formule de cette troublante reformation est de mélanger les styles propres aux membres du défunt projet TG, le tout avec une très nette ascendance de Peter Christopherson sur le projet, comme en témoigne toute la dernière partie. Le titre éponyme sort son épingle du jeu, certes, mais sans éclats particuliers. Plus surprenant sans être pour autant transcendantal est "The Worm Waits It’s Turn", bien dansant et psychédélique.
Le final, plutôt profond et intime, clôt l’album d’une manière assez optimale tout en laissant l’auditeur gourmand sur sa faim.

Malgré le très savoureux "Rabbit Snare" et, d’une manière générale, une ambiance nocturne et nébuleuse très correctement travaillée, ce disque ne décolle pas aussi haut que sa superbe pochette le laissait entrevoir.

Cela ne me plaît pas de le dire, mais les ex-membres de THROBBING GRISTLE auraient mieux fait de ne pas se retrouver. Du moins pas de cette manière. La 'musique' des pères fondateurs de l’indus n’avait absolument pas besoin d’être réactualisée puisque, par définition, elle est. On me rétorquera qu’elle 'est' ici d’une autre manière. En effet, à la manière de COIL surtout et de PSYCHIC TV aussi. Et c’est précisément ce que je reproche à ce disque : non pas d’être mauvais ou même anecdotique, ce qui était objectivement impossible, mais d’être seulement bon.

En somme, un Music To Play In The Dark Vol.3, avec Genesis P-Orridge en guest.