Des fois comme ça, le destin vous rattrape, ça arrive, le hasard, la chance, appelez-le comme vous voulez, ça arrive. C'est arrivé pour le groupe SURVIVOR qui après deux albums sympathiques n'a pour le moment percé que dans l'indifférence générale du début des superficielles années 80. C'est à cet instant que paraît Sylvester Stallone. Ce dernier cherche une B.O pour son Rocky III, futur blockbuster de l'année 82. Sly échoue dans ses négociations avec QUEEN pour utiliser leur "Another One Bites The Dust" et le voilà en quête d'un hymne pour célébrer son film. Lui-même chanteur à ses heures, il chante la B.O de son film La taverne de l'enfer, grand amateur de soft rock dont son frère Franck est un digne représentant – vous souvenez-vous de "Far From Over" ? -, il demande au groupe SURVIVOR de lui pondre un hymne pour son film.

Après moult pérégrinations, Jim et Frankie donnent enfin naissance au bébé tant attendu. Stallone est ravi, le titre porte en lui la puissance des grands classiques et il ne fait pas le moindre doute qu'il va monter au sommet des charts, portant avec lui les SURVIVOR qui vont enfin exploser à la face du monde. Un titre mi-Hard, pour son grandiose riff d'ouverture, mi-pop pour ses lignes mélodiques mémorables, parfait complément auditif de l'histoire du film, qui voit notre Rocky passer par la case zéro du boxeur pour retrouver l'oeil du tigre et sa revanche. Le flambard est total, un des hits majeurs de 82 qui va passer 6 semaines consécutives au sommet du billboard, ça n'arrive pas tous les jours ! Un standard de l'AOR alors très en vogue aux USA. Dans la mémoire collective de tout un chacun.

L'opus major de SURVIVOR est donc composé autour de ce monstre, mais trois singles vont suivre, il faut surfer sur la vague. "Ever Since The World Began" est lancé à son tour sur les ondes, un slow qui ne présente qu'un intérêt limité et peu d'émotions, malgré un sujet sur la maladie autobiographique pour les membres du groupe. Le suivant "American Heartbeat" remporte une carrière honorable dans les charts, pointant à la 17eme place, à la base un beat AOR de synthé rigide, mais un refrain trop répétitif à mon goût. L'opus penche plus que précédemment vers le hard rock, laissant les tentations mainstream un peu de côté pour un aspect plus rentre-dedans, c'est visible sur le dernier single "The One That Really Matters", même si les choeurs restent très présents. Dommage de n'avoir pas transformé l'essai du titre éponyme.

Le reste rappelle la carrière passée du groupe. Rien de phénoménal, mais toujours une musique sympa et rythmée. "Feels Like Love" est un agréable hard rapide aux choeurs pop, marque de fabrique du groupe. Nous avons du gros riff à la AC/DC sur "Hesitation Dance", avec un refrain libérateur de belle tenue, et un Dave qui assure bien les cachous sur un chant très agressif. On retient le joli bridge de "I'm Not That Man Anymore" et la belle ambiance sur la martiale "Children Of The Night", certes un peu simpliste, mais très révélatrice du soft-rock pratiqué alors. Enfin, "Silver Girl" mixe allègrement piano, guitare acoustique et distorsion, et un joli solo de guitare, pour les amateurs de soft-rock.

Bien entendu, l'album ne vaut que pour la présence – mais alors quelle présence ! - de "Eye Of The Tiger", phénomène de l'année 82 et B.O de l'essentiel Rocky III pour les ados de ma génération. Ce son de guitare sur le riff d'intro, quelle merveille tout de même ! Ensuite, la question se pose de savoir quelle note apposer à un tel opus. Clairement, nous restons sur un trois en terme de qualité générale, surtout après des singles plutôt foireux et inutiles. Il convient certes de positionner un distingo quant au morceau éponyme, tant il est d'importance au regard de l'histoire de la musique populaire, mais le quatre me semble trop éloigné pour être atteint. Je reste donc sur un 3,5 qui ne donnera guère d'indication au lectorat. A voir avec le temps et en fonction de l'humeur. Pour SURVIVOR en revanche, des millions d'albums vendus et le stardom international !