Dans ma mémoire, Lights… Camera… Revolution ! (1990) était sans conteste l’album de référence de SUICIDAL TENDENCIES, de loin leur disque le plus efficace. Quelle ne fut donc pas ma surprise en exhumant The Art of Rebellion, qui n’était dans mes souvenirs qu’une suite un peu inégale et sans surprise de son illustre prédécesseur, de me trouver confronté à un disque dont la vigueur et le charme ne m’étaient pas apparus aussi évidents à l’époque. Cette prise de conscience commence avec le son : puissant, dynamique, riche. Il porte et transcende le Heavy metal groovy du quintet de Venice, en permettant aux compositions, dans l’ensemble très bonnes, d’apparaître sous leur meilleur jour.

Les compositions, à l’image de celles qu’avait proposées le groupe dans son album précédent, se révèlent très variées. Si le Punk hardcore des débuts n’est plus qu’un lointain souvenir, le nouveau style de prédilection du groupe, à savoir un Heavy metal mélodique et très rythmé, se voit bonifié et enrichi de sonorités et d'ambiances chamarrées et diverses. Et c’est cette alliance, si heureuse, de douceurs mélodiques et de riffs puissants qui fait l’intérêt et le charme de ce disque. Cela se ressent au travers des guitares : car si celles-ci savent balancer des riffs aussi acérés que solides, leur sonorité est la plupart du temps si cristalline que les alternances avec des ambiances plus suaves se fait tout en douceur, presque naturellement.

Il en va de même avec le chant de Mike Muir qui parvient à allier un timbre de voix globalement assez feutré avec un phrasé qui, par moments, adopte des accents vindicatifs. Cela donne un mélange assez unique, né de l'union d’une voix manquant un peu de coffre et d'un flow capable de faire preuve d’un bellicisme impressionnant. Cette dualité s’illustre à merveille dans le morceau d’ouverture, "Can’t Stop", probablement un des plus beaux exemples de ce que SUICIDAL TENDENCIES peut nous pondre lorsqu'il est en grande forme : imparable, il nous fait voyager telle une montagne russe au travers de sentiments, de rythmes et d’ambiances variés. Mais ce titre est loin d’être le seul bijou que renferme cet écrin qu’est The Art of Rebellion. On peut également mentionner l’excellent "Monoploy of Sorrow", dans lequel les guitares sèches et le violoncelle servent de rampe de lancement à de furieuses cavalcades. Ou bien les totalement opposés "We Call This Mutha Revenge", agressif et puissant, et "Nobody Hears" tout en douceur et en progression.

Mais, à bien y regarder, tous les morceaux réunis ici sont terriblement efficaces et intéressants. En 1992, SUICIDAL TENDENCIES nous a pondu un classique qui résiste très bien aux outrages du temps et dont l’un des seuls défauts est peut-être à chercher du côté d’une pochette qui ne brille pas par sa finesse. On s'en remettra tant le reste est jouissif.