Pour son troisième album et grand classique, le groupe irlandais PLANXTY retourne à Londres, comme c'était le cas en 1972, au studio Sarm de Whitechapel et toujours sous la direction de Phil Coulter, avec distribution par Shanachie Records, pour la dernière fois avant un 'break' important. Par la suite, les enregistrements seront beaucoup plus locaux, réalisés directement à Dublin.
Avec ce disque, PLANXTY cesse d'être un quartet, même si Johnny Moynihan, maître du bouzouki et principal moteur de l'introduction de cet instrument grec en Irlande une décennie plus tôt, à qui donc Andy Irvine comme d'autres doivent beaucoup, ne fera pas long feu.

Comme d'habitude, les influences fortes des différents membres se rejoignent et sont bien mises en valeur, dès le premier morceau "Johnny Cope", chanson guerrière datant du milieu XVIIIème siècle, à la gloire des Jacobites qui avaient remporté une victoire écrasante en moins de vingt minutes sur l'armée à l'est d'Edimbourgh. Robert Burns, poète et parolier célèbre, a voulu mettre son empreinte sur la composition, mais la plupart des reprises (y compris celle-ci) s'en tiennent à l'originale. Morceau venu d'Ecosse et donc souvent utilisé dans le répertoire de la grande cornemuse, mais Liam O'Flynn et ses uilleann pipes n'en tirent pas moins leur parti pendant un long solo final. Tout aussi remarquables sont le début à la vielle à roue, l'harmonie vocale collective sur de grands accords et la marche épique.

Après ce début celtique en puissance, Andy Irvine colore l'ensemble ainsi qu'il aime le faire en proposant des détours dans les Balkans. "Băneasa's Green Glade" est une suite passionnante débutée en complainte chant-harmonium-bouzouki, avant des parties instrumentales founies en arpèges qui nous conduisent avec frénésie dans les forêts roumaines. À sa suite, "Mominsko Horo" apporte le sel de la chanson engagée.
Si l'alchimie entre le maître Moynihan et l'élève Irvine trouve ici des moments de grâce, ceux-là sont en proue, même si Dónal Lunny y est également pour beaucoup. Tout aussi riche en beautés et en arrangements similaires, "The Green Fields of Canada" permet à Liam O'Flynn de rejoindre ses collègues pour un final en finesse. Et toujours sur le nouveau continent, "The Lakes of Pontchartrain" a eu beau être maintes fois reprises, notamment par un Paul BRADY très inspiré, cette version crépusculaire par Christy Moore demeure difficile à égaler.

"Cold Blow and the Rainy Night" a beau être un des traditionnels favoris par les folkeux celtisants en ces années 70 (STEELEYE SPAN l'a également reprise trois années plus tôt), une fois encore les harmonies des membres de PLANXTY font mouche, tout comme leur 'swing', même en lenteur. Les instrumentaux, suite de polkas, jigs et reels proposées sur ce disque, offrent de belles joutes ou camaraderies de ce point de vue. Et le tout d'être complété par un poignant "'P' Stands For Paddy, I Suppose", élément de choix dans les ballades organiques et appels à la danse entremêlés.
Une fois encore, PLANXTY offre ce qu'il y a de mieux à la musique irlandaise élargie et teintée d'exotisme en ces années fastes. Un essentiel à avoir comme les précédents, en attendant la suite !