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- Style : Silver Apples
- Style + Membre : David Vorhaus , Derbyshire / Hodgson

WHITE NOISE - Re-entry (1980)
Par NANAR le 27 Mai 2023          Consultée 257 fois

Cinq ans après l'excellent Concerto For Synthesizer (1975), le compositeur-ingénieur David 'White Noise' VORHAUS rempile pour un troisième album. Dans la lignée des Albedo 0.39, The Tomita’s Planets et autres Zeit, David VORHAUS a cette fois choisi de conférer un concept bien précis à son album : l’espace. La liste des titres et les quelques notes de l’album nous laissent comprendre que cet album dépeint l’aller-retour d’un astronaute dans l’espace intersidéral.
L’album est organisé en deux longues plages de vingt minutes chacune, bien que subdivisées en de nombreuses sous-parties. Le casting est des plus attirants : en plus du synthé EMS VCS3 et du Kaléïdophone, nous trouvons de nombreux synthétiseurs plus modernes, parmi lesquels rien de moins que le Fairlight CMI, alors réservé à une maigre niche de compositeurs fortunés. Re-Entry s’annonce dès lors très prometteur.

Promesse non tenue, hélas. D’abord, l’ensemble est bien trop disparate. David VORHAUS semble ne pas vouloir trancher entre développements mélodiques bondissants dans la continuité du précédent album (l’enchaînement "Lift Off" - "Afterburn" - "Burn 2"), paysages sonores planants ("Deep Space Drift", "Disorientation") ou plus séquencés ("Meteor Storm", "Nine Dimensions", "The Cygnus Constellation"), ballades en apesanteur ("Orbit", "Time Traveller"), et même des chansons ("Leaving Song", "Black Hole Blues") !
Vouloir superposer les registres n’est pas un défaut en soi, les deux premiers WHITE NOISE reposent même sur ce principe, avec réussite. Mais ici, la sauce ne prend pas car les mélodies s’enchaînent sans valeur ajoutée, sans qu’on n’ait vraiment le temps d’y accrocher. Par-dessus le parché, de nombreuses pistes sont fondues et enchaînées ensemble, mais ça n’apporte strictement rien, voire ça gâche certains des quelques bons passages de l’album. En particulier, l’enchaînement de "Deep Space Drift", "Meteor Storm", "Disorientation" et "Time Traveller" est particulièrement mal fichu et frise le coq-à-l’âne. En bref, l’ensemble Re-Entry est inférieur à la somme de ses parties.

Ensuite, la thématique de l’album. De ce point de vue, Re-Entry ressemble à un scénario de S-F de série B, relativement ambitieux, de bonne volonté, un peu fait de bric-et-de-broc, mais surtout naïf. Rien que la pochette annonce la couleur. David VORHAUS a eu l’idée géniale de parsemer des bruitages de circonstance dans tous les recoins au lieu de laisser la musique parler d’elle-même. On se retrouve donc régulièrement avec des nappes de bruit blanc figurant le vaisseau s’arrachant de l’attraction terrestre puis sillonnant l’espace, mais aussi des piou-piou électroniques comme sur "Meteor Storm" et "Nine Dimensions", et un bruit d’aspiration (pas d’aspirateur) sur "Black Hole Blues".
Re-Entry est une vaste caricature des albums-concept instrumentaux : tout y est d’un premier degré affligeant ! Le début de l’album en est une démonstration édifiante : des conversations d’astronautes (sans doute piquées aux archives de la NASA), un décompte avant le décollage, hop on s’envole, et des voix vocoderisées qui annoncent les différentes phases de fonctionnement des moteurs du vaisseau.

Enfin, les compositions en elles-mêmes. Outre ses styles dépareillés, Re-Entry accuse une sérieuse carence mélodique. Dès son troisième album, David VORHAUS peine déjà à se renouveler. Le passage le plus rythmé de l’album, dominé par le Kaléïdophone, s’étendant sur "Lift Off", "Afterburn" et "Burn 2", ressemble trop au Mouvement III du Concerto Pour Synthétiseur, voire sonnent comme des chutes de studio remises au goût du jour. "Countdown" nous refait les coups d’orchestre comme dans le Mouvement I, mais l’effet de surprise ne prend pas deux fois. L’enchaînement "Space Warp", "Voices" et "Heavy Breathing" tombe également dans la redite de ce même album. Il y a même un repiquage au sein de Re-Entry : "Disorientation" est "Nebulous Meets Nebula" passé à l’envers. Il s’agit peut-être d’une volonté de David VORHAUS de structurer son album par un retour de thème, mais ça ne suffit pas à compenser le foutoir général.
Ah oui, et parlons des deux chansons du lot qui, en plus d’arriver comme une castagnette dans le potage, sonnent comme un hommage raté à An Electric Storm – ce que confirme la pochette. Autant "Leaving Song", chantée par un certain Pete Brown (qui ne semble rien avoir fait d’autre), est acceptable parce que courte et entraînante, autant "Black Hole Blues" est d’une nullité abyssale! Ce morceau, qui tient lieu de single potentiel de l’album, est une horrible bouillasse sans queue ni tête. David VORHAUS y chante complètement faux, accompagné de choristes qui n’arrangent pour ainsi dire pas grand-chose. Tiens, en parlant de nanar, cette chanson est un peu la chorégraphie des spationautes dans leur vaisseau, à moitié bourrés dans des combinaisons en skaï, en mousse et en papier alu. Un bruit de chasse d’eau achève de nous convaincre que cette chanson est un gag. Encore heureux.
D’autres morceaux lorgent des œuvres préexistantes : "Deep Space Drift" et "Orbit" sont du Gustav HOLST mal digéré, s’inspirant respectivement de "Mars : The Bringer of War", "Venus : The Bringer of Love". "Voices" contient également une brève citation de "Jupiter : The Bringer of Joy". Le riff lunaire de "The Cygnus Constellation" rappelle l’album Games (1979) de SYNERGY. "Time Traveller" est un vulgaire pastiche de "Équinoxe 7" de Jean-Michel JARRE, la rythmique en est même quasiment un plagiat, c’est pitoyable.

Que reste-t-il donc dans ce barnum mal embouché ? Globalement, la seconde face est meilleure que la première car plus cohérente, avec des enchaînements mieux pensés – hormis bien sûr "Black Hole Blues". On peut affirmer que les trois derniers morceaux sont les meilleurs de l’album – hormis bien sûr les trois "Splashdown". Citons "Nine Dimensions", plus long morceau de l’album avec près de six minutes et demie – attention, sur l’édition CD, la dernière minute de ce morceau est indûment incluse dans la piste suivante, "Nebulous Meets Nebula". "Nine Dimensions" et "The Cygnus Constellation" sont plutôt réussis, on y sent de la suite dans les idées qui pour une fois prennent sens sur la longueur, entre la basse pulsée et les traits de Fairlight CMI, malgré les bruitages inutiles. J’apprécie également "Nebulous Meets Nebula" (joli jeu de mots), une mélodie brève mais bien fichue. Enfin, "Meteor Storm" et "Space Warp" ne sont pas désagréables, mais c’est un peu du pilotage automatique… comme la majorité de l’album en fait.
L’album se conclut sur un "Splashdown" en trois parties, absent de l’édition d’origine et très certainement composé après 1980 car largement dominé par le Fairlight CMI. Là non plus, ce n’est pas très mémorable, voire c’est caricatural – les samples d’orchestre et de chœurs sur "Splashdown 2".

Tout ceci n’est vraiment pas terrible. Incohérent, mal inspiré, stéréotypé, Re-Entry est un bel accident de parcours. David VORHAUS qui n’en restera heureusement pas là commencera la même année une fructueuse carrière dans la musique d’illustration sonore, publiant de 1980 à 1993 une petite dizaine d’albums pour les labels anglais KPM et Music De Wolfe.

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   NANAR

 
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- David Vorhaus (synthés, chant de casserolle - titre 14)
- Pete Brown (chant - titre 6)
- Linda Hayes (chœurs - titres 6, 14)


1. Countdown
2. Lift Off
3. Afterburn
4. Burn 2
5. Orbit
6. Leaving Song
7. Deep Space Drift
8. Meteor Storm
9. Disorientation
10. Time Traveller
11. Space Warp
12. Voices
13. Heavy Breathing
14. Black Hole Blues
15. Nine Dimensions
16. Nebulous Meets Nebula
17. The Cygnus Constellation
- réédition 1995
18. Sphashdown 1
19. Splashdown 2
20. Splashdown 3



             



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