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Yves JAMAIT - L'autre (2022)
Par RAMON PEREZ le 16 Octobre 2023          Consultée 470 fois

Tu m’aurais dit que Juliette ARMANET m’aiderait à commencer une chronique, je t’aurais pas cru. Pourtant, au hasard de mes lectures, je suis tombé sur une de ses interviews où elle parle des disques qui sont faits pour trouver une seule chanson. Selon elle, c’est le cas de Vu de l’extérieur de Serge GAINSBOURG, dans lequel on perçoit tous les motifs de "Je suis venu te dire que je m’en vais" en écoutant les autres titres. Je n’avais jamais vraiment réfléchi un album en ces termes, mais cela m’a donné une clé de lecture salutaire au moment de penser le dernier album de JAMAIT. Sinon je t’aurais pondu un texte qui aurait dit en gros "ouais pas mal, mais bon ça commence à se répéter un peu trop et j’ai du mal à m’accrocher ; quelques grandes chansons quand même". Et j’aurais peut-être bien limité ma note à deux. Mais donc, grâce à Juliette, je vois la chose différemment.

Parce qu’ "Une vie". Très grande chanson. Déjà elle dure le double de toutes les autres qui sont pourtant tout à fait conséquentes. Près de dix minutes qui paraissent être un aboutissement, non seulement à ce disque mais plus largement à l’œuvre de JAMAIT. Car si, comme beaucoup d’artistes, le dijonnais brode de longue date autour d’une poignée de thèmes, il y a en a un qui ressort de façon plus visible que les autres depuis le début. Celui du temps qui passe, de la vie qui coule, de l’âge qui avance, de l’homme qui vieillit. Plusieurs textes en reparlent ici, d’une manière ou d’une autre. Mais "Une vie" fait beaucoup plus que ça. Elle fait le point, depuis le début et sur dix décennies. Il y a beaucoup de chansons autobiographiques à écouter, mais une autobiographie en chanson c’est plus rare. Souvent, cet exercice se limite à parler d’une époque révolue (par exemple la tentative d’AZNAVOUR), alors qu’Yves JAMAIT a trouvé comment faire le tour de la question ; c’est ce qui m’impressionne.

Je n’ai pas en tête d’autre exemple à ce point accompli, même si ça doit bien exister. Évidemment, une chanson de dix minutes ça va plus vite qu’un bouquin de quatre cent pages. Alors il faut aller à l’essentiel. Cibler les images, les souvenirs, ce qui a compté. Et notre homme a suffisamment vécu pour en trouver à chacun de ces douze couplets coupés au mot près. Ça sonne juste. D’autant plus que le verbe entre en résonance avec la composition du morceau, la vibration musicale qui lui donne un écho supplémentaire. Une progression, une intensité qui vit au fur et à mesure que le texte se déroule. Le lustre final de ce monument que JAMAIT, artisan de la chanson, a fini par bâtir.

Et donc on peut penser avec madame ARMANET que cette construction imprègne le reste de l’album. Peut-être qu’on ne peut pas sortir un truc pareil sans que cela infuse dans son quotidien et son travail pendant un moment. Au reste, j’ai déjà dit que de nombreux textes abordaient ces notions de temps, d’expérience, de vieillissement. Mais ils semblent chercher quelque chose, ne pas être complets. Même musicalement. Oh c’est toujours très bien fait, bien écrit, chanté, accompagné. Notre homme a du métier, cet album le démontre à nouveau. Pris pour lui-même, L’autre est tout à fait valable. Mais, en connaissant tout le reste, pour moi il manque longtemps un truc. Je l’écoute agréablement, mais je n’en retiens pas grand-chose. Quelques morceaux sont un peu au-dessus, sans que j’en mette un dans mon best-of personnel. Ça tourne un peu en rond, ça manque d’aboutissement. Et puis les premières notes tendues de cet accordéon qui introduit "Une vie" et tout revient, tout s’explique.

D’ailleurs, c’est assez sensible à l’oreille comme le titre qui suit celui-là est libéré de quelque chose. Perpétuant sa tradition de faire une chanson légère avec l’une de ses filles, il arrive enfin à retrouver son côté plus caustique pour une petite chanson qui touche directement au but. Comme si d’avoir réussi à parler de lui avec une telle ampleur lui permettait de s’ouvrir enfin à l’autre que le nom de l’album avait vendu. L’autre, c’est moi ? Je ne sais pas si c’est vraiment le message, mais ça se tient. En tout cas les textes de cet album, à commencer par le morceau-titre, tirent franchement vers un versant philo (ce n’est du reste pas la première fois, voir Amor Fati). Ce qui me fait dire qu’il est fort possible que je les comprenne mieux, et cet album dans son ensemble avec, lorsque j’aurai encore un peu plus avancé dans ma vie. On s’en reparle dans vingt ans.


Petite anecdote supplétive : l’autre jour, dans un covoiturage quelconque, une radio du genre de celles que je n’écoute jamais. Et un morceau d’une jeune pousse tricolore construite sur un principe similaire d’ "Une vie". J’ai quinze ans, j’ai seize ans, etc… Ne comparons pas ce qui ne peut l’être, on aurait rapidement un regard de vieux con. Simplement ça m’a fait sourire. Parce qu’après la version de JAMAIT, celle-ci s’arrêtant à 25 ans prête à sourire. A cette jeune pousse aussi, j’ai envie de dire rendez-vous dans vingt ans.

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   RAMON PEREZ

 
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