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- Membre : The Who

Pete TOWNSHEND - Psychoderelict (1993)
Par MARCO STIVELL le 23 Octobre 2023          Consultée 392 fois

Le dernier album solo de Pete TOWNSHEND remonte à 1993. Trente ans cette année donc, ce qui fait trèèèès loin pour le boulimique de créativité qu'il a été dans sa jeunesse. Certes, des projets, il y en a eu, dont deux albums en compagnie des WHO, mais tout de même, clairement dans sa carrière, on note un avant et après le début des années 90. Et, au beau milieu, un Psychoderelict à l'échec plutôt retentissant !
C'est pourtant un album-concept renouant avec la tradition instaurée par celui qui reste le père du genre, et qui n'en avait pas fait de tel depuis Quadrophenia (1973), ses idées similaires suivantes étant éparpillées, disparates ou alors différentes comme la comédie musicale The Iron Man à la fin des années 80. Et ce qui a désarçonné presse comme public, c'est l'aspect 'radiophonique' que lui a donné TOWNSHEND, avec des 'annonces narratives' et des conversations régulières des personnages du récit (qui est, de base, une nouvelle écrite par le guitariste), entre les morceaux mais aussi parfois carrément dessus ! Cela ne change guère cependant quand, pour pousser les ventes, sort une version expurgée des éléments radio, qui n'obtient guère plus de faveurs...

L'histoire en fil conducteur est celle d'un certain Ray High, rockstar anglaise des 60s ayant perdu l'inspiration et n'ayant plus de ressources pour vivre. Son manager Rastus veut le pousser à s'y remettre mais faute d'y parvenir, demande de l'aide à Ruth, une journaliste critique virulente de notre Ray. Celle-ci ne trouve rien de mieux qu'écrire à ce dernier des lettres en se faisant passer pour Rosalind, une groupie de quinze ans en situation d'échec artistique elle aussi, qui l'écoute, lui envoie une photo d'elle nue et arrive à l'accrocher plus que de raison. Petit à petit, elle l'aide ainsi à retrouver du poil de la bête, l'inspiration : il lui envoie même une chanson écrite pour elle. Petit retournement : Rastus et Ruth couchent ensemble et elle décide de dénoncer publiquement Ray pour ses moeurs des plus contestables, ce qui fait flamber ses ventes d'albums à lui, réédités par Rastus. Tandis que ce dernier se frotte les mains, Ruth enregistre la chanson écrite pour 'Rosalind', qu'elle défend dans sa presse et qui devient un tube énorme. Au moment de rencontrer sa dulcinée dans un bar, Ray ne voit que Ruth et découvre le pot-aux-roses. Désabusé, il lance, avec un ton hippie parssé au vitriol, que le naturel s'est perdu avec les choses profondes, que l'apocalypse est proche. Magouilles et manipulations ne datent pas de la fin du XXème siècle, certes mais il est amusant que Psychoderelict, nourri de cela ainsi que de la vie de TOWNSHEND lui-même et son propre cynisme à ce sujet, précède de quelques années la démocratisation d'Internet, des forums/sites de rencontre/réseaux sociaux et compagnie... Bref, album mineur donc ? Vraiment ?!

À propos de radio, le premier single choisi est "English Boy", choix logique pour l'Angleterre parce qu'on y entend bien le Blues Rock des rues à briques rouges, un petit effet optimisme à la californienne mais qui se heurte aux murs et poteaux de Londres, avec un feeling hip-hop des débuts perceptibles dans la rythmique et la hargne vocale bavarde de Pete TOWNSHEND. Ce dernier a bien affûté sa guitare, bref tout est parlant pour le fan des WHO 'or not', malgré les dialogues intempestifs (que je ne considère pas gênants pour autant, ni là ni après). La reprise en final d'œuvre et le solo étiré sont bien balancés. Toutefois, en termes d'efficacité, on aurait pu mieux choisir "Let's Get Pretentions" (le plan de Ruth et Rastus), excellent titre rugueux aux guitares syncopées survolées par un lead/slide en son clean. Il y a d'autres chansons solaires et bien façonnées, comme "Don't Try to Make Me Real" et "I Want A Thing" (les lettres entre Ray et Ruth/'Rosalind' incarnée par la voix sexy de l'actrice Jan Ravens), voire "Now and Then", son chant plaintif sur la différence d'âge et son ambiance désert/grands espaces américains. De grandes chansons, parcourues de la voix, des guitares et bidouillages de TOWNSHEND, d'une rythmique imparable (Mark Brzezicki forever mais aussi Jody Linscott et pour certaines guitares, Phil Palmer) et de bonnes idées à foison, même avec le sous-mixage régulier entraîné par les interventions.

Il y a des transitions instrumentales rattachées à l'ancien gourou de TOWNSHEND, Meher Baba, que l'intéressé traite désormais avec une certaine distance. Toutefois, il s'en sert comme au moment du projet avorté Lifehouse pour les WHO et dans les années suivantes, quand il a récupéré certaines parties pour des chansons de Who's Next (1971) et même la célèbre "Who Are You", samplée ici sur "M4". De même, les cordes-synthés de "Vivaldi" rappellent fortement Quadrophenia (1973) et la gigue-reel de "Baba O'Riley" est citée au moment du dénouement amer. Bref, notre concepteur dérangé ne manque pas d'idées, même pour un titre simplement funky comme "Fake It" où il scatte joliment pour terminer, sans parler de l'étonnant "Outlive the Dinosaur", comme si "Diavolo in Me", le madison endiablé de ZUCCHERO, l'avait inspiré. D'un autre côté, la pop aérienne et rêveuse splendide de "I Am Afraid", le trucker-rock glorieux qui ouvre "Early Morning Dreams", mais le morceau qui nous transporte le plus est "Flame", la fameuse chanson de Ray pour Rosalind, une ballade 80s avec nappes, magistrale et portée par l'excellente choriste Tessa Niles avec quelques touches de MADONNA dans ses meilleurs jours. En tout, 1 heure et 3 minutes de plaisir 'exigeant'.

Le processus de création s'est révélé plus long que prévu car TOWNSHEND avait cassé son poignet lors d'un accident de vélo, mais c'est une toute autre blessure qui, peut-être, le marque à jamais dorénavant (?), suivant un double voire triple échec avec, conjointement à l'adaptation de Quadrophenia à Broadway, celle de Psychoderelict qui échoue totalement, comme l'album. Pourtant, il y avait de beaux moyens et musiciens à l'instar du studio (Palmer, 'Rabbit' Bundrick, Pino Palladino, Simon Phillips en lieu et place de Brzezicki, Tessa Niles substituée par sa copine Katie Kisson), tout cela est vraiment regrettable, non-mérité ! Le génie torturé finit donc par s'endormir, ne se réveillant qu'au milieu des années 2000 pour un concept réservé aux WHO et discutable cette fois puis presque quinze ans plus tard pour un nouvel effort en groupe, brillant mais au format nettement plus simple. 1993 est donc, à ce jour, la dernière marque de sa toute-puissance sur le rock qui va plus loin et avec raison.

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   MARCO STIVELL

 
  N/A



- Pete Townshend (chant, guitares, claviers, programmations)
- Phil Palmer, Simon Townshend (guitares)
- Jaz Lochrie (basse)
- Mark Brzezicki (batterie)
- Jody Linscott (percussions)
- John 'rabbit' Bundrick (claviers)
- Tessa Niles (chant, choeurs)
- The Kick Horns (cuivres)


1. English Boy
2. Meher Baba M3
3. Let's Get Pretentious
4. Meher Baba M4 – Signal Box
5. Early Morning Dreams
6. I Want That Thing
7. Dialogue Introduction To Outlive The Dinosaur
8. Outlive The Dinosaur
9. Flame – Demo
10. Now And Then
11. I Am Afraid
12. Don't Try To Make Me Real
13. Dialogue Introduction To Predicable
14. Predictable
15. Flame
16. Meher Baba M5 – Vivaldi
17. Fake It
18. Dialogue Introduction To Now And Then – Reprise
19. Now And Then - Reprise
20. Baba O'riley – Demo
21. English Boy – Reprise



             



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