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The CHURCH - Starfish (1988)
Par PSYCHODIVER le 28 Mars 2024          Consultée 631 fois

Trois ans se sont écoulés depuis l'ensoleillé Heyday. Une première pour THE CHURCH qui jusqu'alors enchaînait les sorties à intervalle régulier d'une année. À la décharge de l'Église kilbeyienne, les déboires en matière de maisons de disques se sont enchaînés avec une cadence aux allures de complot destiné à la torpiller. Coup sur coup, la Warner et EMI l'avaient jeté à la rue, tandis que la branche britannique de la dernière citée refusait de miser quoi que ce soit sur les confesseurs de Sydney et que Carrere était moribond. Résultat : trois ans de stagnation et un échouage dans cette maudite Californie jusque dans la cité des anges (déchus). Avec tous les excès que pareille expérience implique (syndrome RED HOT CHILI PEPPERS, Dieu que ces types sont écoeurants !). Le quatuor qui jusqu'alors avait su triompher des tensions et des écueils divers se retrouvait au plus bas. Richard Ploog, le discret batteur, ne se sentait plus chez lui au sein d'une Église en totale décadence et aux prises avec les drogues dures après plusieurs années de consommation de simples plantes. Une issue fatale attendait les Australiens.

Dieu merci, c'était sans compter un manager dévoué qui parvint à s'accorder avec le label Mushroom en Australie et Arista pour le reste du monde, afin de donner une seconde chance à sa poule aux oeufs d'or. Le contrat signé, le quatuor s'offre les services d'un duo de producteurs, Greg Ladanyi et Waddy Wachtel, deux pointures orientées west coast à la polyvalence accomplie. Le choix s'est porté en priorité sur Ladanyi en raison de son travail sur les opus solo de Don Henley, dont les "Boys Of Summer" ont su retenir l'attention des confesseurs aussies. Si ce n'est pas tant la LinnDrum un tantinet datée qui a marqué l'Église kilbeyienne, c'est bien l'ambiance crépusculaire mais jamais désespérée de la chanson de l'ex-EAGLES qui a en revanche légitimement su rester dans les mémoires de Steve et co'. Starfish, quatrième et dernier volet de la quadrilogie essentielle de THE CHURCH, sera donc un opus gorgé de spleen mais sans une once de nihilisme. Un album en forme de rétrospective presque filmique (ces visages sur pellicule en guise de pochette) de la première vie du groupe également, entre velléités punks, cold wave et psychédéliques réunies sous une bannière alternative.

Commençons par évoquer le tube des tubes. Qui dit Starfish dit : "Under The Milky Way". Qu'importe la confidentialité impénétrable de THE CHURCH, vous avez forcément ce morceau qui erre dans un recoin de votre esprit. Quiconque a été marqué à vie au cinéma par le périple quasi christique d'un certain Donnie Darko se souvient d'une soirée d'octobre 1988 où le monde a failli basculer, avec comme B.O la complainte d'une bande de poètes maudits australiens. Des arpèges acoustiques immédiatement mémorisables, un refrain planant et rêveur tout en demeurant terre à terre, une envolée d'inspiration celtique, des textes à faire pâlir de jalousie Robert Smith, une fin aérienne exécutée à la wah-wah : tel est l'archétype du morceau alternatif 80's intemporel que Steve, éternel remonté contre l'industrie du disque, n'hésitera pas à qualifier de plat, de stérile et d'accumulation de poncifs face au succès planétaire du titre (pourtant composé par ses soins et avec Karin Jansson, sa petite copine du moment). Cruel hasard que de savoir que ce qui restera aux yeux des masses la chanson majeure du combo n'aura pas été enregistré par le quatuor légendaire. Richard Ploog n'ayant pas trouvé l'inspiration (ou son jeu ne correspondant pas au résultat escompté), fut exceptionnellement remplacé par le requin de studio Russ Kunkel. Signe avant-coureur des décisions à venir du batteur qui répond néanmoins présent sur les neufs autres pistes de ce cru 88.

Attention toutefois, ne prenons pas "Under The Milky Way" comme l'arbre cachant la forêt. L'immense succès de Starfish n'aurait pas été légitime si dû à la présence d'un seul morceau grandiose. Le spleen le plus envoûtant coule à flot le long d'une "Destination" désabusée au possible mais étrangement chaleureuse, le courant s'accentuant sur un "Blood Money" qui aurait pu figurer sur "Heyday" si ce dernier s'était déroulé durant un automne pluvieux. Sur "Lost", la lumière réapparaît, bien que légèrement blafarde. Mais comme le disait si bien Morrissey : life is very long when you're lonely, la solitude est un art de vivre. Reste que l'existence à Los Angeles relève du purgatoire plus que d'autre chose. "North South East & West", règlement de compte enlevé et caustique entre les quatre prêtres de Sydney et la mégalopole californienne, n'épargne pas la superficialité aliénante, le consumérisme en phase terminale et le clinquant roi de cette poubelle à l'échelle d'une planète qu'est la côte ouest des États-Unis (bon vous l'aurez compris, si un jour je m'aventure outre-atlantique, il y a plus de chance que vous me croisiez dans l'Utah ou la Louisiane, fuck the west coast). Le rock au sens agité du terme s'invite sur "Spark" où le chant hargneux de Marty fait mouche. S'en suit "Antenna", où la composition que les CRANBERRIES auraient rêvé posséder dans leur répertoire. Tandis que "A New Season", chantée par Peter, évoque le U2 de The Joshua Tree, dans une conception cette fois-ci convaincante et jamais prétentieuse. Restent deux pièces maîtresses entre lesquelles subsiste une rude concurrence pour la palme de meilleur morceau du disque. "Reptile". Le mythe. Son riff anthologique et délicieusement psyché (Marty est au top), sa batterie typiquement post punk d'inspiration JOY DIVISION, ses claviers vaporeux cold dream goth, son refrain qui peut largement prétendre au titre du plus addictif jamais écrit, son outro en forme de cascade de guitares vertigineuse (elle atteindra des sommets indescriptibles en live) : bienvenu dans une ambiance nocturne passée à travers un filtre violet où vous serez à la merci d'une sublime créature dont le corps (cheveux longs compris) est aussi ensorcelant que truffé de pièges mortels (tout amateur de japanime old school qui s'est déjà trouvé en face d'un anime de Yoshiaki Kawajiri comprendra où je veux en venir). Mais déjà l'aube pointe à l'horizon. Une nouvelle journée commence sous une fine averse. Peu importe cette grisaille. L'espoir en l'avenir n'a pas disparu. Le bonheur est possible. C'est sur les réflexions très lynchiennes dans l'âme exposées par la superbe "Hotel Womb", autre exemple de quintessence du style des Australiens, que se referme Starfish. Les guitares pleuvent en harmonies à tomber par terre alors que Steve n'a peut-être jamais aussi bien chanté que depuis The Blurred Crusade et "Almost With You". Et que dire là encore du refrain ? Somptueux.

En cette fin des années 80 où le riffing musclé et l'électricité rageuse ou apaisée reprennent leurs droits, THE CHURCH n'accusait ni décalage ni sortie de route. Plus authentique qu'un Disintegration surproduit et suffisamment organique pour rivaliser avec des Surfer Rosa, des Bleach et des Daydream Nation, Starfish permettait aux prélats de l'outback de quitter la décennie de plastique avec un autre grand disque incontournable, jalon du rock underground contre lequel les agressions du temps et des modes seraient vaines. Ainsi s'achevait la quadrilogie sacrée de THE CHURCH. La suite de la carrière de l'Église comporterait bien des grands moments encore. Mais aucun d'entre eux ne pourrait rivaliser avec la poésie et l'unité à toutes épreuves de cette saga extraordinaire.

PS : pour les néophytes qui n'auraient toujours pas vu l'excellent et légitimement culte "Donnie Darko", vous n'avez pas idée de la chance que vous avez. Foncez donc.

𝘐 𝘥𝘳𝘦𝘢𝘮 𝘐'𝘮 𝘴𝘢𝘧𝘦 𝘪𝘯 𝘮𝘺 𝘩𝘰𝘵𝘦𝘭 𝘸𝘰𝘮𝘣...

𝘚𝘰𝘧𝘵 𝘢𝘯𝘥 𝘴𝘰𝘶𝘭 𝘮𝘢𝘥𝘦, 𝘪𝘵'𝘴 𝘢 𝘸𝘰𝘯𝘥𝘦𝘳𝘧𝘶𝘭 𝘳𝘰𝘰𝘮...

𝘐 𝘸𝘪𝘴𝘩 𝘐'𝘮 𝘣𝘢𝘤𝘬 𝘪𝘯 𝘮𝘺 𝘩𝘰𝘵𝘦𝘭 𝘸𝘰𝘮𝘣...

𝘚𝘭𝘪𝘱 𝘵𝘩𝘳𝘰𝘶𝘨𝘩 𝘵𝘩𝘦 𝘤𝘳𝘢𝘤𝘬, 𝘵𝘰 𝘵𝘩𝘢𝘵 𝘸𝘰𝘯𝘥𝘦𝘳𝘧𝘶𝘭 𝘳𝘰𝘰𝘮.

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- Steve Kilbey (chant, basse, claviers)
- Peter Koppes (chant, guitare)
- Marty Willson Piper (chant, guitare)
- Richard Ploog (batterie)
- Russ Kunkel (batterie)


1. Destination
2. Under The Milky Way
3. Blood Money
4. Lost
5. North South East & West
6. Spark
7. Antenna
8. Reptile
9. A New Season
10. Hotel Womb



             



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