Autant l'activité musicale d'Ariana GRANDE entre 2012 et 2020 s'est révélée plénière avec une bonne moyenne de six albums, dont trois en trois ans un peu avant la pandémie, autant depuis cette dernière, elle a bien levé le pied, s'autorisant de la diversification d'activités. Actrice depuis longtemps, elle multiplie les apparitions de nouveau et, en 2021, comme d'autres chanteuses américaines de son calibre, elle lance sa propre marque de cosmétiques, REM Beauty. À côté de cela, elle a passé la mauvaise période internationale aux côtés de Dalton Gomez, un agent immobilier devenu son époux, mais dont elle a divorcé dans le courant de l'année 2023.

En 2018, elle avait eu l'occasion de figurer dans un épisode de la série Kidding aux côtés de la star porteuse Jim Carrey. Cause à effet ou non, on ne peut que remarquer une nouvelle filiation par rapport au titre de l'album choisi pour son numéro sept, à savoir Eternal Sunshine, hommage évident car raccourci pour Eternal Sunshine of the Spotless Mind, un des meilleurs films des années 2000, porté par le tandem Kate Winslet-Jim Carrey. Pour beaucoup de critiques, alors que GRANDE parle d'introspection personnelle, des problèmes de comportements durant une période de souffrance, beaucoup de critiques y voient bel et bien le divorce en trame sous-jacente.

Quoiqu'il en soit, Eternal Sunshine permet à l'intéressée non seulement de revenir en fanfare (elle truste déjà le top des plus grands charts, et pas seulement U.S.A.) mais aussi de quitter sa période trap (2018-2019) pour revenir en terrains pop/r&b plus ouverts, ce qui n'est point pour déplaire. Ariana GRANDE est âgée de 31 ans désormais ; il s'agit bel et bien d'un nouveau cap pour elle (non, on ne vous dira pas le mot qui rappelle le baccalauréat version Suisse), mais en matière de séparation, ce n'en est certainement pas une sur le plan musical. Son producteur principal pour ce projet, Max Martin, la 'grosse légume' de toutes ces demoiselles à travers leurs tubes (SPEARS, PERRY, GRANDE, SWIFT...), l'accompagne depuis dix ans et l'album My Everything, trouvant ici une présence au moins aussi forte que sur le suivant, Dangerous Woman (2016). Et le second régulier, Ilya Salmanzadeh, c'est pareil, ou pas loin.

La pochette, extrêmement sobre et touchante, nous fait apprécier la décoloration de cheveux pour un temps, ce qui n'est pas peu dire, et annonce un album fait de beauté sensuelle voire subtile. Ariana GRANDE ne ment pas : s'il n'y a pas de méga-tube moderne aussi avenant que "One Last Time", resté inégalé durant sa carrière à ce stade, l'ensemble se tient très solidement. Et grâce à quoi ? D'abord une allure légèrement conceptuelle donnée par cette "Intro (End of the World)", dans des tons bleus post-rupture mais également cosmiques (cette guitare chorus, un pur régal), détail complété plus loin par l'intervention de l'astrologue Diana Garland lors du monologue de "Saturn Returns Interlude". Pour le caractère personnel, c'est enfin la grand-mère d'Ariana que l'on entend sur "Ordinary Things" qui termine l'album, puisque les featurings ne sont que sur l'édition bonus.

Les deux singles porteurs sont "Yes, And?", titre funk-dance qui aurait pu faire un malheur dans les années 90 (rassurez-vous, il marche incroyablement bien à l'heure actuelle), et "We Can't Be Friends (Wait for Your Love)" tout aussi efficace dans son effet synth-pop/rétro dreamy en vogue. Si les deux sont regroupés au milieu de l'album, on ne peut bouder davantage de plaisir à l'écoute de "Bye", petite perle bubblgeum chargée en cuivres et claviers baveux, cheeky et tout à l'honneur de miss GRANDE au chant falsetto toujours aussi savoureux. Rien que le pont suffit à convaincre, mais sachez que ce n'est pas terminé. Aussitôt après, "Don't Wanna Break Up Again", plus lent, est porté par sa douceur vocale avec mélodie adaptée. Les mêmes qualités transcendent le morceau-titre "Eternal Sunshine", pourtant r'n'b des familles qui sonnerait plus basique par d'autres artistes.

S'il est d'ailleurs agréable d'entendre la grande Mariah CAREY pour le remix bonus de "Yes, And?" ainsi que l'Australien Troye SIVAN, défendu par notre Archangel plus loin sur le site, ici en complément masculin à "Supernatural" version bis, ce disque est celui d'une chanteuse parmi les meilleures de sa génération. En soliste, mais pas seulement : ses arrangements n'ont jamais atteint une beauté aussi éclatante. La version normale de "Supernatural" est à préférer pour cela (y compris pour les nappes 80's plus visibles), tandis qu'on se rend compte à quel point "True Story" a-cappella fonctionne mieux qu'avec les instrus.

Vu que la chanteuse parle beaucoup de vulnérabilité, difficile encore de résister à la valse rêveuse et cristalline de "I Wish I Hated You", avec des strats vocales aussi bien marquées que sur "Imperfect for You", merveilleuse ballade r'n'b aux accents folk dans l'âme (une version plus 'guitare-percussions' est d'ailleurs proposée en quatrième bonus, merci bien !). Tant pis si ce sont les titres moins populaires, ils forment la consistance de ce fort joli Eternal Sunshine au même rang que les tubes et autres joyeusetés groovy-dansantes. Son album le plus fin jusque là. Welcome back, Ariana!