La fin du premier siècle de la musique populaire dite 'Rock' et ses nombreux dérivés - tout en vrac – voit l’apparition d’une fusion qui va révolutionner les genres. En tournant dans les eighties avec PUBLIC ENNEMY, les mecs d’ANTHRAX ne pensaient pas provoquer un tel boxon. Pourtant, le Rap d’abord hésitant se met à la page en intégrant des élements métal dans sa musique - voyez ICE-T avec BODY COUNT – et tout ceci débouche au milieu de nineties sur l’apparition du NU Metal, un genre qui fait la part belle au flow dans le metal et qui incorpore de nombreux. LINKIN PARK en est le fer de lance. Il est fondé par le guitariste chanteur Mike Shinoda qui, assisté du visionnaire D.J Joe Hahn, préside aux destinées du groupe. C’est avec l’arrivée de Chester Bonnigton au micro que le groupe perce et devient un acte majeur de L.A.

L’album débute avec "Papercut", le 3ème single, et on comprend d'emblée le concept : le flow de Mike SHINODA qui enrobe les portions vocales chantées avec aisance par Chester Bonnington. De grosses rythmiques qui doivent pas mal à leur aîné KORN. Une gratte qui ne fait pas dans la dentelle mais reste assez discrète au final et se met volontiers au service de la mélodie. Dès le premier titre, le style de LINKIN PARK est posé : la fusion des voix des deux chanteurs se fait pas mal, l’incorporation de nombreux éléments hip-hop est évidente et fonctionne fort bien, on le constate sur un "With You" qui se termine avec une identité pop, alors que "Forgotten" propose un ensemble bien agressif et répétitif, mais semble un des titres les moins marquants de la galette. Une rythmique bien sourde sous-tend "Points Of Authority", où Chester au chant montre toute l’étendue de ses capacités vocales. On continue d’employer la potion magique sur "Runaway", autant boire la coupe jusqu’à la lie, n’est-il pas ?

Evidemment, l’album premier de nos petits malins du park bénéficie de plusieurs singles de haute qualité : voyez donc le chant tout doucereux de Chester sur "One Step Closer" : on pense aussitôt à LIMP BIZKIT, la syncope est là et on a direct envie de sauter sur place tel un petit pois ! Simple et carré, refrain scandé à plusieurs, super addictif. C’est la simplicité de "Crawling" : le chant doux et la tentation pop permanente en font un des classiques de cette livraison. Mais c’est bien entendu la superbe "In The End" qui tient la corde pour la postérité de Hybrid Theory. Ce morceau en forme de mid slow au piano têtu atteint la 2ème place du billboard, une sacrée performance pour un groupe du style, mais telle est la puissance du Nu metal qu’il se permet de truster les premières places des billboards avec ses singles, oui c’est une nouveauté !
On reste dans le domaine de la pop avec "Pushing Me Away" qui aurait pu tenir compagnie à ses quatre conseurs.

"Cure For The Itch" parle pour le hip-hop avec des techniques directement issues du genre. Mais oui, c’est une revendication en droite ligne de Mike qui, on le sait, n’en restera pas là ! C’est un instrumental de fort belle tenue et au ton angoissant. Mike continue d’assurer à merveille les portions rappées des compos, souvent les intros, "By Myself" sort au final de la même boîte de Pandore, puisque tel se révélera ce premier album. Et Mike de rapper sur "A Place For My Head" en compagnie d’une gratte bien allumée, sur un joli chant de Chester. Le sommet de l’opus est sans aucune équivoque "High Voltage". Mike y saisit le micro et balance un flow de toute beauté, avec toute l’assurance de ses 23 ans. La batterie métronomique de Rob et les synthés tristounets de Joe lui donnent une troublante identité, à l’image de ce que SHINODA fera quelques années plus tard avec son projet solo FORT MINOR. Le rap à un niveau génial, nanti de guitares lourdes mais incisives, comme si la fusion du Nu metal prenait ici tout son sens.

Ce premier album s’écoule à plus de 32 millions d’exemplaires, un putain de jackpot pour nos Californiens désoeuvrés. Une ostie sacrée pour la génération des années 2000, celle du 3ème millénaire. Avec elle, viennent les éléments de mal être décrits un peu partout dans cet album, un révélateur de la nouvelle pensée, celle qui ne cache pas ses problèmes. Peut-être le grand classique du nu metal, quelques titres un peu secondaires me forcent cependant à une certaine sévérité, je pose un 4 surpuissant.