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Nick CAVE & THE BAD SEEDS - Wild God (2024)
Par STREETCLEANER le 21 Novembre 2024          Consultée 150 fois

Notre monde est empli de violence, de haine, il retentit du fracas des armes et de volonté de toute puissance destructrice, cela ne semble jamais vouloir s’arrêter. C’est humain, trop humain comme disait le philosophe. On a toutes les raisons de vouloir échapper à cette humanité, toute en laideur, de tenter de la repousser au plus loin, mais quel que soit l’endroit où on pose le regard on la retrouve : désespérant ! On peut envisager de s’isoler, seul avec son chien, notre fidèle compagnon de toujours qui nous comprend tant et avec lequel on fera encore un bout de chemin ; mais si des obligations ou devoirs nous retiennent encore, si cela n’est pas envisageable, ou alors par trop difficile, il nous reste Nick CAVE & THE BAD SEEDS.

Nick CAVE & THE BAD SEEDS, notamment depuis Push The Sky Away, c’est une parenthèse qui s’ouvre, une bulle protectrice, c’est pendant un instant l’oubli du monde qui nous entoure, un lieu de réconfort au milieu du chaos, c’est voguer pendant un temps sur des eaux apaisées et poétiques entre des rives escarpées qu’on se résigne à devoir rejoindre parce que, on le sait bien, on devra accoster.

Sur son 18ème album, Nick Cave nous narre encore des histoires ; si on y prête attention elles mettent quasiment toutes en scène des rencontres ou tentatives de rencontres, peut-être parce qu’il n’y a tout simplement pas d’amour possible sans rencontre de l’autre : un vieil homme et une femme dans "Song of the Lake " (et ce même s’ils n’échangent pas), un ancien dieu à la recherche d’une femme décédée dans "Wild God", un fantôme qui s’invite dans "Joy", le souvenir d'un moment avec l’être aimé "Final Rescue Attempt" (faisant référence à sa femme, Susie, suite à une séparation temporaire), de nouveau un dieu ancien et une jeune femme dans "Conversion", le souvenir d’amis "Cinnamoon Horses", un homme volant (expérience de décorporation ?) dans "Long Dark Night" etc. Cave voit dans ce "wild god" qui parcourt l’œuvre un dieu souffrant, pas un dieu omniscient et omnipotent mais bien un dieu qui est attaché, fiché dans notre monde, fragile et ambigu, possible raison pour laquelle les paroles restent soumises à interprétation, restent entourées d’un halo de mystère, comme peuvent l’être les textes religieux.

La grande force de Nick Cave c’est de nous parler d’amour sans tomber dans la mièvrerie ou des paroles creuses ("Song of the Lake", "Final Rescue Attempt") ; ses narrations, déclarations, sont chargées du sceau des souvenirs, de la poésie, de vulnérabilités, de rencontres réelles ou manquées. Plus que tout autre, il sait nous bouleverser, nous chambouler. Et puis, sa musique est tellement belle qu’elle rend les autres laides, disgracieuses, sa voix tellement chargée de délicatesse, de sensibilité, qu’elle rend les autres distantes ; et sa nostalgie est capable de figer le temps autour de nous (Nick Cave a d’ailleurs tendance à écrire au passé, et insérer des dates du passé dans certains textes, par exemple sur "Wild God"). Oui, Nick Cave est un artiste réellement à part, son Ghosteen a touché tellement de personnes tant il était chargé en émotions, elles sont si nombreuses à avoir avoué pleurer à son écoute… Tout ceci témoigne de quelque chose de si particulier qui touche cet artiste, de facultés rares et exceptionnelles qui nous font nous rapprocher du Ciel.

Ses chansons sont toujours l’occasion de célébrer la beauté, dans "O Vow O Vow" dédiée à son ancienne compagne Anita Lane où il affirme "I can confirm that God actually exists", l’état de grâce "Conversion", le Seigneur "Lord" est d’ailleurs omniprésent puisque Cave lie spiritualité et musique, son esprit parcourt toute l’œuvre, c’est une musique religieuse affirme-t-il, dans le sens où elle est une expérience qui transcende ; "Peace and good tidings He will bring" (Il apportera la paix et les bonnes nouvelles) chante Nick dans le gospel final "As the Waters Cover the Sea", lui qui a enduré le décès de deux enfants, en 2015 et 2022.

Je voudrais ici profiter d’un moment qui m’est accordé pour m’attarder un instant sur cette magnifique chanson qu’est "Cinnamoon Horses", à mon sens la plus belle de l’album, peut-être même de toute sa discographie, particulièrement bouleversante comme le sont "Girl In Amber" sur Skeleton Tree et "Hollywood" sur Ghosteen. Quand on connaît toute la souffrance qu’il a endurée certaines paroles plaintives, portées par un léger vibrato, se révèlent être particulièrement poignantes :

"I told my friends that life was sweet
I told my friends that life was very sweet…"

Alors que lui feront écho peu après des voix dans le lointain, portées par les cloches :

"You said that, You said that, You said that oooh"

Wild God est parcouru de tant de sensibilités musicales, là un piano délicat où quelques notes suffisent ("Joy", "Conversion"), ici des orchestrations de cordes ("Song of the Lake", "Frogs"), il est blindé d’harmonies vocales ("Joy", "Wild God", "Frogs"…) soutenues par l’orchestration. Tout ceci au service de la beauté.

S’agissant du son, des réserves ont été émises, le trouvant trop compressé ; d’ailleurs le groupe a été lui-même dérouté de voir par exemple les cordes noyées dans les synthés, de même pour les chœurs. Ce travail de mixage a été confié à Dave Fridmann, producteur bien connu (The FLAMING LIPS, MERCURY REV, MGMT, TAME IMPALA…) ; au final la majorité des membres du groupe a acquiescé à ce nouveau son, qui "échange l’élégance et la musicalité pour de l’émotion pure".

Difficile également de ne pas penser à Fridmann sur "O Vow O Vow", avec ses effets qui semblent tout droit dériver des FLAMING LIPS, on a vraiment l’impression de faire face à un titre sorti de leur répertoire ; les percussions sur "The Song of the Lake" semblent venir de MERCURY REV, les chœurs sur "Wild God" s’imprègnent de la réverbération de la pop psychédélique des années 60/70… Difficile de dire si Fridmann, pape de la pop/rock psyché, est directement responsable de ces choix, comme des effets électroniques qui parcourent Wild God… à moins que cela ne soit là que de drôles de coïncidences ?

Après l’excellent Ghosteen on pouvait avoir quelques craintes. Nick Cave pouvait-il faire mieux, ou tout au moins aussi bien ? Wild God apporte une réponse claire à cette question, Nick CAVE & THE BAD SEEDS demeurent au sommet de leur forme. Wild God est une déclaration d'amour toute en délicatesse, retenue, tout en étant d’une puissance émotionnelle et poétique bouleversante. Peut-être la face A du disque est-elle légèrement supérieure à la B, mise de côté l’envoûtante "Cinnamoon Horses", mais toutes les compositions parlent à l’âme. Peut-être l'auditeur sera-t-il "Touched by the spirit and touched by the flame" comme cette jeune femme dans "Conversion" ? Si Nick Cave, auteur de toutes les paroles, avait pour volonté de nous rapprocher du Ciel, ne serait-ce qu’un instant, alors il touche juste. Merci, tout simplement.

Note : 4.5/5

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- Martyn Casey (basse)
- Thomas Wydler (batterie)
- George Vjestica (guitare acoustique et électrique)
- Warren Ellis (synthés, loops, flute, violon, guitare, voix)
- Jim Sclavunos (vibraphone, percussions, voix)
- Nick Cave (chant, piano, voix, paroles)
- Carly Paradis (sifflement)
- Ben Foster (orchestration)
- Colin Greenwood (basse additionnelle)
- Luis Almau (guitares classique, acoustique additionnelles)
- Double R Collective (voix additionnelles)
- Nina Foster (violon)
- Anita Lane (voix sur 'o vow o vow')


1. Song Of The Lake
2. Wild God
3. Frogs
4. Joy
5. Final Rescue Attempt
6. Conversion
7. Cinnamon Horses
8. Long Dark Night
9. O Wow O Wow (how Wonderful She Is)
10. As The Waters Cover The Sea



             



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