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VARIÉTÉ FRANÇAISE  |  B.O FILM/SERIE

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Michel BERGER - Tout Feu Tout Flamme (1982)
Par MARCO STIVELL le 15 Avril 2025          Consultée 130 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Il est difficile de dire quel est le meilleur film de Jean-Paul Rappeneau, chose qui devrait pourtant être plus facile que d'autres réalisateurs vu que lui n'en a que huit. Cela étant, avec la qualité haute de chacun, on conçoit qu'il est malaisé de faire la part des choses quand moins d'éléments encore peuvent surnager dans des productions supérieures en nombre. Tout Feu, Tout Flamme, son quatrième en 1982, apporte un début de réponse (qui peut éventuellement être complété par Le Hussard Sur le Toit, son sixième en 1995). Le premier que j'ai acheté et encore, par chance, en souvenir d'une courte présentation de la carrière d'Yves Montand en introduction d'une VHS parue en presse de La Folie des Grandeurs (1971) de Gérard Oury. Il y avait d'ailleurs aussi Le Sauvage (1975), le troisième et précédent film déjà avec cet acteur immense, mais c'est bien Tout Feu, Tout Flamme qui s'était mieux ancré en tête. Sans cela, pas de découverte aussi passionnée !

Montand, alors dans une période difficile, ayant dépassé la soixantaine et voyant son épouse Simone Signoret, en victime de ses propres excès à elle, devenir quasiment aveugle durant les dernières années de sa vie (il ne lui survivra que six ans, jusqu'en 1991). Pour Tout Feu, Tout Flamme néanmoins, il est fringant comme dans ses jeunes années ou presque, ne laissant pas voir venir un seul geste lent du (futur) 'papet' César Soubeyran de Marcel Pagnol. Rappeneau s'y est pris au bon moment, de plus pour le confronter à une jeune Isabelle Adjani dans ses meilleures années. Le scénario très personnel, co-écrit avec sa petite soeur Elisabeth comme Le Sauvage ainsi que la future réalisatrice Joyce Buñuel, permet de faire éclater le talent de l'actrice dans tous ses états possibles, en tant que Pauline Valance, diplômée de Polytechnique, conseillère de ministre des finances, qui dès qu'elle rentre chez elle doit remplacer sa mère défunte, veillant sur ses deux petites soeurs et leur grand-mère en l'absence du père.

Ce père absent, globe-trotteur qui a appris le chinois à Singapour et dirigé pas moins de trois casinos, toujours amenés à fermer pour d'obscures histoires. En fuite constamment donc, sauf que là il décide de revenir vers ses quatre femmes encore en vie, sans oublier ses projets pour autant... De là, un récit à la fois haut en couleurs se met en place. Outre Montand le beau seigneur au fort accent, qui garde un peu du 'sauvage' de 75 mais revenu en France direct cette fois, outre Adjani captivante et pas seulement par son regard (un simple lâcher de chignon définitif suffit à en dire long), on croise son compagnon à elle, le journaliste plus-que-patient très joliment incarné par un certain Alain SOUCHON ! Il y a aussi Jean-Luc Bideau (qui figurait dans le Sorcerer de William Friedkin en 77, remake génial du non-moins génial Salaire de la Peur avec Yves Montand !), la mannequin-actrice américaine Lauren Hutton dont ce film reste le plus grand haut fait depuis longtemps, et l'une des soeurs Valance est Jeanne Lallemand, future madame Bob GELDOF !

Les retrouvailles père-fille aînée pour le moins mouvementées mais émouvantes, le départ brusque de Paris pour les berges du lac Léman (on pardonnera d'ailleurs le raccourci 'Jura' du début, alors que le seul endroit où on peut voir la frontière passer au milieu de l'eau est en Haute-Savoie, encore les Alpes d'autant plus qu'Adjani/Pauline guide SOUCHON/Antoine vers Evian !) avec des décors superbes, y compris le casino en ruines d'abord, éclatant de vie à la fin. Tout cet enchantement et le jeu des acteurs aurait pu faire espérer une nouvelle partition de Michel LEGRAND, comme pour les trois premiers films de Rappeneau, mais non, le vrai lien s'est fait cette fois par l'acteur principal et un personnage féminin des plus forts. En revanche, c'est un autre Michel musicien qui prend les rênes et pas des moindres, BERGER de son nom. Le grand gentil de la chanson française, parole d'un non-fan, fournit d'ailleurs ici l'un de ses meilleurs travaux et de loin. Entre autres raisons qui aident : pas de mots-messages, de cuivres, de France GALL non plus !

On commence cependant loin de son univers, avec les tambours de défilés en noir et blanc dans Paris libéré en 1945, le temps d'entrevoir Isabelle Adjani pour le seul moment 'vivant' de maman Valance, introduction énigmatique par rapport à la suite mais pas sans charme, et pour prouver que 'telle mère, telle fille'. Le générique prend la suite avec un thème de piano sur cordes rempli de tendresse, lancé avec timidité par la même note rejouée et baignant dans une ambiance totalement romantique. Court mais splendide, il évoque bien la fragilité de la femme-fille, sous la carapace de Polytechnicienne hyper-active et de maîtresse de maison, et on entend sans trop de mal Jannick Top, son bassiste favori et habituel, s'élever sobrement dans cet ensemble.

On l'entendra répété plusieurs fois au cours du film, notamment de façon un peu plus longue et aérée (sans compter la basse mieux marquée) pendant la "Découverte du Casino Par Pauline", beaucoup plus tard dans le script mais placé aussitôt en deuxième place sur le disque B.O consacré, édité par la Warner. Autrement dit la maison de disques de Michel BERGER dont, chose amusante, la fille s'appelle Pauline ; il lui a d'ailleurs dédié une chanson un an plus tôt sur son album Beauséjour (1981), ainsi qu'à un certain "Antoine" ! Ne pas donc se fier trop au disque et à ses répétitions sous des noms différents, ses durées courtes qui lui donnent des airs d'E.P. La B.O est plus riche que cela, proposant parfois deux versions d'un titre d'un bout du film à l'autre, comme ce "Thème de Victor" tour à tour country légère pour synthé soliste avec son rimshot de batterie (version disque) ou sans.

Le synthétiseur lead est à l'avenant, parfois lui aussi plutôt deux fois qu'une au sein d'un même morceau : on note notamment le générique final qui est une variante du fameux "Thème de Victor", aussi prenant à sa manière que celui de Pauline. Pour continuer sur le versant américain, BERGER offre un thème de méchant, "La Menace", qui correspond à Nash, l'ennemi de Montand/Victor Valance, joué d'ailleurs pas Pinkas Braun (seul vrai Suisse de la bande avec Jean-Luc Bideau) connu en France à l'époque dans la fin de la série TV des Brigades du Tigre. La rythmique joue un reggae ternaire et en métrique un rien impaire (trop d'informations 'bizarres' pour nos chers fumeurs de ganja !), avec des cordes toujours et un clavier scintillant ou plus incisif d'une variation à l'autre. Très sympa, tout comme ce "Radio de Bord" qui accompagne SOUCHON/Antoine et Adjani/Pauline de nuit sur la route du lac Léman, plus orienté synth-pop binaire comme BERGER développera ensuite durant ces années 80, pour lui-même et surtout sa chère France GALL.

Chose intéressante, "La Colère de Pauline", ramenant le piano et de fausses lancées latines qui font bien ressortir l'empreinte du compositeur de Starmania, "Besoin d'Amour" etc (sans compter le départ réel, toutes cordes héroïques et espiègles dehors), se situe dans le film un peu avant que notre belle protagoniste pète vraiment un câble. Et tout un pan de musique, notamment pendant la course-poursuite avec les italiens-sbires de Nash dans les montagnes proches du lac, se trouve écarté du disque, avec une bonne dynamique. Il y a notamment cet air lent et chaloupé au synthé lead toujours, resté totalement inédit à l'époque pour BERGER mais que l'on retrouvera développé sur un best-of posthume en 2002 (Pour Me Comprendre) et avec des paroles, intitulé "La Fille au Sax". Une version double de la même compil' sera d'ailleurs terminée par le générique de Tout Feu, Tout Flamme, savoureuse ironie !

N'oublions d'ailleurs pas l'humour, les bons sourires 'made in Rappeneau'. L'une des grandes forces ici est la manière dont la B.O suit l'action, aussi modeste soit-elle. Quand Pauline vient mettre la pagaille dans le casino en travaux et se retrouve accidentée, sauvée de justesse par son père, elle s'éloigne seule sous des dizaines d'yeux ébahis et la musique stoppe, laissant la femme-fille s'évanouir un peu plus loin en silence, pour mieux reprendre ensuite ! Idem de la course-poursuite susmentionnée, interrompue momentanément par un apprentissage accéléré du vélo puis un orage (le tout avec un petit arrière-goût de Résistance, d'où peut-être encore un lien avec la scène d'intro).

Sur le même mode, BERGER a écrit deux petites chansons tout de même, mais toutes en anglais (son album Dreams in Stone, méconnu, sort d'ailleurs la même année). La première est un blues ragtime, inédit au film, chanté par notre crooner Montand lui-même avec ses filles benjamines autour du piano à Paris. Moment guilleret dont on se délecte facilement (rien que par les paroles, ç'aurait pu être le thème musical de notre zigoto), très bien amené dans le déroulé puisque ce sont d'abord elles qu'on entend, et pour Pauline tout comme pour nous, la surprise se crée bien !

Enfin, il y a "Between You and Me", sucrerie sensuelle latina saupoudrée de piano Fender Rhodes et chantée par Yvonne JONES, Américaine exilée à Paris (tout comme son amie Carole FREDERICKS !). Avec un synthé passé à la talk-box, la basse veloutée de Jannick Top etc, pour deux minutes seulement, et de quoi faire encore plus regretter que BERGER ne lui ait pas composé un album entier à elle plutôt qu'à sa blonde épouse. En tout cas, pour son seul film avec Rappeneau - et lequel, encore une merveille de film français finaud, sans caricature et des plus charmants -, la B.O globale offre une belle compensation, en tant qu'expérience des plus réussies, malgré les contraintes trop visibles du disque. 3/5 pour lui, 4,5/5 pour la B.O qui suit le film.

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   MARCO STIVELL

 
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- Michel Berger (compositions, orchestrations)
- Yvonne Jones (chant)


1. Tout Feu Tout Flamme (générique)
2. Découverte Du Casino Par Pauline
3. Between You And Me
4. Le Thème De Victor
5. Radio De Bord
6. La Colère De Pauline
7. La Menace
8. Générique (fin)



             



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