Il y a dans l’Impromptu une sensation de souffle improvisé, de spontanéité, de geste fugace. Les impromptus de CHOPIN ne forme pas un véritable cycle. Ce sont quatre petites pièces, modestes, aux tonalités variées. Composées à des moments différents de sa vie, elles partagent une structure directe, des plus simples : A-B-A et la coda.

Le premier des impromptus, écrit en 1937, "Impromptu n°1 En La Bémol Majeur Op.29" s’ouvre, dansant au milieu d’arpèges en cascades qui se tissent et se déploient tout en légèreté, effleurant presque le clavier. Les croches vont et viennent usant de crescendos avant de laisser place à un passage central lyrique et mélodieux. Tout dans cette pièce virtuose semble être une invitation à la grâce bien, qu’au-delà de son charme immédiat, elle séduit sans bouleverser.

L’"Impromptu n°2 En Fa Dièse Majeur Op.36" est composé deux ans plus tard, en 1938. Par rapport à son grand frère, nous entrons, ici, dans un monde plus tourmenté. Les modulations inattendues et les harmonies riches transforment une structure simple en un enchevêtrement de sensations nouvelles. La pièce semble avancer à tâtons tant la sensation d’improvisation est forte. La structure narrative est subtile. Certains passages sont comme un écho aux polonaises, héroïques et fières alors que d’autres se distinguent d’un lyrisme, orné de trilles, qui s’étend tout en gammes, en arpèges. Mystérieux et contemplatif, cet impromptu a des allures impressionnistes.

Le troisième impromptu de l’opus 51 joué en Sol Bémol Majeur, 1942, est le dernier que CHOPIN compose. Plus mature que ses prédécesseurs, c’est l’impromptu de la retenue profonde. Il s’étend sur des accords arpégés, tranquille, pareil à un murmure. CHOPIN y développe une écriture plus complexe, des accordes diminués, des modulations, des crescendos et des decrescendos subtils lui apportant une certaine noblesse. Il n’impressionne pas par la passion ou l'éclat mais brille par son élégance et sa discrétion.

Enfin, vient le dernier impromptu. En réalité, il est le premier à être composé, en 1934, mais ne paraît pas du vivant de CHOPIN, et, bien qu’il exprime le souhait que ses œuvres ne se soient jamais posthumes, celle-ci est néanmoins publiée bien après, en 1855, devenant même son impromptu le plus célèbre. On lui ajoute le qualificatif de fantaisie ("Fantaisie-Impromptu") bien qu’il n’en ait pas le caractère. C’est sur une cavalcade de doubles croches, rappelant l’agitation et l’urgence d’une toccata, ne semblant jamais vouloir se calmer que se joue l’"Impromptu n°4 En Do Dièse Mineur Op.66". Le rythme est marqué par deux mains indépendantes, une main droite binaire donnant une certaine tension à la musique tandis que la main gauche se joue en rythme ternaire. Un chant intime, charmeur et sentimental, surgit du tumulte et l’atmosphère change dans la partie centrale. La polyrythmique demeure mais l’expression se fait plus douce et rêveuse avant un ultime retour au thème initial, encore plus turbulent et dramatique. Les notes se succèdent toujours plus frénétiques. Puis, la pièce se clôt, un peu comme une mer déchainée qui se retire doucement, la main gauche se calme, et bien que la main droite continue sa folle succession de doubles croches, celles-ci apparaissent comme un écho, un fond sonore, chuchoté. Cette pièce romantique semble s’inspirer du troisième mouvement de la "Sonate n°14 Au Clair De Lune" de BEETHOVEN.

Ces quatre impromptus singuliers forment un ensemble assez inégal n’atteignant pas les sommets émotionnels de certains chef d’œuvre de CHOPIN. Cependant, ils sont indépendants, et, chacun à sa manière, doté d’une grande créativité et d’une grande expressivité, déploie un charme unique et séduit.