C'est certain, pour séduire, le punk-rock doit transpirer la rugosité, l'urgence de l'instant, bref doit sentir les dessous de bras et l'alcool fort. De ce point de vue, le troisième album des REAL MACKENZIES remplit parfaitement sa mission. Pied au plancher du début à la fin, l'album vous prend à la gorge avec une violence et une brutalité inouïe, puis vous caresse l'échine avec ses mélodies irrésistibles et ses cornemuses. Trente minutes, pas une de plus, pas une de moins. Voici le temps que s'est alloué le groupe canadien pour marquer de son empreinte l'histoire du punk celtique. Et il faut dire que ce temps se révèle amplement suffisant, tant l'ensemble est tout bonnement inaudible. Confondant vitesse et précipitation, le groupe en a semble-t-il oublié de se payer un producteur digne de ce nom. Erreur de jeunesse ? Certainement pas, puisque Clash of the Tartans, précédent album du combo, sonnait de manière fort honorable. Mais là où une production hargneuse et âpre aurait sans doute pu servir le propos des compositions, le son étouffant et brouillon qui se dégage de l'opus ne donne pas vraiment envie de pousser loin ses investigations...

Il serait pourtant dommage de s'arrêter là, car le groupe a mis du cœur à l'ouvrage, c'est certain. En témoigne l'inspiré « Nessie », hommage au célèbre monstre du Loch Ness, qui ouvre l'opus. Tout y est : l'énergie, l'efficacité, le refrain, la prestation... ne manque que le son, qui rend littéralement désagréable l'écoute du morceau. Sur Loch'd and Loades, THE REAL MACKENZIES réaffirment plus que jamais leur fierté d'être de sang écossais et leur amour pour cette nation, symbolisée par diverses déclarations d'amour à ses figures emblématiques (« Memories of Old Pa Fogerty », « Donald Where's Yer Troosers »), sa tradition militaire et sa résistance à l'envahisseur (« Raise the Banner », « Swords of a Thousand Men »), mais aussi à son alcool (« Whiskey Scotch Whieskey »). Plus énergique encore qu'à ses débuts le groupe donne l'impression d'être composé d'une bande de jeunes musiciens morts de faim, jouant comme si sa vie en dépendait.

Ainsi, c'est avec une tristesse certaine que l'on entend le groupe, pourtant musicalement convaincant, se saborder par la faute d'une production indigente. Alors que les compositions sont globalement meilleures que sur les deux précédents opus, elles se voient massacrées par ce son indigeste que l'on croyait réservé aux groupes punk de troisième zone.

Ce n'est que dans le contexte du live que les compositions prendront toute leur ampleur, et notamment sur l'acoustique Shine Not Burn, qui donne aux extraits de ce Loch'd and Loaded la dimension qu'ils auraient due prendre sur album. Reste un opus à réserver aux acharnés du groupe canadien, s'ils n'ont pas peur de devoir aller consulter un ORL après écoute pour cause de saignements d'oreilles...