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TOYAH - The Changeling (1982)
Par ARP2600 le 25 Septembre 2015          Consultée 1760 fois

Il est à la fois plaisant et difficile d'aborder un disque qu'on aime particulièrement, surtout quand il s'agit manifestement d'affinités personnelles. The Changeling, le quatrième album de TOYAH, est une petite merveille, qui représente à mes yeux un certain idéal de la musique. Situé au carrefour de plusieurs styles et tendances, il présente un équilibre et une pertinence étonnants, le revers de la médaille étant qu'il plaira difficilement à un amateur d'un genre précis.

En 1982, l'effectif du groupe avait légèrement évolué. En plus de Phil Spalding à la basse, on retrouve maintenant Simon Philips à la batterie. Deux musiciens qui se sont curieusement retrouvés chez Mike Oldfield l'année suivante. Ensuite, on peut dire que le succès commercial de Anthem aura quelque peu changé la donne pour eux. Ils ont pu cette fois se permettre les services de Steve Lillywhite, dont la production est irréprochable. D'autre part, leur label les aura priés de ne pas trop traîner à publier la suite, or la chanteuse Toyah Willcox n'était apparemment pas prête.

Elle affirme que c'est l'album qu'elle a eu le plus de mal à créer. Elle a écrit assez rapidement des textes assez sombres voire cyniques, sur elle-même ou dans un contexte science-fiction/fantasy. Cela arrive parfois, les œuvres les plus tourmentées sont souvent les meilleures. Il faudrait savoir ce qu'en pensent les musiciens, surtout son complice Joel Bogen. Quoi qu'il en soit, cela fait toujours de nos jours une assez mauvaise publicité à The Changeling. Toyah ne l'aime pas, ou plutôt en garde un mauvais souvenir, et n'a pas souvent interprété des extraits en concert, à l'exception de « Angel & Me ». Il s'agit pourtant de son chef-d’œuvre là où le suivant qu'elle adore est fort moyen...

The Changeling. Ce titre est déjà éloquent. L'enfant échangé, le rejeton des fées... elle s'affichait déjà comme une fée guerrière sur la pochette de Anthem, et la voici maintenant une autre créature fantastique. Les deux albums se suivent manifestement, au niveau du visuel comme du style musical. Ce titre fait référence à son enfance chahutée. Toyah a toujours été une proto-punk sans le savoir. Très jeune, elle se battait avec ceux qui l'embêtaient, tout en expérimentant au niveau du look, la coiffure surtout. Son caractère très turbulent, un vrai petit monstre, l'a bien évidemment mise en conflit avec sa mère. Elle reconnaît volontiers que c'est elle qui n'était pas normale, un enfant pas à sa place dans une famille anglaise bourgeoise, bref, un « changeling ».

Ainsi, dans « Creepy Room », c'est elle qui fait peur au monstre avec ses yeux qui ressemblent à des blessures, dans « Angel & Me », elle parle des opérations qu'elle a subies dans son enfance, et de sa mère qui ne savait pas lui sourire. Dans « Life in the Trees », elle s'imagine retournée à l'état sauvage, en opposition avec la citadine « Street Creature ». Les chansons moins personnelles ne sont pas en reste, avec la fuite dans l'espace de « Castaways », les gladiateurs galactiques de « The druids » et ce mystérieux et effrayant « The Packt ». Sans oublier les références aux classiques de l'anticipation que sont 1984 (sur « Creepy Room ») et Le meilleur des mondes (« Brave new world »). Des thèmes new wave, mais on est sans doute un peu au-delà, cette fois...

Car la musique, particulièrement belle du début à la fin, intègre des éléments presque progressifs, flirte avec le gothique, mais pas à la manière de Bauhaus, tout ceci est sombre mais les sonorités sont colorées, emportant l'auditeur dans un voyage fantastique. Les mélodies sont directes, le chant puissant et clair, un peu plus ferme et moins théâtral que sur les albums précédents, tandis que les structures de chansons sont complexes, échappant souvent au banal couplet-refrain, la plupart présentant au moins deux parties distinctes, pour donner une pâte musicale mouvante et surprenante. On pensera autant à d'autres grands noms de la new wave qu'à David BOWIE ou Kate BUSH, sans oublier le lien avec TANGERINE DREAM qui est encore bien présent, mais on ne pourra pas nier que TOYAH a bien sa personnalité propre.

Les dix chansons s'enchaînent étonnamment bien qu'il n'y ait pas vraiment de thème général, et toutes sont excellentes. Si je devais en désigner une ou deux plus faibles, je dirais « Run wild, run free », malgré une montée finale délicieusement glam, voire « Angel & Me » dont la mélodie n'est pas impérissable mais dont la deuxième partie est quand même très entraînante. Globalement, les tempos sont plus lents que sur les premiers albums, surtout vers la fin, ce qui dénote une approche moins impulsive et clairement plus artistique. « The Packt » et « Life in the trees » sont particulièrement belles, d'un lyrisme très évocateur, tandis que l'énergie plus new wave de « Street Creature » est très réjouissante, sans oublier la guitare vicieuse de Bogen sur « The Druids », et la force tranquille de « Brave New World », idéale pour une conclusion.

The Changeling est un joyau méconnu de la musique du vingtième siècle, que les années ont plutôt bien épargné. Les claviers sont à la fois datés, un peu kitsch, mais aussi superbes, créant des ambiances charmantes qu'on ne trouve que dans la bonne new wave, ou chez TD et VANGELIS, et ils sont de toute façon loin de prendre toute la place, les guitares étant d'un goût assez sûr. Reste à aimer un ensemble aussi étrange, aussi baroque, aussi théâtral... on est ici plus que jamais dans le petit monde de Toyah, c'est ici qu'elle s'est le plus livrée, ce qui est sans doute lié au fait que cette création lui ait fait aussi mal. Une grande œuvre qui mérite vraiment d'être plus connue, et que je recommande donc sans aucune réserve.

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- Toyah Willcox (chant, bruitages)
- Joel Bogen (guitares, claviers, chœurs)
- Phil Spalding (basse, chœurs)
- Simon Philips (batterie)
- Andy Clark (claviers)
- Simon Darlow (claviers)
- Nigel Bennett (chœurs)
- Neil Hutchinson (cuivres)
- Vince Sullavan (cuivres)
- Dave Lord (cuivres)


1. Creepy Room
2. Street Creature
3. Castaways
4. The Druids
5. Angel & Me
6. The Packt
7. Life In The Trees
8. Dawn Chorus
9. Run Wild, Run Free
10. Brave New World



             



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