Voilà maintenant quelques années que Louis Hardin s'est définitivement installé en Allemagne. H'art songs - le jeu de mot est à nouveau facétieux, à son image - est son deuxième opus pour le label Kopf. Désormais, sa carrière est gérée de main de fer par sa compagne et assistante Ilona Sommer. Il dispose désormais de tout son temps pour composer et dispose à domicile de la transcripteuse dont il a toujours rêvé. Du coup, l'artiste fait preuve d'une prolifique énergie et écrit au quotidien qui du classique, qui du jazz, qui de la chanson ou de la musique baroque. Nous voici confrontés à un opus où il se mue soudainement en chanteur de chansons. Pas des pièces pour orchestre classiques, des canons ou des chaconnes. Non, rien de tout ceci sur la livraison 78 de MOONDOG, plus originale que jamais.

On touche les sommets sur certaines de ses petites compositions souvent courtes et simplistes dans leur forme. Qui plus est, les idées du viking de la sixième avenue transparaissent au travers de textes où l'innocence le dispute à l'idéalisme. Quand on sait la dureté de la vie qu'il a menée, on ne peut que rester coi devant une telle démarche. "Enough about human rights" est une merveilleuse litanie où Hardin énumére les droits des animaux des plus ignorés, comme le cafard ou les vers de terre, aux plus protégés comme la baleine. Il en a ras le casque d'entendre les plsintes constantes des hommes qui ont pourtant tout à leur disposition pour être heureux.

Plusieurs professions de foi sont présentes : "Do your thing" n'est rien d'autre que l'encouragement à poursuivre ses rêves et vivre en accord avec les principes que chaque homme choisit librement de suivre, la mélodie entêtante marque au fer rouge. "Im this I'm that" évoque les différences de tout un chacun, et par- delà, exprime à merveille toute la tolérance de l'artiste, peu importe l'apparence ou à quoi vous ressemblez, ce qui compte c'est le coeur, et "I'm in the world" est l'extension de la précédente, la vacuité de l'existence y prend tout son sens en nous positionnant telle la fourmi au milieu de notre planète. Celles-là sont les vraies chansons du coeur !

Les petites ritournelles de "Pigmy pig" et de "Aska me" sont savoureuses, sur leur petit rythme tressautant, et encadrent à souhait les chansons plus "sérieuses" de l'album. On attaque même les domaines de la pop avec "Choo choo lullaby" qui glorifie la nature avec une bonne humeur communicative. Le slow déclamatoire "High on a rocky ledge" prouve les liens désormais charnels qui l'unissent à la glorieuse terre germanique puisqu'il est question d'Edelweiss. Une des plus connues est cependant la complainte à son ancêtre "John Wesley Hardin" déjà mis en exergue par Bob DYLAN sur son album du même nom en 67. Le barde du Minnesota ne pouvait qu'admirer le viking du Kansas qui renverse la politesse en cette occasion.

Ces "chansons du cœur" peuvent certes faire sourire, mais elles sont pleines de gaieté et d'insouciance. Parfois, la démarche paraît presque enfantine tant l'homme est loin de ce mode de pensée. Il est tout à l'honneur de MOONDOG d'avoir sorti un opus si innocent qu'il ne peut en être que recommandable. Il en faudrait plus de cet acabit ! Certaines mélodies sont quand à elles immortelles.