Comme le public de 1992, je n'attendais pas grand-chose de Chic-ism|fi]. Le dernier album du groupe remontant à presque dix ans avait été une amère déception. Et pourtant...

Tout allait mal pour CHIC en 1983. Ses albums ne se vendaient plus, ses singles ne passaient plus à la radio. Ce genre de situation est évidemment pesant, le groupe se séparant officiellement deux ans plus tard.
Oui mais CHIC, c'est surtout ses deux têtes pensantes Nile Rodgers et Bernard Edwards qui, eux, ne comptent pas prendre de retraite anticipée, surtout pas quand, la même année que floppent Believer et Adventure in the Land of the Good Groove (l'album solo de Rodgers), ils connaissent un succès phénoménal en produisant le Let's Dance de BOWIE. Le calcul a dû être rapide : puisque leurs disques ne fonctionnent pas, mais que ceux qu'ils produisent pour les autres cartonnent, pourquoi ne pas continuer dans cette voie ?
C'est ainsi que, tout au long de la décennie, ils produisent pour David BOWIE, mais aussi MADONNA, DURAN DURAN, Mick JAGGER, B-52's, Robert PALMER, autant de beaux noms à ajouter à leur tableau de chasse, et surtout l'occasion de rester en forme. Alors, pourquoi revenir au bout de presque dix ans ? Pas par besoin, sûrement. Plutôt par envie : la découverte de CHIC par les nouvelles générations grâce aux nombreux groupes de rap samplant leur musique, ou à tous les artistes qu'ils ont inspirés, veut dire qu'un nouveau public est prêt à les accueillir. Peut-être aussi peut-on émettre l'hypothèse qu'ils aient eu envie d'écrire pour eux plutôt que pour les autres ? En tout cas, les faits sont là, l'année 1992 voit l'album Chic-ism arriver sous sa pochette moche.

Après la déception de Believer, je n'attendais rien de cet album et préparais même quelques petites phrases assassines que je me suis empressé de jeter dans la corbeille de ma mémoire, sitôt les deux premiers titres écoutés.
Chic-ism est un bon album. Ce n'est pas un Risqué 2,0(fi], mais je le classe au niveau de Take It Off. Il s'agit du disque le plus long du groupe (un tout petit peu plus d'1h de musique au compteur, époque oblige). S'il s'attarde quelque peu par endroits, cela reste un album solide.
Ainsi le single d'ouverture "Chic Mystique" emprunte directement à la house music mais garde un esprit résolument 70's qui gagna un succès modéré (se hissant tout de même dans le top 25 en Europe). J'accroche un peu moins à "Your Love" qui me fait penser à du JAMIROQUAI, mais je n'ai rien à dire sur "JusaGroove": ce morceau est moderne mais tellement CHIC ! C'est funky façon FUNKADELIC mais sa production rappelle que nous sommes au début des années 90. C'est le genre de titre qu'on veut trouver dans un album comme celui-ci. Il conserve l'identité du groupe, mais en remet à jour la musique.

Ainsi, CHIC continue ses explorations hip-hop en invitant la rappeuse PRINCESA à deux reprises. Pas d’inquiétude si vous ne reconnaissez pas ce nom, elle a mal fini. Droguée ? Non, pire : chanteuse pour VANILLA ICE ! Elle a au moins pu participer à deux morceaux de CHIC, "Chicism" et "Something You Can Feel". Le premier qui aurait mérité d'ouvrir le disque doit bien faire danser en concert, alors que le second entame le ventre mou de l'album qui enchaîne quelques pistes moins enthousiasmantes, jusqu'à "My Love's For Real" où on repart dans un bon funk bien groovy. Sur la dernière partie du disque, ce sont la ballade "High" et l'imprononçable "M.M.F.T.C.F." qui semblent sortis de leurs premiers albums. La reprise de "Chic Mystique" en conclusion est un peu redondante -un peu trop longue, une simple reprise d'une minute ou deux aurait suffi- mais qui termine sur un cycle, un éternel recommencement.

Chic-Ism n’engendrera pas de suite. Peut-être insatisfaits des résultats de l'album, Rodgers et Edwards reprennent leurs casquettes de producteurs (et retrouvent David BOWIE l'année suivante pour Black Tie White Noise, sûrement l'un de ses plus sous-estimés). Il faut attendre 2018 pour avoir une nouvelle livraison CHIC -qui sera aussi la dernière.