Cela faisait tout de même 4 longues années que SINSEMILIA n’était plus revenu nous voir avec un album studio.
En effet, à l’exception (notoire) du DVD "The Reggae Addicts Live" paru en 2016, leur précédent album, "Un autre monde" est possible, date de 2015.
La troupe est toujours aussi nombreuse, et d’une fidélité assez impressionnante au regard du nombre de membres qui composent le groupe et qui oscille entre 10 et 12 personnes. On retrouve ainsi les artisans de la première heure que sont Riké, Mike, Roukin, Natty, Ivan, Chid et Carine. Cette dernière étant la seule rescapée de la section de cuivre originale, la partie du groupe qui a connu le plus de changements.

Ce septième album, en 28 ans de carrière, a été financé via la plateforme de crowfunding Ulule. Le groupe ayant assuré lui-même le routage d’un exemplaire de son album aux plus de mille contributeurs, ce qui a certainement dû provoquer un surcroit d’activité dans certains petits bureaux de poste du Grésivaudan, d’où le groupe est originaire.

Au niveau musical, SINSEMILIA poursuit sa constante évolution vers un reggae toujours plus moderne et plus ouvert.
A l’instar d’un PIERPOLJAK, le groupe ne se laisse pas enfermer dans un style dogmatique et enrichie sa musique en lui incorporant des tonalités Rock et Variété.
Et on trouve au final relativement peu de traces de l’aventure qu’ont vécu Mike et Riké, les deux chanteurs du groupe, en tournant en duo, dans le cadre d’une tournée au format Sound system. Il n’y a guère que le titre ‘L’épreuve du temps’ qui semble puiser ses racines directement dans cette expérience. Notamment avec son entame dépouillée et la mise en avant de vocaux et d’une rythmique très massive. Puis sa lente montée en puissance qui incorpore les instruments les uns après les autres.
Mais au-delà de cette exception, et comme il en est coutumier, le groupe a principalement axé son album sur des titres aux tempi lents et lourds avec "Si j’avais su" ou "Vis ma fille", ou des morceaux plus entrainants et festifs à l’image de "Et si…" ou de "Sunny day". Sur ce dernier titre, aussi énergique qu’efficace, on retrouve Macka B qui renoue avec les grenoblois (pour mémoire, celui-ci était déjà présent sur leur deuxième album, "Resistance", paru en 1998).

Les textes sont, comme par le passé, principalement tournés vers la lumière, le groupe s’attachant, même lorsqu’il se fait nostalgique ou qu’il fait parler sa conscience sociale, à aborder la vie de manière positive et bienveillante.
Ainsi, ‘Si j’avais su’, sorte de bilan sur la manière dont on aurait pu orienter sa vie avec l’expérience que nous apporte le temps, ne sombre pas dans la résignation ou le découragement comme cela aurait pu être logiquement le cas. Bien au contraire, le morceau débouche sur le constat positif et encourageant qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire.
Et on peut trouver de cette lumière, de cette bonté d’âme, tout au long de "A l’échelle d’une vie".
Et pourtant, le groupe se plonge fréquemment dans l’introspection et la prise de recul ("Dernier concert", "Si j’avais su", "A l’épreuve du temps"...) mais il le fait toujours avec un humanisme et une bienveillance qu’il y a lieu de saluer.

La richesse de cet album est en outre rehaussée par les participations de plusieurs figures de la scène reggae. Au-delà du déjà mentionné Macka B, on peut retrouver Guizmo, chanteur guitariste de TRYO et Balik, chanteur et compositeur de DANAKIL qui viennent épauler SINSEMILIA sur le lourd, mais néanmoins excellent "Nourrissons nos cerveaux". Ainsi que le guyanais PATKO qui pose sa voix puissante sur "Sur les épaules d’un géant".

Energie, savoir-faire, émotion, sentiments nobles, SINSEMILIA donne encore le meilleur de lui dans ce bon album qui parvient avec bonheur à concilier ambiances reggae et musique accessible à tous.
Encore une belle réussite.