Cela faisait 7 longues années que MASSILIA SOUND SYSTEM n’était pas revenu nous proposer un nouvel album. Le dernier en date, sobrement intitulé Massilia (2014) se révélant au fil du temps bien plus intéressant qu’il n’y paraissait en première audition, avec notamment trois à quatre morceaux très forts. Et il semble que l’histoire se réitère avec ce Sale caractère qui peine un peu à charmer lors des premières écoutes, mais qui s’insinue sournoisement dans les cortex au fil du temps.

Il y a bien sûr quelques petites perles évidentes, parmi lesquelles on peut noter "A la rue" qui dresse un tableau d’une crudité froide du quotidien de la citée phocéenne. En totale opposition aux chansons dans lesquelles le groupe donne de Marseille une image un peu caricaturale et folklorique, comme cela pouvait être le cas dans "Un dimanche aux Goudes" ou bien "Au marché du soleil". Ici, ce sont les travers de la ville (affairisme, corruption, communautarisme, tentation du replis sur soi-même, baisse des solidarités..) qui sont pointés du doigt avec amertume lors de cette longue diatribe qui démontre la qualité d’écriture du groupe.

Au rang des réussites, on peut également citer le plus dépouillé "Tôt ou tard" sur lequel Papet J nous livre une très belle prestation pleine de charme. Faisant rimer sobriété avec élégance, pour nous faire passer un très bon moment. Il en va de même avec le lascif "Dans l’oreillette" qui est également l’occasion pour MASSILIA de nous réjouir avec son Reggae indolent. Mais certains morceaux nécessitent un effort d’écoute plus intense pour pouvoir livrer toutes leurs saveurs. C’est ainsi le cas du primesautier "La mouche", une amusante fable sur fond de revanche sociale, ou bien la chanson titre, "Sale Caractère", dans laquelle le MASSILIA SOUND SYSTEM renoue avec la structure de ces morceaux les plus anciens en y ajoutant quelques touches de modernité, avec notamment quelques passages en Autotune.

Mais trop souvent, les titres peinent à nous emporter. Par manque de caractère, par sentiment de déjà-vu, ou tout simplement du fait d’une composition un peu dispensable. C’est ainsi le cas de "Bòna adreiça", de "Uei", ou bien de "Lo Mercat. Ces titres ne sont pas foncièrement mauvais, mais ils sont loin d’être marquants et se contente de ronronner doucement sans distiller ce petit supplément d’âme qui permet habituellement au MASSILIA de nous faire chavirer.

Au surplus, la diversité des sons et des ambiances utilisée ne contribue pas à faciliter la tâche de l’auditeur qui se voit transporté d’un Reggae classique à des univers plus axés Drum & Bass, en passant par du Brega Funk, de la chanson française, et des effluves venues de tous les horizons. A tel point que l’étiquette « Folklore de la zone mondiale » pourrait coller à merveille au groupe. Mais ce qui devrait être un atout, notamment du fait du don que possède MASSILIA pour agréger, mixer toutes ses influences entres elles avec bonheur, ne remplit pas son office. Et ce qui apporte habituellement richesse et fraîcheur au groupe peine ici à convaincre.

Un résultat en demi-teinte, donc, au regard du savoir-faire de ce groupe d’exception et de la durée d’attente depuis leur précédent album. Et, à titre personnel, une déception. Sentiment probablement largement lié au niveau d’attente et d’exigence que j’ai pour ce groupe dont un des albums fait partie de mon top 10 de tous les temps, tous les genres. Il n’en reste pas moins que MASSILIA SOUND SYSTEM possède toujours ce charme et ce sens de la fête propres à nous séduire.