En 1994, ENUFF Z’NUFF sort son quatrième album intitulé 1985. Cette phrase absurde résume à elle seule le casse-tête auquel se voit désormais confronté le pauvre fan masochiste désireux de suivre la discographie du groupe de Blue Island, Illinois. Le combo est alors une coquille vide criblée de dettes et le flibustier aux lunettes rondes Chip Z’Nuff pour la première fois fait passer des fonds de tiroir en lieu et place d'un nouvel album pour renflouer les caisses. C’est vilain de prendre ses fans pour des gogos.

1985 n’est donc ni plus ni moins qu’une démo de compos antérieures à la signature chez Atco. "Tears of a Clown" est une reprise correcte mais manquant singulièrement de peps pour une relecture rock d’un hit Motown signé Smokey Robinson qui n’en manque pas en version originale et la poppy "Fingers On It" apparaissait sur la B.O de Henry:Portrait of a Serial Killer. Pour le reste, le principal intérêt de ce pseudo album est de découvrir comment sonnait le groupe avant le reformatage Glam Metal (qui pointe son nez sur "Hollywood Squares") opéré par le producteur Ron Fajerstein. La musique de Vie et Z’Nuff apparaît ici dans une veine Power Pop plus brute de décoffrage qui emprunte davantage à CHEAP TRICK qu’aux BEATLES. C’est du pareil au même, dites-vous ? Certes, mais Zander et Nielsen ont apporté leur propre pierre à l’édifice Rock et l’influence du groupe voisin de Rockford est indéniable sur bon nombre de compos ("Day by Day", "No Second Time", "Marie" avec sa rythmique cabaret façon "I Want You to Want Me") jusque dans leurs titres ("Catholic Girls", "Goodbye, Goodbye"). Le disque se termine par une reprise acoustique de "You’ve Got to Hide your Love Away" des Fab Four en live dans le studio d’Howard Stern, leur parrain médiatique, qui signe un texte dans le livret du CD.

Rappellons que le personnel jouant sur ces enregistrements faisait partie d’une première mouture du groupe et avec le recul, l’éviction du guitariste Gino Martino paraît bien injuste tant celui-ci ne démérite à aucun moment. On s’étonne aussi qu’aucun morceau n’ait été finalement retenu pour figurer sur le premier opus alors que d'autres ("No Second Time" pour citer un exemple indiscutable) auraient avantageusement remplacé certains fillers. Passée la déception de se faire refourguer une vieille demo pour une nouveauté, 1985 avec sa Ferrari 288 GTO finit par se frayer une place pas déshonorante dans la discographie chaotique de EZN grâce à la fougue sympathique des premières œuvres.