Produit par Institute For Electronic Arts, Object and Organic Code est sans doute le disque le moins connu de Tetsu INOUE. C'est bien dommage car il s'agit tout simplement du meilleur album de sa période la plus expérimentale, grosso modo entre 1996 et 2005. L'objet en lui-même est une curiosité puisque le CD qu'il contient n'est pas circulaire, mais de forme octogonale arrondie aux angles. Un format 'shaped', comme disent nos amis anglophones, que l'on vous déconseille vivement d'introduire dans votre lecteur dernier cri. L'album en lui-même n'est pas très long, à peine vingt-sept minutes au compteur, ce qui en fait l'œuvre la plus courte dans la discographie de l'artiste nippon.

Au commencement, "Healthy Pink" nous laisse penser que Tetsu INOUE s'en retourne une nouvelle fois décoder les réseaux corrompus de Fragment Dots. Object and Organic Code se révèle toutefois nettement plus serein que ce dernier par la suite, comme si le Japonais commençait à opérer ici son retour à l'ambient. Il faut néanmoins reconnaître que nous sommes encore loin des ambiances profondément zen d'Inland. Expérimental, ce huitième effort l'est tout autant que les trois précédents, dans un style encore une fois plutôt difficile à définir, entre ambient, glitch et noise. L'approche est cependant beaucoup plus organique qu'à l'accoutumée, à la différence de Psycho-Acoustic et Fragment Dots notamment, dont les myriades d'abstractions sonores se concentraient avant tout sur l'aspect technologique de l'outil informatique. Ici, au contraire, nous est exposé un monde miniature où le programme rencontre le vivant. La tour de votre ordinateur se peuple de bourdonnements électriques, de crissements insectoïdes, qui nous rappellent que le premier bug de l'Histoire était effectivement dû à un papillon de nuit piégé dans un relais – bug signifiant avant tout 'insecte' en anglais. Alejandro Jodorowsky et Juan Giménez avaient eu la même idée quelques années auparavant dans La Caste des Méta-Barons, en imaginant la 'zacouda frolex', sorte de mouche mutante échappée d'un circuit informatique. Encore une fois, ce genre d'exercice requiert une attention constante, la musique électronique de Testu INOUE n'étant ni dansante ni trop facilement apaisante. Cette foule de petites séquences insolites peut légitimement s'avérer déroutante, mais se révèle captivante si tant est que l'on accepte de se prendre au jeu.

Quoiqu'il en soit, Object and Organic Code est l'album le plus intéressant de la période 'glitch' de notre Japonais et le plus facile d'accès, peut-être parce qu'il s'agit aussi du moins chaotique. On regrette néanmoins "Healthy Pink" en introduction, dans la pure tradition du 'clicks and cuts' certes, mais trop radicale en comparaison des autres pistes. Le disque aurait sans doute mieux fonctionné sous un format plus court, il y aurait d'ailleurs gagné une quatrième étoile.