Rundinella n'est pas un disque commun pour un groupe qui ne l'est pas. C'est même curieux quand on y pense, comme s'il s'agissait à la fois d'un disque tout à fait officiel, et en même temps que seuls les spécialistes (dans le sens "qui connaissent l'ensemble des projets passés, présents ou futurs de ce groupe", ce n'est donc pas pour me jeter des fleurs à moi-même !) citent comme faisant partie intégrante de la discographie de ce groupe. La réalisation est bien celle d'I MUVRINI, on reconnait plus ou moins leur patte dans la composition, mais ils participent peu en tant qu'intervenants.

Il s'agit en fait d'une compilation des deux albums de chansons pour enfants écrits par I MUVRINI, Campemucci (1980) et Aiò (1981). Les deux sont aussi composés de poèmes écrits par Ghjuvan-Teramu ROCCHI, le directeur de Scola Aperta, l'école de chant à laquelle appartient cette chorale d'enfants. Mais le choix d'organisation de Rundinella est plutôt curieux. On a d'un côté les poèmes et de l'autre les chansons des deux albums plus ou moins mélangées.

A ce moment-là, il faut se fier à sa propre faculté de reconnaissance musicale car la seule indication de crédits que l'on a, c'est d'un côté pour Campemucci l'unique présence du pianiste Jean-Philippe BALDASSARI, et pour Aiò celle de divers musiciens comme Christophe MAC DANIEL (de CANTA U POPULU CORSU) ainsi que d'autres pour lesquels nous avons droit à ce que je considère comme la fâcheuse habitude des I MUVRINI de ne mettre que les initiales des prénoms. Mais même avec ça, c'est pas évident car le tout semble instrumenté de manière assez égale (sauf vers la fin où les guitares ressortent plus). On rencontre bien sûr les guitares acoustiques typiques du I MUVRINI d'alors (et même une 12 cordes sur "Lettre Muntagnola" et "Puppatuluccia", miam), mais aussi de la basse (!), de l'accordéon (!!), des claviers (!!!), de la batterie (!!!!), des saxophones (!!!!!!!!!)... Etonnant que le groupe ait mis tant de temps à se moderniser quand on sait que ces recueils de chansons pour enfants sont parus en même temps que leurs albums les plus folk. On entend chanter les frères BERNARDINI avec les petits, ce qui vient s'ajouter aux qualités de l'ensemble qui reste avant tout mignon et agréable. Peu de chansons se démarquent, elles restent toutes plutôt efficaces. Pour ce qui est de la face poèmes, difficile d'en dire quoique ce soit, pour quelqu'un qui n'est pas familiarisé avec la langue corse (je sais reconnaître quelques mots, mais de là à tout savoir traduire...). Disons qu'au moins, cela permet de profiter d'une certaine manière un peu plus de la présence des enfants.

Les mauvaises langues diront que c'est l'un des seuls disques valables d'I MUVRINI... Personnellement je pense qu'il est à réserver aux fans collectionneurs, et à ceux de chansons pour enfants. Ce genre de concept ne s'adresse en effet qu'à un certain type de public, et j'avoue humblement faire partie de ceux qui ne le ressortent pas souvent, un peu comme Anu da Vultà, mais pas pour les mêmes raisons. Peut-être que malgré son aspect mignon et parfois réjouissant, même l'unification de ces deux disques Campemucci et Aiò ne présente pas les mêmes qualités, voire autant d'intérêt que les futurs albums d'I MUVRINI. Il y a aussi le fait que le groupe nous présentera d'autres chansons pour enfants, une seule pour chacun de ses trois futurs albums, ce qui est plus facilement appréciable sur la durée, et puis d'un point de vue personnel, certaines d'entre elles seront encore meilleures que tout ce que nous propose Rundinella.