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I MUVRINI - Imaginà (2012)
Par MARCO STIVELL le 12 Août 2012          Consultée 4721 fois

Avant, je guettais chaque nouvelle sortie d'I MUVRINI. Ca n'a pas duré bien longtemps puisque j'avais acheté Alma très en retard, et qu'il n'y a eu que trois nouveaux albums depuis. Plus le temps passe et plus la fièvre baisse, votre serviteur n'attend plus grand-chose de ce pourtant sympathique groupe qu'il aura longtemps porté aux nues (il vous l'aura bien fait comprendre dans ses dernières chroniques)... sous toutes réserves malgré tout.

Imaginà est enregistré au studio personnel et moderne de I MUVRINI, à Tagliu-Isulaccia, avec le même groupe que pour Gioià et toujours Manu Gallet aux manettes. Une telle pochette nous annonce la couleur : les frères Bernardini, emplis de sentiments humains, tentent d'apporter leur soutien à une Terre abandonnée et qui est sur le point de se perdre définitivement sur les flots. Il faut dire qu'ils tentent d'apporter un peu de consolation et d'optimisme dans un contexte qui ne l'est pas vraiment, d'abord bien sûr pour leur Corse tant aimée. En langue insulaire avant tout, très rarement en français cette fois-ci, Ghjuvan-Francescu/Jean-François Bernardini exprime son désarroi face à l'accroissement des profits au détriment de la paysannerie, en Corse mais aussi dans le reste du monde («Dammi», «Pè Quantu Mi Vendi»/«Pour Combien Tu Me Vends ?»). «Fora» dénonce la montée du racisme et notamment en France alors que «Pietà» nous rappelle que la Shoah existait il n'y a pas si longtemps, et histoire de mettre un peu de couleur, la tolérance est défendue dans «Mondimei». La déforestation de l'Amazonie, elle, est mentionnée dans «Lurra» et «Planet's Spring». Ces messages tendent à nous faire réfléchir et à provoquer sur nous, humains, la même réaction que celles des cellules imaginales («Imaginà») qui permettent à la chrysalide de devenir papillon : lutter contre les cellules qui nous pourrissent la vie et exister malgré elles, en permettant «la plus belle des transformations».

Musicalement, ce disque est un petit peu particulier. On retrouve la saveur des précédents, plutôt ensoleillée et c'est d'ailleurs un premier reproche que l'on a envie de faire dès la première écoute : les parcours harmoniques en accords majeurs commencent à faire redite par rapport, si l'on remonte au plus loin, à ceux d'Umani (d'ailleurs, on pourrait presque fredonner plusieurs fois «Da Le Vostre Mane» sur ces nouvelles chansons). Ghjuvan-Francescu sait faire de très jolies choses avec une base simple, mais la même recette répétée indéfiniment et encore régulièrement sur toute la durée d'un album peut être difficile à avaler cette fois-ci. Ce qui fonctionnait encore sur Gioià peut-être contraignant ici. Ajoutons que reprendre Bach («Alegria di l'Omi») est assez risqué et troublant...

Et puis en écoutant mieux, on se rend compte qu'il y a autre chose. Ce disque se veut encore plus profond, éthéré que les précédents avec une mise en valeur des nappes de synthétiseurs, ce qui contribue à le rendre plus audacieux. D'autant plus que malgré la durée des chansons oscillant entre trois minutes trente et cinq minutes, on a l'impression qu'elles sont plus longues, une illusion fort intéressante tout comme la construction de certaines chansons. On se trouve souvent en présence d'une alternance voix parlée (samples) puis chantée, avec des passages instrumentaux où les voix planent rêveusement (ah, ces polyphonies...). De plus, l'orchestration varie selon le morceau, celui-ci dévoilant sa propre touche : plutôt guitare acoustique («Pè Quantu Mi Vendi», «A Collerà») ou électrique («Lurra»), rythmique presque militaire («Mondimei»), effets de kémentché ou de sitar, trompette ou boîte à rythmes façon Phil Collins («Fora»)... Bref il y a de la recherche, dans l'instrumentation et dans le son, y compris pour les voix. Sans oublier bien sûr l'efficacité des membres habituels, Mickey Meinert, César Anot, Thomas Simmerl et les enjolivements du violon de Laurence Dupuis et de la cornemuse de Loïc Taillebrest. Un titre assez impressionnant dans son développement reste «Letteruccia» avec des montées inspirées.

Je suis un peu embêté avec cet album. Il ne me marque pas vraiment, au début j'avais envie de dire que c'est toujours la même chose en moins bien mais ce n'est pas précisément le cas. Il y a cet «autre chose» qui rend l'album particulier, une démarche musicale qu'il convient de saluer, en plus de ces sentiments toujours prenants. Les autres fans apprécieront sans nul doute, mais on restera admiratif face à cette longévité. Histoire d'être un peu objectifs, quand même...

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   MARCO STIVELL

 
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- Jean-françois Bernardini (chant)
- Alain Bernardini (chant)
- Stéphane Mangiantini (chant)
- Jean-charles Adami (chant)
- Philippe Et Charles Rutili (chant)
- Mickey Meinert (guitares)
- César Anot (basse)
- Thomas Simmerl (batterie, percussions)
- Achim Meier (claviers, programmations)
- Loïc Taillebrest (cornemuses, flûtes)
- Laurence Dupuis (violon)
- + Christian Kretchmer (violoncelle)
- Catitu Tayassu (chant)
- Mennana Mennana (chant)


1. Eterna
2. Planet's Spring
3. Hazia
4. Pè Quantu Mi Vendi
5. Pietà
6. A Collera
7. Pace Santa
8. Fora
9. Dammi
10. 53
11. Mondimei
12. Lurra
13. Alegria Di L'omi
14. Letteruccia



             



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